Intervention de Muguette Dini

Commission des affaires sociales — Réunion du 3 mai 2011 : 1ère réunion
Droits et protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques — Examen du rapport et du texte de la commission, amendement 1

Photo de Muguette DiniMuguette Dini, rapporteure :

Cet amendement n° 1 est central. Le projet de loi prévoit la création de soins psychiatriques sans consentement sous autre forme que l'hospitalisation complète. Cette proposition, qui figurait dans plusieurs rapports sur la psychiatrie, vise, selon l'exposé des motifs du projet de loi, à « adapter la loi aux évolutions des soins psychiatriques et des thérapeutiques aujourd'hui disponibles qui permettent à de nombreux patients d'être pris en charge autrement qu'en hospitalisation à temps plein ».

Si l'objectif de diversification des modes de prise en charge peut être partagé par tous, les soins psychiatriques sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation complète ne font l'objet d'aucune définition précise dans le projet de loi et soulèvent de nombreuses interrogations, alors même que le dispositif est censé entrer en application dès le 1er août prochain.

Rien n'est dit sur le contenu du protocole de soins, sur les conditions de sa mise en oeuvre, sur les conséquences du non-respect du protocole ou sur la liste des personnes qui peuvent avoir connaissance du protocole de soins.

Beaucoup de questions restent sans réponse : les familles, qui ne sont pas mentionnées dans ce texte - 40 % des malades ont un environnement familial attentif - en attendent des solutions à leurs angoisses : elles pensent qu'elles seront systématiquement informées du contenu du protocole. Où sera la liberté du malade ? Elles imaginent que, s'il n'est pas respecté, le malade sera soigné « de force » puisque sans consentement.

Si le malade ne se rend pas à l'un de ses trois rendez-vous hebdomadaires au centre médico-psychologique (CMP), les équipes soignantes devront-elles ou seront-elles tentées, pour se couvrir, de déclencher un branle-bas de combat pour le faire réhospitaliser, car il n'est pas question pour elles de s'introduire de force au domicile du malade ?

Pour l'instant, avec la sortie d'essai, la négociation est possible et aboutit souvent entre le psychiatre et le malade. Elle sera aussi possible si on adopte les soins sans consentement en ambulatoire sauf que, par définition, il n'y aura pas consentement du malade.

En somme, d'un côté on considère le malade comme un être responsable, capable de répondre au juge, de l'autre, on lui impose un protocole de soins sans lui demander sa collaboration puisque, par définition, c'est sans son consentement.

Enfin, le texte offre la possibilité au préfet de transformer, de sa propre initiative, une mesure d'hospitalisation complète en une mesure de soins sans consentement sous une autre forme. Une telle possibilité introduit une confusion entre soins et sécurité. Aujourd'hui, le préfet ne peut ordonner une sortie d'essai d'un malade s'il n'est pas saisi d'une proposition en ce sens par un psychiatre.

Trop d'interrogations subsistent aujourd'hui sur la notion de soins sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation complète et il serait souhaitable qu'une véritable concertation soit opérée avant de légiférer sur ce point. Il est préférable, à ce stade, d'en rester à l'hospitalisation sans consentement assortie de sorties d'essai lorsque l'état du patient le permet.

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