Intervention de Hugues Portelli

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 20 octobre 2010 : 1ère réunion
Sondages en matière électorale — Examen du rapport d'information

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, co-rapporteur :

L'Ifop, aujourd'hui dirigé par Laurence Parisot, a une longue histoire. Fondé en 1938, l'institut a produit les premiers sondages... sur les accords de Munich. Il en ressortait qu'une majorité de Français se déclarait favorable à leur signature... L'institut a vécu dans un certain anonymat jusqu'en 1965, date à laquelle Pierre Lazareff lui a commandé un sondage sur les intentions de vote au premier tour aux élections présidentielles, qui, concluant à un score de 43,5 % pour le général de Gaulle, fut publié, dans la deuxième édition de France Soir, aux côtés d'une autre enquête, effectuée par les renseignements généraux, qui pronostiquaient un score de 55 % des voix. L'histoire retiendra que le pronostic de l'Ifop s'est révélé exact, à la virgule près.

Tous les instituts créés depuis descendent un peu de l'Ifop, qui a formé toute une génération de sondeurs que l'on retrouve à l'origine de la Sofres, de CSA, de Louis Harris France, de BVA, auxquels se sont ajoutés ensuite Opinion way, Viavoice, LH2... Les cabinets de conseil sont eux-mêmes dans les mains d'anciens directeurs d'instituts de sondages, comme Pierre Giacometti. Nous avons donc affaire à un milieu assez homogène, qui s'est montré cependant ouvert à la discussion.

Nos débats ont porté sur la façon dont les sondages sont conduits, ce qui nous a amenés à poser la question de la fiabilité des sondages par quotas. M. Sueur, issu d'une longue lignée de forts en maths, a su creuser la question, cruciale eu égard à l'impact sur la réception du sondage, de la marge d'erreur dans les sondages par quotas... dont tous les instituts affirment qu'elle n'est pas calculable. Il vous exposera ce qu'il faut en penser.

Autre question cruciale, celle de la mécanique par laquelle un sondage est élaboré. Il n'est pas anodin de déterminer qui fait quoi, entre celui qui paye, celui qui commande, celui qui diffuse, sachant qu'il existe aussi aujourd'hui beaucoup de sondages dits « omnibus », regroupant les questions de plusieurs commanditaires, car la presse écrite et les diffuseurs en général n'ont plus les moyens de s'offrir seuls un sondage. Surgit du même coup la question du sponsoring... et l'on sait que les estimations électorales sont toutes sponsorisées : la question est donc de savoir qui paye...

Sur le périmètre concerné, nous émettons plusieurs recommandations. La première est de ne plus s'en tenir, dans la loi, aux seuls sondages électoraux, mais bien de viser tous les sondages politiques, la distinction entre les uns et les autres n'étant plus guère pertinente. De fait, on voit lancer, dès les lendemains d'élections présidentielles, des sondages sur les élections suivantes. Et sous quel registre ranger les sondages qui s'interrogent sur la popularité d'une personnalité ? Bref, tous les sondages politiques sont, de près ou de loin, liés aux élections. Ils ont toujours une conséquence électorale.

La deuxième tend à permettre à la Commission des sondages de travailler dans les meilleures conditions, grâce à une plus grande transparence dans l'élaboration et la publication des sondages. Qui paye ? Qui publie ? Quelle est la marge d'erreur ? J'avoue que sur ce dernier point, nous nous sommes heurtés à la résistance des instituts, qui n'aiment guère « que l'on entre dans leurs cuisines ». A croire que si les voies d'élaboration des sondages sont scientifiques, dès lors que l'on aborde la question de la méthode des redressements... on entre dans l'assaisonnement.

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