Notre commission est saisie pour avis de trente-six des deux cents articles de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture le 2 décembre 2009. Les amendements que nous examinerons portent sur le texte adopté par les députés ; je les présenterai demain matin à la commission des lois afin qu'elle les intègre, le cas échéant, dans le texte qui sera discuté en séance publique.
Ce texte de simplification du droit est le cinquième depuis 2003 ; dans le même temps, des mesures ont également été prises par ordonnance. Notre commission a toujours soutenu cette démarche car il est indispensable d'élaguer les textes confus ou obsolètes, d'alléger les procédures et les formalités, de rendre la loi plus lisible et plus accessible.
Mais clarté, concision et rigueur doivent prévaloir dès la rédaction des projets et propositions de loi, y compris ceux de simplification du droit ! Il faut laisser au travail parlementaire le temps nécessaire à son déroulement serein et éviter la multiplication des habilitations législatives conclues par une ratification expéditive des ordonnances - leur rédaction se ressent de l'absence d'intervention du Parlement.
Une autre évolution me semble un peu inquiétante s'agissant des textes de simplification du droit. La précédente proposition comportait quatre-vingt-dix articles après passage à l'Assemblée nationale. La présente en compte deux cents, qui n'ont pas tous un rapport évident avec la simplification du droit et qui, pour certains, figurent simultanément dans d'autres textes.
Ne tombons pas dans le travers de textes « omnibus » ou « portant diverses dispositions ». Je crois du reste que ce souci est partagé par toutes les commissions saisies. Je vous proposerai donc de supprimer des dispositions redondantes : celles relatives à la transposition de la directive « services », par exemple, ont été reprises dans le projet de loi d'adaptation au droit européen en matière de santé, de travail et de communications électroniques, déposé à l'Assemblée nationale.
J'en viens au fond.
Dans le domaine des aides aux handicapés, tout d'abord, diverses mesures de simplification sont proposées - toutes ne sont pas bien inspirées, nous le verrons.
Au titre de la lutte contre l'exclusion, une mesure tend à mieux prendre en compte les conjoints des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) dans le calcul de l'allocation mais rien n'est prévu pour compenser aux départements les dépenses qui en résulteront.
En ce qui concerne le droit du travail, la proposition apporte plusieurs modifications : les employeurs étrangers qui emploient un salarié en France sans être établis sur notre territoire auront désormais le droit d'utiliser le chèque emploi service universel ou le titre emploi service entreprise ; le droit commun des congés payés sera appliqué aux salariés rémunérés avec le chèque emploi associatif ; les règles de tenue de compte pour les petits syndicats seront simplifiées ; les personnes morales de droit public donneurs d'ordre pourront appliquer des pénalités à une entreprise avec laquelle elles ont passé contrat, si elles sont informées par les services de contrôle que cette dernière a commis l'infraction de travail dissimulé, ces pénalités étant cumulables avec une amende infligée par le tribunal correctionnel, dans la limite du montant maximal prévu.
Dans le domaine de la santé publique, les mesures touchent d'abord le champ d'action de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) et le montant du droit qu'elle perçoit sur les demandes d'autorisation de mise sur le marché - le Gouvernement, malheureusement, ne semblant pas favorable à un relèvement. Les mesures concernent aussi le traitement des demandes d'ouverture d'établissements pharmaceutiques de gros par les associations et organismes à but non lucratif et à vocation humanitaire ou encore le renouvellement par les pharmaciens des prescriptions de certains médicaments destinés aux malades chroniques ou de contraceptifs oraux, la répression de l'usurpation de la qualité de pharmacien ; à quoi s'ajoutent diverses modifications, d'intérêt inégal, de dispositions pénales du code de la santé publique et la simplification des conditions de recours aux salariés et agents publics membres de la réserve sanitaire.
La proposition prévoit la suppression de certaines dispositions au motif que les décrets d'application ne sont pas parus. Il s'agirait d'inciter le pouvoir réglementaire à agir. L'efficacité de la méthode me paraît discutable ! Le texte comprend notamment l'abrogation d'un article de la loi de confiance dans l'économie numérique de 2004, relatif à la mise en place de numéros d'appel gratuit de certains services sociaux, y compris à partir de portables. Je vous proposerai de refuser cette abrogation, particulièrement inopportune au moment où le Gouvernement envisage l'application de ce texte.
Au total, sur plus de trente articles, le bilan des apports de ce texte est un peu léger. Cette cinquième loi de simplification du droit ne me semble pas être un « grand millésime ». Efforçons-nous au moins qu'elle ne ressemble pas trop à une « loi omnibus » ou à une « loi portant diverses dispositions » car celles-ci, nous le savons bien, n'ont jamais amélioré la qualité du droit.