Intervention de Nicolas About

Commission des affaires sociales — Réunion du 16 janvier 2008 : 1ère réunion
Pouvoir d'achat — Examen du rapport

Photo de Nicolas AboutNicolas About, rapporteur :

a d'abord souligné que, depuis 2002, la croissance du pouvoir d'achat des ménages a été modérée, de l'ordre d'1,9 % par an en moyenne, à comparer au rythme de progression moyen de 5,7 % par an au cours de la période 1960-1974. Ces données agrégées ne reflètent toutefois pas parfaitement la situation concrète de chaque ménage au sein des différentes catégories sociales. Le conseil d'analyse économique a d'ailleurs annoncé pour la première quinzaine du mois de février un rapport approfondi sur la mesure du pouvoir d'achat dans notre pays.

La question de la relance du pouvoir d'achat et des moyens d'y parvenir a été au coeur de la campagne présidentielle de 2007. La majorité sortie des urnes considère que cette relance, pour être durable, ne peut résulter que d'un surcroît de travail et d'investissement. La loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (Tepa) de l'été dernier a marqué une première étape décisive pour garantir un gain accru de pouvoir d'achat aux salariés travaillant davantage. Les premières données statistiques montrent que 40 % des entreprises de plus de dix salariés ont eu recours au dispositif de la loi Tepa dès son premier mois d'application. 20 millions d'heures supplémentaires correspondant à environ 250 millions d'euros de rémunération ont ainsi bénéficié d'exonérations fiscales et sociales. A la fin de l'année 2007, le Président de la République a décidé de donner une nouvelle impulsion à cette politique en annonçant un ensemble de mesures plus conjoncturelles en faveur du pouvoir d'achat. Celles-ci trouvent leur traduction législative dans le présent projet de loi.

Ces mesures s'organisent autour de trois axes principaux : la possibilité offerte au salarié de demander à son employeur le rachat de jours de réduction du temps de travail (RTT), une mesure de déblocage anticipée de la participation, enfin deux dispositifs destinés à contenir la hausse des loyers dans le parc privé et à faciliter l'accès à la location.

La possibilité de racheter des jours de RTT ou des droits accumulés sur un compte épargne-temps sera possible dans toutes les entreprises quels que soient leurs effectifs, dès lors qu'il y aura accord du salarié et du chef d'entreprise. Ces jours seront payés à un taux majoré qui devra être négocié par les partenaires sociaux et ne pourra être inférieur à 10 %. Cette mesure concernera les jours non pris par les salariés à la date du 31 décembre 2007 mais aussi, à l'initiative de l'Assemblée nationale, ceux que les salariés obtiendront au cours du premier semestre 2008. Le rachat des jours de RTT non pris en 2007 sera exonéré de charges sociales, à l'exception de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS). Pour les jours acquis au titre de 2008, c'est le régime d'exonération prévu par la loi Tepa, moins avantageux pour l'employeur, mais plus avantageux pour le salarié, qui s'appliquera. L'Assemblée nationale a supprimé toute restriction au nombre de jours pouvant être rachetés afin de donner plein effet au dispositif.

Elle a également adopté deux articles additionnels, le premier pour rendre obligatoire dans les entreprises la mise en place d'un dispositif de garantie de la part des droits accumulés par les salariés dans un compte épargne-temps non couverte par l'assurance pour la garantie des salaires, le deuxième pour permettre la conversion d'un repos compensateur de remplacement en une majoration salariale.

a ensuite présenté la deuxième mesure phare du projet de loi qui consiste à autoriser le déblocage anticipé, à la demande du salarié, de la participation, alors que celle-ci reste normalement indisponible pendant cinq ans. Le projet de loi apporte toutefois trois restrictions à cette possibilité. Tout d'abord, dans le cas des accords de participation plus avantageux pour le salarié que le régime légal, le déblocage est subordonné à la conclusion d'un accord d'entreprise ou à défaut à la décision unilatérale de l'employeur. Ensuite, si les fonds de la participation sont investis dans l'entreprise, il est proposé de subordonner le déblocage à la conclusion d'un accord collectif. Enfin, il ne sera pas possible de disposer des sommes issues de la participation placées dans les plans d'épargne pour la retraite collectifs (Perco). Les sommes débloquées ne pourront excéder 10 000 euros et bénéficieront du régime fiscal et social de la participation, c'est-à-dire une exonération d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS. Cette mesure, de nature ponctuelle, paraît entourée de suffisamment de garanties pour éviter qu'elle ne porte préjudice au développement de la participation. Celui-ci devrait d'ailleurs faire l'objet d'une réforme plus ambitieuse au cours des prochains mois.

Pour les entreprises non couvertes par un accord de participation, le projet de loi prévoit la possibilité du versement d'une prime exceptionnelle d'un montant maximum de 1 000 euros par salarié. Cette prime pourra être modulée selon les salariés en fonction de critères objectifs définis dans un accord. Elle ne pourra en aucun cas se substituer à des éléments de rémunération ou à des augmentations de rémunération décidées dans le cadre de conventions ou d'accords de branches. Elle ne bénéficiera pas d'exonérations fiscales, mais d'une exonération de charges sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS. L'exonération de charges sociales ne sera pas compensée à la sécurité sociale.

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale est par ailleurs une nouvelle fois revenue sur la question de l'exonération de la redevance audiovisuelle pour les personnes âgées disposant de faibles revenus. Pour 2008, cette exonération, qui devait être de 50 %, sera reconduite à 100 %. Le Gouvernement devra néanmoins remettre un rapport au Parlement sur cette question avant le 15 octobre prochain.

Puis M. Nicolas About, rapporteur, a présenté le volet logement du texte. Le projet de loi prévoit deux mesures destinées à dégager du pouvoir d'achat pour les locataires résidant dans le parc privé, c'est-à-dire environ 60 % des locataires : l'indexation des loyers sur l'indice des prix à la consommation au lieu de l'indice composite actuel, qui progresse plus vite que l'inflation ; la fixation à un mois de loyer, au lieu de deux, du montant maximum du dépôt de garantie qui peut être exigé du locataire par le bailleur.

Enfin, l'examen de ce projet de loi sur le pouvoir d'achat fournit l'occasion d'analyser la proposition de loi n° 116 (2007-2008) de M. Jean-Pierre Bel et des membres du groupe socialiste et apparentés en faveur du pouvoir d'achat, déposée sur le même sujet par le groupe socialiste. Si les objectifs de ces deux textes sont communs, les solutions avancées par la proposition de loi n'emportent pas la conviction.

En premier lieu, plusieurs mesures sont d'ores et déjà satisfaites par le projet de loi ou par d'autres dispositions législatives en cours d'adoption : par exemple la limitation à un mois de loyer du dépôt de garantie, l'exonération de redevance audiovisuelle pour les personnes âgées ayant un faible revenu ou le retour aux tarifs réglementés d'électricité et de gaz. Certaines dispositions, comme la conditionnalité des allégements de charges, font actuellement l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux, ce qui rend prématuré de légiférer dès à présent sur ce sujet. D'autres paraissent difficiles à mettre en oeuvre à court terme, notamment parce qu'elles supposent qu'un accord soit trouvé au niveau communautaire : tel est le cas des propositions formulées en matière de TVA. Certaines dispositions sont par ailleurs clairement contraires aux choix effectués par la majorité, par exemple, la proposition de supprimer les franchises médicales, le blocage des loyers pendant un an ou encore le rétablissement du mécanisme de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) « flottante », supprimée en 2002. Certaines mesures n'ont pas de lien direct avec la question du pouvoir d'achat : par exemple l'introduction en droit français du recours collectif ou le relèvement du plafond du livret A. Enfin, les dispositions proposées pour financer la proposition de loi du groupe socialiste - la taxation des compagnies pétrolières et des entreprises de transport aérien ainsi que l'abrogation de la loi Tepa - ne peuvent évidemment emporter l'adhésion.

En conclusion, M. Nicolas About, rapporteur, a proposé le rejet de la proposition de loi du groupe socialiste et l'approbation du projet de loi déposé par le Gouvernement sous réserve de l'adoption des amendements qu'il présente.

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