Puis la commission a examiné le rapport de M. Robert del Picchia sur le projet de loi n° 204 (2007-2008), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion des nouveaux Etats membres de l'Union européenne à la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles, ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980, ainsi qu'aux premier et deuxième protocoles concernant son interprétation par la Cour de justice des Communautés européennes.
a indiqué que la convention de Luxembourg du 14 avril 2005 vise à étendre aux dix nouveaux Etats membres ayant adhéré à l'Union européenne le 1er mai 2004 les stipulations de la convention de Rome du 19 juin 1980 relative à la loi applicable aux obligations contractuelles, ainsi que celles de deux protocoles annexés à cette convention.
L'augmentation des échanges et des déplacements à l'intérieur des frontières de l'Union européenne accroît l'éventualité qu'un citoyen européen ou une entreprise soient impliqués dans un litige dont tous les éléments ne sont pas cantonnés à l'intérieur de l'Etat de sa résidence habituelle, a souligné M. Robert del Picchia, rapporteur. Or les parties sont souvent découragées de faire valoir leurs droits dans un pays étranger en raison de l'incompatibilité ou de la complexité des systèmes juridiques et administratifs nationaux. Ceci vaut tout particulièrement pour les citoyens ou les PME, qui ne disposent pas des moyens financiers pour s'assurer les services d'un réseau international de juristes.
a cité l'exemple d'un ressortissant grec vivant en France ayant acheté sur catalogue ou par Internet un appareil électronique fabriqué en Allemagne auprès d'un distributeur italien et qui voudrait poursuivre le fabricant en justice parce que l'appareil présenterait un grave défaut. Cet exemple révèle que le marché intérieur, permettant la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux, doit nécessairement s'accompagner d'un espace judiciaire européen dans lequel chaque citoyen puisse faire valoir ses droits aussi bien dans un autre Etat membre que dans son propre Etat, a fait remarquer M. Robert del Picchia, rapporteur, en soulignant que cette nécessité s'imposait en particulier pour les Français établis hors de France.
La convention de Rome, adoptée en 1980, sur une base intergouvernementale, entre les neuf Etats membres de la Communauté économique européenne, a pour objet d'instaurer, entre les Etats parties, des règles leur permettant de déterminer, de manière uniforme, la loi applicable aux obligations contractuelles dans les situations comportant un conflit de lois. Elle est entrée en vigueur le 1er avril 1991. Les règles prévues par la convention sont applicables dans les situations transfrontalières, c'est-à-dire lorsque les parties au contrat sont de nationalités différentes ou sont domiciliées dans des Etats différents, ou encore lorsque le contrat est conclu ou exécuté dans plusieurs pays. La convention ne s'applique cependant pas aux contrats relatifs à l'état des personnes, tels que notamment, les testaments, les successions et les contrats de mariage.
Le rapporteur a rappelé que la clé de voûte du système mis en place par la convention de Rome repose sur l'autonomie de la volonté des parties. En application de ce principe, celles-ci sont libres de choisir la loi applicable à leur contrat. Leur liberté de choix peut toutefois être limitée pour des raisons liées à l'ordre public. À défaut de choix de loi par les parties, la convention de Rome prévoit que le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits, selon le principe de proximité.
La convention de Rome comporte toutefois des règles spécifiques en faveur des parties dites faibles, telles que les consommateurs ou les travailleurs, qui conduisent à déroger au principe d'autonomie des parties. Dans ces cas, la loi choisie ne peut désavantager le consommateur et le priver de la protection fournie par la loi de son pays de résidence, si elle lui est plus favorable.
La convention de Rome ne concernait initialement que les neuf Etats membres de la Communauté européenne à la date de la signature de la convention, a rappelé M. Robert del Picchia, rapporteur. Par la suite, celle-ci a été progressivement étendue aux autres Etats membres de l'Union, au fur et à mesure de leur adhésion à l'Union européenne. Les règles fixées par la convention, sont, en effet, considérées comme partie intégrante de l'acquis communautaire et, à ce titre, l'adhésion des nouveaux entrants à cette convention relève pour eux des engagements découlant de leur entrée dans l'Union européenne.
Il a toutefois indiqué que, depuis l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne, le 1er janvier 2007 une procédure simplifiée a été introduite dans l'acte d'adhésion, qui permet d'éviter une procédure de ratification dans vingt sept Etats membres. Selon cette procédure, l'adhésion à l'Union européenne entraîne, sous réserve de quelques adaptations, l'adhésion aux conventions conclues entre les Etats de l'Union.
Par ailleurs, depuis que le traité d'Amsterdam a transféré la coopération judiciaire civile du troisième au premier pilier communautaire, un processus de transformation de la convention de Rome en instrument communautaire a été engagé, a indiqué M. Robert del Picchia, rapporteur. Cette « communautarisation » s'inscrit dans la perspective de la création d'un véritable espace judiciaire européen, lancé par le Conseil européen de Tampere en 1999.
La Commission européenne a ainsi proposé, en décembre 2005, de remplacer la convention de Rome par un règlement communautaire. A la différence d'une convention internationale, le règlement communautaire ne nécessite pas d'être ratifié par tous les Etats parties, il ne peut faire l'objet de réserves, il est d'application directe et surtout, il permet de garantir l'unité d'interprétation de la jurisprudence, grâce au contrôle exercé par la Cour de justice des Communautés européennes.
Après de difficiles négociations, le règlement communautaire, dit « Rome I », a été adopté par le Conseil « Justice et Affaires intérieures » des 5 et 6 juin dernier.
Ce nouvel instrument ne sera toutefois pas applicable à un, voire à deux Etats membres : il s'agit, d'une part, du Danemark, qui ne participe pas aux mesures relevant des matières du « premier pilier » dans le cadre de l'espace de liberté, de sécurité et de justice et d'autre part, du Royaume-Uni, qui peut participer, au cas par cas, aux mesures prises dans ces domaines et qui n'a pas encore notifié son souhait de participer à ce règlement.
En conséquence, les relations entre le Royaume-Uni et le Danemark et les autres Etats membres resteront régies par la convention de Rome, y compris après l'entrée en vigueur du règlement communautaire, qui remplacera la convention pour les relations entre les vingt-cinq autres Etats membres, a indiqué M. Robert del Picchia, rapporteur.
La complexité juridique de la situation du Danemark a d'ailleurs incité les autorités de ce pays à organiser un référendum pour mettre un terme aux dérogations dont ce pays bénéficie depuis le premier « non » danois au référendum sur le traité de Maastricht, mais à la suite du référendum négatif irlandais sur le traité de Lisbonne, le Gouvernement danois a décidé de reporter d'une année l'organisation de cette consultation.
Ainsi, même si le règlement « Rome I » doit entrer prochainement en vigueur, la ratification de la convention de Luxembourg reste nécessaire, car la convention de Rome continuera de régir les relations avec le Danemark et peut-être le Royaume-Uni.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission a alors adopté le projet de loi et proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance publique.