Intervention de Yves Détraigne

Réunion du 22 mai 2008 à 9h45
Organismes génétiquement modifiés — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire

Photo de Yves DétraigneYves Détraigne :

Le discrédit dont souffrent les plantes génétiquement modifiées, encore renforcé par le récent documentaire intitulé Le monde selon Monsanto, doit être combattu par des données objectives et le rappel des bénéfices des OGM.

Si les avantages attendus pour l’agriculture sont bien entendu déterminants, il est important de répéter que les OGM utilisés dans le secteur de la santé permettent déjà de sauver des vies.

Je comprends les inquiétudes légitimes de nos concitoyens. En l’état actuel de nos connaissances, l’absence de preuve sur le risque sanitaire s’accompagne de l’impossibilité de prouver l’absence de danger.

De même, le risque environnemental éventuellement associé aux OGM est encore plus difficile à appréhender.

La sécurité sanitaire concentre ses moyens sur les effets directs pour l’homme là où la sécurité environnementale doit évaluer un large champ d’espèces et de races animales, ainsi que leurs innombrables interactions.

De plus, les effets environnementaux, en intervenant sur le long terme, sont très difficiles à évaluer a priori.

Enfin, les OGM sont perçus par nos concitoyens comme une évolution irréversible, ce qui explique leur inquiétude légitime à ce sujet.

C’est pourquoi il est primordial de garantir la coexistence des différents types de cultures. C’est ce à quoi les sénateurs du groupe UC-UDF se sont attachés lors de l’examen de ce texte.

De nombreuses dispositions allant en ce sens sont venues enrichir le projet de loi initial, notamment grâce à l’amendement de mon collègue Daniel Soulage, qui prévoyait que des distances de sécurité soient fixées par décret afin de limiter le risque de dissémination entre les cultures, ou encore grâce aux mesures adoptées par les députés qui concernent la protection des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux, ainsi que la défense des terroirs et des productions sous appellation.

Toutefois, il ne faut pas nier l’urgence qu’il y a à développer les OGM sur notre territoire. Nous n’avons déjà que trop tardé. Il en va de l’indépendance et du maintien de la compétitivité de l’agriculture européenne, spécialement de l’agriculture française, face à la concurrence mondiale.

Notre agriculture doit répondre à des enjeux renouvelés, notamment en ce qui concerne le développement des rendements, tout en réduisant parallèlement l’apport des intrants dans les cultures.

Ainsi, le Grenelle de l’environnement vient d’entériner l’objectif de diminution par deux de l’usage des pesticides d’ici à 2012. Or il faut bien comprendre qu’on ne peut pas être à la fois opposés aux pesticides et aux OGM, d’autant que notre dépendance en matière d’approvisionnement en oléoprotéagineux rend difficilement crédible toute position hostile aux OGM.

L’Union européenne consomme chaque année, afin d’alimenter son bétail – cela a déjà été souligné, mais il faut le répéter –, 30 millions de tonnes de tourteaux de soja. Or plus de la moitié des surfaces mondiales cultivées en soja le sont en soja OGM.

Les députés ont bien essayé de remédier à cet état de fait en adoptant un article relatif à un plan de relance des cultures d’oléoprotéagineux. La mise en place d’un tel plan me semble cependant vouée à l’échec, car nous ne disposons ni de la surface agricole utile nécessaire ni du climat adapté pour parvenir aux rendements attendus.

En revanche, sur cette question de notre dépendance en matière de protéines végétales, je signale que nous disposons en France d’une plante qui a des qualités comparables au soja pour l’alimentation animale et dont le développement pourrait nous permettre de réduire nos importations de soja OGM tout en ayant un effet bénéfique sur la dénitrification des sols : la luzerne.

Le « bilan de santé de la PAC » nous donne quelques inquiétudes sur l’avenir de cette culture. Je crois, madame la secrétaire d'État, que vous auriez intérêt, en tant que secrétaire d'État chargée de l’écologie, à conjuguer vos efforts avec ceux du ministre de l’agriculture pour assurer la pérennité de la filière « luzerne » dans notre pays.

Je souhaite donc que nous puissions développer notre propre filière de production d’OGM pour que nous en maîtrisions le processus de fabrication et que nous fixions nos propres critères de validation, des critères pleinement adaptés à notre modèle agricole et répondant aux attentes de nos agriculteurs.

Il n’est pas normal qu’une firme multinationale détienne plus de 70 % des brevets de semences OGM et, pour parler clairement, qu’OGM ne rime aujourd'hui qu’avec Monsanto.

Le bilan que l’on peut faire à l’heure actuelle des OGM n’est possible qu’au travers du prisme Monsanto, et ce prisme a été faussé dès le début.

Les États-Unis ont fait le choix du principe de l’équivalence en substance : les plantes génétiquement modifiées, comparées aux plantes non transgéniques, sont équivalentes sur la seule base de leur composition et ne sont soumises à aucune réglementation spécifique.

En Europe, au contraire, nous avons fait le choix d’une évaluation au cas par cas des OGM, ce qui offre des garanties autrement plus solides.

Aussi, s’il est un domaine à encourager, c’est celui de la recherche sur les biotechnologies.

Actuellement, la plupart des OGM commercialisés sont destinés à résister aux herbicides et aux insectes. Ils ne concernent donc que la production agricole. Mais les chercheurs ne cessent de montrer que, par différentes méthodes, ils peuvent créer des plantes capables de résister à la sécheresse ou à la salinité des sols, réclamant moins d’énergie et de traitements chimiques, dotées de meilleures propriétés nutritionnelles et sanitaires, ou permettant de lutter contre des maladies.

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