J’interviendrai sur ce seul article car c’est le plus important, et par son contenu et par son contexte.
Commençons par la communication. Mardi dernier, à Orléans, le Président de la République disait : « Je pense au principe de précaution, je pense à la transparence […]. Je pense à la participation de la société civile aux décisions […]. »
Il y a aussi le débat du Grenelle et ses arbitrages, à qui l’on doit : une Haute autorité qui reflète la mixité de la prise de décision et la pluridisciplinarité, davantage de recherche durable, la liberté de produire et consommer sans OGM et la possibilité de produire avec OGM de façon encadrée, les critères du développement durable, la règle du « pollueur-payeur ».
Il y a le ministre du développement durable et sa courageuse secrétaire d’État, qui ont permis l’interdiction du Monsanto 810.
Mais il y a aussi le ministre de l’agriculture, qui, par son abstention à Bruxelles en septembre, permet trois nouvelles autorisations de maïs transgénique.
Et puis, il y a le Parlement, et en particulier le Sénat, qui n’a entendu ni les consommateurs, qui ne veulent pas d’OGM dans leurs assiettes, ni les paysans, qui craignent des récoltes contaminées, ni les chercheurs en dehors des spécialistes de biologie moléculaire.
On n’a pas écouté les chercheurs en écologie ni les chercheurs en économie qui, s’ils considèrent que l’agriculture biologique peut nourrir des milliards d’habitants sans dépendance pétrolière, observent par ailleurs que l’extension de la monoculture du soja transgénique au Brésil se traduit déjà par une dégradation des sols et des pertes de biodiversité considérables et que le problème de la faim dans le monde est avant tout une question de répartition des ressources : aujourd’hui, cultures et innovations sont tournées vers l’alimentation du bétail des riches, surconsommateurs de viande !
Et même, certains chercheurs en biologie moléculaire ont osé dire, comme Christian Vélot, le côté aléatoire des transgénèses et de leurs expressions. Ceux-là voient leur équipe et leurs thésards privés de moyens…
Ne soyons pas étonnés : en 2003, une enquête de l’Institut d’études politiques de Paris, réalisée auprès de 200 parlementaires, révélait que seuls 4 % d’entre eux considéraient la sauvegarde de la faune et de la flore comme un sujet important. Et, quand 34 % des Français voyaient un lien entre désordres climatiques et effet de serre, seulement 21 % des parlementaires l’admettaient !
Au-delà de la non-écoute, ce qui est le plus gênant, c’est de découvrir dans les avis du rapporteur la copie conforme des préconisations, qui nous ont été adressées à tous, du Groupement national des industries semencières, le GNIS, et de l’Union des industries de la protection des plantes, l’UIPP. Curieux, ces fabricants de pesticides qui font la promotion des OGM, dont on nous dit qu’ils vont éviter l’utilisation des pesticides !
Ils demandaient : « un régime de responsabilité qui ne soit pas trop contraignant », il en a été ainsi décidé ; « une autorité avec deux comités », c’est fait ; « une évaluation qui doit rester la compétence exclusive des scientifiques », c’est voté ; « une saisine de l’autorité qui ne soit pas trop large », c’est bordé ; « le refus de la subsidiarité et de l’interdiction sur certains territoires », c’est engrangé ; « le refus de l’étiquetage des produits », c’est dans la loi !
Malgré les efforts déployés par les députés à l’article 1er pour protéger les cultures « sans OGM », le seuil scélérat de 0, 9 %, promu par les firmes, est retenu grâce au sous-amendement du Sénat ! Carton plein pour les semenciers, qui ont réussi le tour de force d’obtenir de la majorité sénatoriale que la responsabilité en cas de dissémination pèse sur les seules épaules des agriculteurs, dont elle se dit pourtant proche ! Le chimiste Monsanto se frotte les mains.
Enfin, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, contre ces prédateurs de la biodiversité, contre ces destructeurs de la liberté de cultiver et de manger sans OGM, l’atelier intergroupe OGM du Grenelle de l’environnement – y compris la FNSEA – a heureusement inscrit au nombre de ses consensus la « non-brevetabilité du vivant ». Eh bien, cette mesure est passée à la trappe, comme toute référence aux certificats d’obtention végétale, les COV, pourtant promus dans un texte adopté par le Sénat ! Il n’y a pas de hasard !
Pour nous, il y a avant tout le bien commun, celui de nos enfants, celui des peuples d’ailleurs comme d’ici, celui qui est fabriqué entre nature et culture. Dans son intervention, Daniel Raoul, parlant du blé et de l’épeautre, oubliait les quelques centaines de millions d’années facteurs d’ajustements judicieux, bien plus pertinents que le hasard de nos chers inventeurs du biomoléculaire !