Intervention de Jean Arthuis

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 25 février 2010 : 1ère réunion
Comité de suivi du dispositif de financement de l'économie française — Communication

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président :

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord rappelé que le comité de suivi du dispositif de financement de l'économie française comprend les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances des deux assemblées, le gouverneur de la Banque de France, le directeur général du Trésor et de la politique économique et le directeur du budget.

Il a ensuite abordé la question du financement de l'économie au cours de l'année 2009. Il a constaté que la progression des encours de crédits est satisfaisante même si les banques n'ont pas tenu leurs engagements. En effet, dans un contexte de diminution de 2,2 % du produit intérieur brut (PIB), ces encours ont crû de 1,8 % en France alors qu'ils ont régressé de 0,6 % dans la zone euro. A titre de comparaison, en 1993, avec un recul du PIB de 0,9 %, les encours avaient décru de 1,8 %. Il a souligné que la progression des encours de crédit est plus forte pour les banques signataires d'une convention avec l'Etat puisqu'elle atteint 2,7 %. La différence, de près d'un point avec l'ensemble du secteur bancaire, atteste que la contrepartie du soutien de l'Etat a réellement incité les banques à produire un effort en matière d'accès au crédit. Elles n'ont certes pas atteint l'objectif de 3,5 % mais celui-ci était apparu caduc dès juillet 2009, dans la mesure où il avait été calculé sur la base d'une hypothèse de croissance de 1 %.

a ensuite attiré l'attention sur les engagements pris par les banques pour l'année 2010. Il a souligné que la marge de manoeuvre de l'Etat semble plus restreinte car il ne dispose plus nécessairement des outils permettant de demander des contreparties au secteur bancaire. Le ministère de l'économie poursuit un dialogue approfondi afin d'engager les banques à sortir d'un comportement excessivement prudent. Il a toutefois admis que les pouvoirs publics doivent justement doser leurs incitations pour ne pas conduire les établissements de crédit à commettre des actes anormaux de gestion. Dans ce contexte, il s'est félicité de deux engagements pris par les banques. Le premier consiste à augmenter de 38 milliards d'euros l'encours des crédits de moyen et long terme sur l'année 2010, soit une hausse de 6 %. Le second vise à réduire le délai de traitement des dossiers à 10 jours.

a admis que la situation macroéconomique cache des réalités hétérogènes. Ainsi, le crédit aux particuliers se maintient mieux que le crédit aux entreprises, même si ce dernier a connu une légère reprise à la fin de l'année 2009. Le crédit aux collectivités territoriales, désormais encadré par une charte de bonnes pratiques, bénéficie d'une hausse remarquable en 2009. Le crédit aux particuliers a crû de 4,1 % en 2009. Le crédit à la consommation se caractérise par un taux de croissance erratique, tantôt négatif, tantôt positif, et par une production de crédits stable. L'encours du crédit à l'habitat, quant à lui, a crû en 2009 malgré une chute de 17,6 % de la production dans ce secteur. La baisse des taux d'intérêt, à la fin de l'année 2009, semble favorable à la reprise du crédit à l'habitat, tandis que le crédit à la consommation profite d'une hausse de la demande combinée à une normalisation des critères d'octroi.

Il a indiqué que la situation du crédit aux entreprises révèle un problème de demande. En effet, les crédits mobilisables ont crû de 0,8 % alors que, dans le même temps, les crédits effectivement mobilisés ont décru de 1,1 %. Il a également constaté que le crédit à l'investissement de moyen et long terme est demeuré stable, ce qui démontre qu'il n'y a pas eu de comportement de restriction du côté de l'offre. Il a précisé que certains entrepreneurs ont préféré l'autocensure en ne sollicitant pas de crédit. La forte chute, de 14,2 %, du crédit de trésorerie s'explique par la moindre nécessité de financer le fonds de roulement et met en exergue le recul très sensible de l'activité économique. Pour autant, le financement des entreprises a augmenté de près de 4 % en 2009, ce qui correspond à l'objectif visé par le Gouvernement. Les grandes entreprises ont toutefois préféré se financer sur le marché obligataire, pour un montant total de 50 milliards d'euros.

Les crédits aux très petites entreprises (TPE) et aux petites et moyennes entreprises (PME) ont connu une croissance de 2,7 % en 2009, ce qui constitue une bonne surprise au niveau macroéconomique. M. Jean Arthuis, président, a estimé que le Médiateur du crédit et OSEO ont contribué à ces bons résultats. Depuis sa création, le premier a permis de débloquer près de 2,4 milliards d'euros pour 9 440 entreprises. Le nombre de dossiers qui lui sont soumis a nettement diminué, de l'ordre de 10 % à 20 %, depuis le second semestre 2009. En revanche, les nouveaux dossiers mettent en jeu des entreprises de plus grande taille et se révèlent, de ce fait, plus complexes. Pour sa part, OSEO a connu un renforcement sans précédent puisque ses fonds propres ont été augmentés de 500 millions d'euros. Sa capacité de garantie de crédits bancaires a doublé et s'est élevée à 8 milliards d'euros.

a ensuite rappelé l'importance des dispositifs d'assurance crédit CAP, CAP + et CAP-Export dans la politique de soutien à l'activité des entreprises. CAP a connu une croissance forte et régulière pour atteindre 500 millions d'euros d'encours et protéger plus de 3 600 entreprises. Après une montée en puissance rapide, les encours de CAP + se sont stabilisés autour de 700 millions d'euros pour 5 000 entreprises bénéficiaires. Enfin, l'encours de CAP-Export, qui constitue une déclinaison des deux précédents dispositifs, s'élève à 154 millions d'euros et permet ainsi d'assurer plus de 2 600 relations commerciales.

Il a ensuite présenté la situation des banques françaises et indiqué que cette industrie semble sur la voie de la normalisation. Le produit net bancaire (PNB) a en effet progressé de 16,9 %, en 2009, pour s'établir à 85,2 milliards d'euros. L'ensemble des groupes bancaires français devraient être excédentaires en 2009, à une exception près. Le coût du risque apparaît néanmoins toujours élevé. Il atteint 18,7 milliards d'euros, soit une multiplication par un facteur de 2,1. Les banques ont enregistré 6,4 milliards d'euros de décotes contre 14,5 milliards d'euros l'année précédente. Cette diminution sensible ne doit cependant pas occulter leur montant toujours significatif.

a constaté que tant la banque de financement et d'investissement (BFI) que la banque de détail ont connu une phase de croissance en 2009, respectivement de plus de 104 % et de 13,8 %. Malgré ces bons indicateurs, la BFI demeure globalement déficitaire à hauteur de 800 millions d'euros. De même, le doublement du coût du risque dans la banque de détail, notable pour les groupes ayant une forte activité internationale, pèse sur le résultat avant impôt qui diminue de 17 %.

Il a souligné que les banques françaises apparaissent solides au regard des critères de solvabilité. Le ratio « Tier 1 » évolue, selon les établissements, de 8,8 % à 10,4 %. Hormis pour le groupe Banques populaire - Caisses d'épargne (BPCE), l'ensemble des banques ont amélioré ce ratio d'au moins 0,5 point entre juin et septembre 2009. La Commission bancaire s'est montrée très vigilante sur l'évolution des fonds propres, notamment lors des opérations de remboursement des titres ou actions souscrits par la société de prise de participation de l'Etat (SPPE). Par ailleurs, les banques françaises se préparent activement aux nouvelles règles prudentielles, dites de « Bâle 3 ». La situation saine des fonds propres des établissements de crédit explique qu'ils obtiennent tous des notes supérieures à A+.

Il a évoqué les tests de résistance effectués par les banques centrales. La Banque de France conduit régulièrement ce type d'exercice afin de contrôler la solidité du secteur bancaire en cas de situation anormale. Le Conseil ECOFIN a retenu le principe d'un test de résistance européen en 2010 sans que la date ne soit, à ce jour, fixée. Sur la question de la publication des résultats, le Gouverneur de la Banque de France a jugé qu'elle ne peut avoir lieu qu'avec des tests harmonisés et peu fréquents, pour autant que nos partenaires européens, jusqu'à présent très réticents, l'acceptent.

a salué le redressement de la société Dexia. Son résultat net devrait s'élever, pour 2009, à plus de 900 millions d'euros tandis que son besoin de financement de court terme s'est réduit de près de 80 milliards d'euros. Par ailleurs, même si elle en bénéficie toujours, la société n'a plus besoin de la garantie de refinancement des Etats. Elle devrait connaître, d'ici 2014, une profonde restructuration articulée autour de quelques points saillants. Son bilan sera réduit de près de 35 % par le biais de cessions d'actifs. De même, ses coûts diminueront de 15 % grâce à des fermetures d'agence en Europe et d'implantations à l'étranger. La banque devrait définitivement sortir de la garantie de refinancement des Etats d'ici juin 2010. Elle devra restreindre sa distribution de dividendes. Enfin, la part de financement à court terme dans son bilan sera ramenée à 10 % tout en maintenant un ratio « core Tier 1 » supérieur à 10 %.

Il a ensuite dressé le bilan de l'activité de la société de financement de l'économie française (SFEF) et de la société de prise de participation de l'Etat (SPPE). En ce qui concerne la SFEF, il a rappelé que la normalisation progressive des marchés a conduit à mettre cette structure en veille après une dernière émission le 15 septembre 2009. Au total, elle a conduit 19 émissions pour un montant de 77 milliards d'euros auprès de 12 établissements. Les premiers remboursements interviendront en mars 2010 tandis que les dernières créances s'éteindront le 15 septembre 2014.

La SPPE, quant à elle, a souscrit à 19,75 milliards d'euros de titres émis par cinq établissements à raison de 9,95 milliards d'euros de titres super-subordonnés et de 9,8 milliards d'euros d'actions de préférence. Elle a également pris une participation de 5,7 % au capital de Dexia. A ce jour, 13,45 milliards d'euros ont été remboursés après accord de la Commission bancaire. Cette somme n'a pas été utilisée pour réduire l'endettement public mais a été « consolidée » dans la dette publique pour financer une partie de l'emprunt national. M. Jean Arthuis, président, a souhaité que les sommes restant à rembourser - 6,3 milliards d'euros sont encore dus par le Groupe BPCE - soient utilisées pour réduire l'endettement public plutôt que pour financer des dépenses nouvelles.

Il a également souligné que le plan de soutien au financement de l'économie devrait générer près de 2,5 milliards d'euros de recettes brutes à raison de 1,4 milliard d'euros au titre de la garantie apportée par l'Etat à la SFEF, 193 millions d'euros au titre de la garantie accordée à la société Dexia et 940 millions d'euros au titre des intérêts bruts versés à la SPPE. Ce dernier chiffre est encore provisoire tant que les comptes de la SPPE ne sont pas définitivement arrêtés.

Il a enfin rappelé les autres engagements des banques. En ce qui concerne la rémunération des dirigeants, il a relevé que les modifications réglementaires intervenues en 2009 ont fixé un cadre contraignant. En parallèle, la Commission bancaire dispose désormais d'outils coercitifs pour le faire respecter. M. Michel Camdessus a été nommé contrôleur des rémunérations et poursuit un dialogue approfondi avec les différents établissements de la place.

En ce qui concerne les paradis fiscaux, il a noté que la France est le seul Etat à s'être mis en cohérence avec les principes du G 20. En particulier, suite au vote de la loi de finances rectificative pour 2009 du 31 décembre 2009, un arrêté du 12 février 2010 a établi une liste de 18 juridictions non coopératives.

Enfin, en ce qui concerne les fonds non centralisés du Livret A et du Livret développement durable (LDD), près de 87 milliards d'euros ont été mobilisés et ont permis d'accorder un encours de prêts d'environ 190 milliards d'euros au profit des PME et de plus d'un milliard d'euros au titre des travaux d'économie d'énergie.

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