Le Gouvernement ne cherche certainement pas à dépecer Areva, mais à renforcer l'entreprise ; c'est le sens des 900 millions d'euros que nous mobilisons pour renforcer ses fonds propres, avec le soutien de l'Etat. La présidence doit être renouvelée, et Mme Lauvergeon fait évidemment partie des candidats en lice.
Pour avoir été le négociateur d'Iter, je sais que, si la France, en 1973, est parvenue à lancer un programme nucléaire exemplaire, avec 58 réacteurs, c'est grâce à la politique industrielle de l'État, qui a joué le rôle d'une véritable locomotive pour constituer une filière intégrée du nucléaire dont on ne trouve guère plus d'équivalent aujourd'hui qu'en Asie, dans des pays comme la Chine ou la Corée du Sud. Mais à mesure que notre filière nucléaire a perdu son caractère intégré, la concurrence est apparue au sein des différents segments de la filière, donc des intérêts divergents. On a vu alors les fabricants de centrales mettre en concurrence les fabricants de turbines, les distributeurs faire leur marché entre les producteurs. Pour être plus fort à l'international, il faut rééquilibrer les choses, c'est ce que cherche le Président de la République, en tirant les enseignements de l'échec d'Abu Dhabi.
Le marché international n'est pas homogène. D'un côté, on trouve les pays développés, auprès desquels l'offre française est adaptée en taille - l'EPR délivre 1650 mégawatts - et en sûreté, où nos réacteurs répondent aux normes les plus exigeantes, ce qui fait d'eux les réacteurs les plus sûrs du monde. N'oubliez pas qu'à l'origine l'EPR devait être européen. Ce marché est important, puisqu'il comprend le renouvellement de 103 réacteurs américains, des projets importants en Europe et en Asie. De l'autre côté, on trouve des pays en développement, qui recherchent des réacteurs moins puissants et des filières plus intégrées, de la production à la distribution. Il n'y a donc pas une seule offre à organiser, mais toute une gamme à proposer, ce qui exige de prendre les bonnes décisions.
Comment s'organiser sur le plan des capitaux ? C'est un vrai sujet, pour lequel nous devons prendre des décisions rapidement, car les choses avancent vite et les appels d'offres se multiplient. Les décisions relèvent du Conseil de politique nucléaire, que le Président de la République réunira prochainement.
Sur l'agroalimentaire, vous avez parfaitement raison et je ne suis pas resté les bras croisés. Il y a eu le classement par l'Unesco du repas gastronomique français et nous avons confié à votre collègue Mme Catherine Dumas, également co-présidente du Club de la table française, une mission pour dynamiser les arts de la table. De fait, nous sommes passés en quelques années de 9 % à 6 % du marché mondial de l'agroalimentaire et les Allemands nous sont passés devant, avec 7 %. Nous devons mieux communiquer, mobiliser tout notre réseau commercial international pour mettre en oeuvre une stratégie commerciale ciblée. Nous terminons une campagne de promotion que nous allons offrir aux industriels, pour renforcer leur communication. Cette année, pas moins de 170 salons internationaux liés à l'agroalimentaire vont se tenir, les produits français doivent s'y vendre davantage ! Cette campagne de communication multi supports est déjà très appréciée et je la prendrai dans mes bagages pour le salon de Tokyo, début mars. Notre cuisine gastronomique est appréciée dans le monde entier, mais nous devons aussi mieux vendre nos produits du terroir les plus courants, comme y réussissent les Italiens et les Espagnols, qui sont aussi parvenus à diffuser l'idée que notre cuisine était élitiste, et la leur plus accessible. Nous devons faire un effort pour que notre grande distribution diffuse davantage nos produits à l'international - je rêve de les voir en tête de gondole chez Carrefour à Shanghai ou à Moscou - merci de nous y aider, car vous avez tous votre rôle à jouer !