Intervention de David Assouline

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 19 novembre 2009 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2010 — Programme presse de la mission médias - examen du rapport pour avis

Photo de David AssoulineDavid Assouline, rapporteur pour avis :

Après avoir rappelé que l'engagement de l'État à financer un plan de soutien exceptionnel en faveur de la presse de 600 millions d'euros sur trois ans s'était traduit par une augmentation de 51 % des crédits du programme 180 « Presse » dans le projet de budget pour 2010, M. David Assouline, rapporteur pour avis, a formulé les observations suivantes :

- en ce qui concerne les aides à la diffusion de la presse, la question centrale demeure celle du prolongement, en 2010, du moratoire sur l'application des accords État- Presse-La Poste qui prévoyaient une revalorisation progressive des tarifs du transport postal de la presse. En 2010, l'aide totale au transport postal de la presse s'établira à 242 millions d'euros, auxquels s'ajoute la compensation au titre du report d'un an en 2009 de la mise en oeuvre de ces accords, pour un montant de 28 millions d'euros. Le prolongement de ce moratoire est, pour l'heure, essentiellement réclamé par les familles de presse dont les ventes s'appuient en grande partie sur l'abonnement postal (presse magazine et presse spécialisée), les éditeurs de la presse quotidienne nationale semblant, en revanche, redouter que la reconduction du moratoire débouche, à terme, sur une renégociation des accords précités. M. David Assouline, rapporteur pour avis, a estimé néanmoins nécessaire de prolonger le moratoire de six mois en 2010 ;

- en ce qui concerne les aides au pluralisme, l'augmentation de l'aide en faveur des quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires, de 7,1 millions d'euros à 9,1 millions d'euros, va dans le bon sens mais demeure insuffisante. Il est capital de soutenir ces quelques journaux d'opinion, comme L'Humanité, qui suscitent peu l'intérêt des investisseurs privés ou des annonceurs mais qui sont pourtant indispensables au pluralisme effectif des courants d'expression ;

- se pose également la question de la reconnaissance juridique : donner une identité aux équipes rédactionnelles constituerait un rempart contre les concentrations et contre les rachats par des groupes extérieurs à la presse et permettrait de préserver l'indépendance rédactionnelle. Il serait également judicieux de réfléchir à la possibilité de créer un statut européen de société de médias à but non lucratif, avec une exonération de TVA à la clé ;

- en ce qui concerne les aides à la modernisation du secteur de la presse, l'augmentation du fonds d'aide au développement des services de presse en ligne ne constitue qu'une partie de la réponse. À la suite de l'adoption d'un statut d'éditeur de presse en ligne dans la loi « Hadopi I », il convient d'aller au bout de la logique de neutralité entre les supports de diffusion et de militer auprès des institutions communautaires en faveur d'un alignement du taux de TVA de la presse numérique non gratuite sur celui de la presse imprimée.

a indiqué qu'il s'était penché, dans la partie thématique de son rapport, sur les perspectives d'évolution statutaire de l'Agence France-Presse (AFP). Des auditions qu'il a menées dans ce cadre, il a tiré les enseignements suivants :

- la question d'une modernisation ou d'aménagements du statut n'est désormais plus taboue pour aucune des parties à la négociation, chacune étant consciente de ce que le statu quo intégral n'est plus possible. La direction estime notamment que le statut actuel ne permet plus à l'Agence de se développer dans des conditions optimales, dans un environnement de plus en plus concurrentiel, et qu'il entraîne une certaine insécurité juridique au regard du droit communautaire ;

- néanmoins, les bonnes performances de l'AFP dans la période récente démontrent que des considérations d'ordre purement financier ne sauraient, à elles seules, justifier une modification de son statut ;

- l'élaboration d'un projet d'évolution apparaît ainsi subordonnée au respect de deux exigences fondamentales suivantes.

En premier lieu, il est impératif de délimiter, de chiffrer et de contractualiser les missions d'intérêt général incombant à l'AFP (rayonnement international, francophonie, couverture géographique et linguistique exhaustive) afin d'en assurer le financement spécifique et pérenne par la puissance publique. L'AFP constitue en soi une forme de service public qui en fait un bien de la collectivité nationale. À ce titre, M. David Assouline, rapporteur pour avis, a souhaité que la commission, de la même façon qu'elle s'est battue pour garantir un financement pérenne de l'audiovisuel public, se montre vigilante s'agissant du financement des missions de service public assumées par l'AFP.

Ensuite, la gouvernance de la future Agence doit garantir son indépendance rédactionnelle. Or, le projet de gouvernance proposé par la direction ne parvient pas à lever les inquiétudes du personnel quant aux deux risques opposés d'étatisation ou de privatisation. En particulier, une fondation serait chargée de veiller à l'indépendance rédactionnelle de l'Agence et se verrait, à ce titre, dotée de la personnalité morale et de prérogatives puissantes telles qu'un droit de veto tant sur la désignation du PDG que sur les délibérations du conseil d'administration. La composition de cet organe, telle que proposée par la direction, se caractérise par un mécanisme de cooptation de ses personnalités qualifiées et n'accorde qu'une voix consultative au représentant de la rédaction.

a indiqué que l'ensemble de ces questions seraient débattues par les principaux protagonistes et les parlementaires à l'occasion d'une table ronde que la commission a pris l'initiative d'organiser dans les prochaines semaines.

En conclusion, au regard des multiples incertitudes qu'il a soulevées, M. David Assouline, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il était personnellement défavorable à l'adoption des crédits du programme « Presse » de la mission « Médias ».

Un débat a suivi l'intervention de l'orateur.

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