Selon moi, l’adhésion d’un tel pays, aussi grand et aussi puissant, risque de déséquilibrer la totalité de la construction européenne. Il faut donc bien réfléchir à notre vote et laisser la procédure de négociation qui a été ouverte se dérouler tout à fait normalement.
Je voterai donc ces amendements identiques, et ce pour trois raisons.
Premièrement, je suis conscient des dégâts économiques et financiers qu’a entraînés la position adoptée par nos collègues de l’Assemblée nationale pour nos entreprises et, donc, pour l’emploi de notre pays, pour notre balance commerciale et pour notre balance des services.
À mon sens, en matière de relations internationales, toute décision prise quelque peu brutalement provoque des conséquences très importantes. Dans cette affaire, l’Assemblée nationale a commis une erreur, et nous allons mettre des années pour la rattraper.
Deuxièmement, à l’article 3 bis du projet de loi constitutionnelle, c’est bien un référendum d’initiative parlementaire, appuyé par une pétition populaire, que nous avons instauré. Or, le cas échéant, il pourra toujours être invoqué.
Troisièmement, dans cette affaire, au regard de l’évolution du monde actuel et dans le cadre du projet d’Union pour la Méditerranée que le Président de la République va tenter de lancer solennellement le mois prochain, il y a tellement d’inconnues et de difficultés qu’il serait absurde, aujourd’hui, d’adopter une disposition discriminatoire contre l’un de nos grands pays partenaires.
C’est la raison pour laquelle il faut nous garder de tout amalgame entre l’adhésion de la Turquie et la réforme constitutionnelle. C’est le point sur lequel nous risquons le plus d’être attaqués. Dans notre tâche de constituant, nous devons expliquer que nous entendons rester au-dessus des problèmes catégoriels ou particuliers de tel ou tel pays, en respectant la faculté laissée au Président de la République de choisir entre le référendum ou le passage devant le Parlement. Nous devons mettre en avant l’article 3 bis, qui crée véritablement une possibilité supplémentaire. Nous devons montrer que, dans cette affaire, ce sont les intérêts de notre pays et ceux de la construction européenne que nous essayons de préserver, et pas autre chose !