Enfin, la commission a procédé à l'audition de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, sur le bilan de la discussion budgétaire au format LOLF et ses perspectives.
Ouvrant son propos sur le rappel de la situation préoccupante des déficits publics, parfaitement analysée par le rapport de la mission Pébereau, récemment présenté par son président lors d'une audition commune aux commissions des finances et des affaires économiques du Sénat, ainsi que son caractère anxiogène pour nos concitoyens, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a estimé que la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) constituait un instrument de lucidité et de responsabilité pour sortir du temps de la dette publique et mettre efficacement en oeuvre la réforme de l'Etat. Rappelant que le budget pour 2006 avait été le premier exercice d'application de la LOLF, il s'est réjoui d'être aujourd'hui invité à venir en tirer un premier bilan devant ses collègues de la commission des affaires économiques, un an après leur avoir exposé les nouveaux mécanismes d'examen du projet de loi de finances initiale (PLFI), et à leur soumettre quelques propositions pour en améliorer encore la discussion.
Il a ajouté que, si la discussion du PLFI, qui dure vingt jours, était évidemment importante, l'examen du projet de loi de règlement (PLR) ne devrait pas l'être moins, puisque cette loi constitue la « loi de vérité ». Or, observant que cet examen était jusqu'à présent réduit à deux ou trois heures de débats bâclés au cours desquels le ministre du budget se contentait de demander au Parlement un quitus pour avoir effectué une régulation budgétaire sans dépasser les limites qu'il lui avait fixées, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a indiqué que la LOLF visait aussi à transformer ce rendez-vous pour lui donner enfin le rôle essentiel qui doit être le sien, notamment par l'organisation de débats avec les ministres gestionnaires sur l'utilisation de leurs crédits.
Il a ensuite souligné que tous les sénateurs avaient « joué le jeu » de la LOLF, par une concertation approfondie en amont de la discussion du PLFI au sein tant de la commission qu'il préside que du Sénat tout entier, via les commissions permanentes, et en particulier la commission des affaires économiques.
Puis s'agissant des nouvelles modalités d'examen du PLFI, après avoir observé que, l'an dernier, les débats avaient été rendus plus difficiles à gérer dans le délai de vingt jours imparti par la Constitution en raison de la poursuite, pendant une partie de cette période, de l'examen du projet de loi portant engagement national pour le logement, il a indiqué que la commission des finances proposait qu'à l'avenir, la conférence des Présidents inscrive exclusivement à l'ordre du jour du Sénat le seul PLFI durant la période constitutionnelle des vingt jours. Par ailleurs, soulignant qu'aux deux débats thématiques traditionnels relatifs aux contributions de l'Etat aux collectivités territoriales d'une part, au budget de l'Union européenne d'autre part, étaient désormais ajoutés deux autres débats thématiques portant l'un sur le plafond des emplois, l'autre sur la variation de la dette, il s'est déclaré convaincu de l'opportunité de mener une réflexion sur le nombre et l'organisation de ces débats, qui visent à traiter en toute clarté une question particulière. A cet égard, estimant difficile de bien examiner un sujet aussi important et complexe que celui des dotations aux collectivités territoriales en une seule après-midi, au cours de la discussion de la première partie du PLFI, il s'est interrogé sur l'intérêt qu'il y aurait à placer ce débat, visant à fixer les grandes orientations décidées par le Parlement en la matière, bien en amont de la discussion du PLFI, par exemple lors du débat d'orientation budgétaire (DOB) organisé à la fin du printemps. A ce sujet, il a informé ses collègues des grandes difficultés qu'il rencontrait dans son projet de constituer une base de données recensant l'ensemble des dotations versées par l'Etat aux collectivités territoriales, cette difficulté lui semblant démontrer que l'accumulation de dispositions très complexes depuis de nombreuses années conduisait en définitive à rendre incompréhensible la politique menée dans ce domaine.
Poursuivant son analyse des nouvelles modalités d'examen du PLFI, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, s'est félicité de la diminution du temps consacré aux discussions générales sur les crédits des ministères, discussions qui, pour intéressantes qu'elles puissent être, ne lui paraissent guère efficientes dans le cadre de l'examen d'une loi de finances, et de l'augmentation en conséquence du temps dévolu à la discussion des amendements. Observant que cette évolution correspondait aux préconisations des deux « pères » de la LOLF, MM. Alain Lambert et Didier Migaud, et qu'elle répondait ainsi à un voeu supra-partisan, il a souhaité qu'elle se poursuive et s'approfondisse afin que les parlementaires débattent davantage de sujets concrets relatifs à la mise en oeuvre des missions, des programmes et des actions budgétaires. En outre, relevant que la pagination des rapports écrits des rapporteurs spéciaux de la commission des finances avait été réduite l'an dernier afin de substituer à la rhétorique traditionnelle un contenu plus incisif portant sur des points ciblés éclairés par des indicateurs et des chiffres, il a indiqué que l'objectif qu'il s'était fixé avec ses collègues pour le prochain PLFI serait de réduire globalement cette pagination de 20 % supplémentaires.
Puis M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a estimé que la LOLF avait permis des avancées dans quatre domaines qu'il lui semblait opportun de renforcer et de prolonger.
S'agissant des amendements, il a souligné l'émergence d'un véritable pouvoir d'arbitrage parlementaire en relevant qu'alors que le nombre d'amendements déposés en première délibération en 2004 (pour le budget 2005) s'était élevé à 12, il avait atteint 85 l'an dernier (pour le budget 2006), dont 44 avaient été adoptés par le Sénat. Il a exprimé le souhait que cette évolution se confirme à l'avenir, même si le bilan quantitatif définitif, après les deux redoutables épreuves que constituent la seconde délibération et le passage en commission mixte paritaire (CMP), s'avérait plus modeste, comme en témoignaient les statistiques suivantes :
- sur les 14 amendements d'origine sénatoriale, portant sur 700 millions d'euros, adoptés sur les crédits des missions du budget général en première délibération, 12, portant sur 400 millions d'euros, ont été confirmés à l'issue de la seconde délibération, et 8, portant sur 30 millions d'euros seulement, définitivement retenus par la CMP ;
- le seul programme définitivement créé après l'accord de la CMP, intitulé « Audiovisuel extérieur », a résulté d'une initiative gouvernementale ;
- 112 emplois seulement ont été supprimés par le Sénat dans le cadre de la discussion du plafond des emplois.
Puis après avoir donné divers exemples de la manière opportune dont la commission des affaires économiques avait utilisé les nouveaux outils mis par la LOLF à la disposition des rapporteurs pour avis pour permettre aux commissions d'exercer leur arbitrage, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a soumis à ses collègues une série de propositions, approuvée par le Bureau de la commission qu'il préside, destinée à améliorer les procédures d'organisation du débat budgétaire et, ce faisant, à rendre plus crédibles les amendements des parlementaires :
- inclure les crédits des programmes dans l'Etat B afin de faciliter l'exercice du droit d'amendement ;
- examiner en commission des finances les crédits des missions à une date postérieure à leur adoption en séance publique par l'Assemblée nationale ;
- accroître, d'au moins 24 heures, le délai entre la fin de la première lecture et la réunion de la CMP, qui était jusqu'à présent de moins de 36 heures ;
- mieux délimiter les domaines respectifs des lois (lois de finances, lois de financement de la sécurité sociale, lois ordinaires).