Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 23 juin 2008 à 15h00
Modernisation des institutions de la ve république — Article 14

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

L’article 39 de la Constitution prévoit que le Conseil d’État est obligatoirement saisi de tous les projets de loi avant leur adoption par le conseil des ministres et leur dépôt devant le Parlement. Cette compétence du Conseil d’État concerne l’ensemble des textes normatifs de valeur législative et constitutionnelle.

Les séances des sections administratives et de l’assemblée générale du Conseil d’État ne sont pas ouvertes au public. Si un certain nombre d’avis sont publiés au rapport annuel du Conseil d’État, les avis sont destinés au seul Gouvernement et ne sont rendus publics que si le Gouvernement en décide ainsi.

Par cet amendement, nous demandons la publicité de ces avis. D’une part, nous considérons que, si ces avis ne sont pas publics, ils ne sont pas secrets pour tout le monde. L’accessibilité à géométrie variable à de tels documents pose déjà un problème. D’autre part, en raison de l’expertise juridique qu’ils délivrent, ces documents sont précieux pour l’information et la formation du jugement des parlementaires. Enfin, cela éviterait la suspicion et les situations délicates dans lesquelles, après que le ministre s’y est engagé en commission et dans le respect total de la Constitution qui ne le lui interdit en rien, l’avis n’est jamais transmis.

Je rappelle pour ceux qui n’y ont pas assisté que, lors des débats au Sénat sur le projet de loi relatif à la réforme portuaire, notre groupe a fait un rappel au règlement afin d’attirer l’attention du ministre sur la non-transmission de l’avis du Conseil d’État sur ce projet, alors même que ledit ministre s’y était engagé publiquement devant la commission des affaires économiques.

Le ministre nous a répondu qu’il n’était pas de tradition de transmettre les avis du Conseil d’État et qu’en outre il s’agissait, en l’occurrence, non pas d’un avis à proprement parler, mais de quelques modifications rédactionnelles, donc rien qui puisse retenir l’attention du Parlement. C’est savoureux !

Le ministre s’est alors à nouveau engagé à nous faire parvenir le document qui était, selon nous, fondamental, au regard de l’atteinte au domaine public portée par le projet de loi.

Plusieurs jours après la fin des débats, nous avons reçu, de la part des services du ministère, un document de quelques lignes, ni signé ni daté, livrant une analyse postérieure au débat et qui, par conséquent, ne pouvait être confondu avec les remarques, toujours antérieures, du Conseil d’État.

Cette attitude est d’autant plus déplaisante que l’on ne saurait imaginer un seul instant que le Conseil d’État se contente de quelques lignes sur un sujet aussi important, alors que les projets de loi qui lui sont adressés sont instruits par un rapporteur et donnent lieu à un projet amendé ou à une note de rejet, elle-même discutée et votée. Si ce n’était pas le cas, on pourrait s’interroger fortement sur la qualité et la raison d’être de sa fonction consultative !

Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, nous vous demandons d’adopter notre amendement, qui permettra enfin d’éviter que les ministres ne se déjugent et de rendre les avis publics pour tous.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion