a rappelé que la mission du médiateur le plaçait à un point d'observation privilégié des attentes des citoyens à l'égard de l'administration, dont il pouvait ainsi contribuer à réparer les dysfonctionnements. Il a souligné qu'au-delà des contacts que les parlementaires entretenaient avec le médiateur lors de sa saisine, les relations entre celui-ci et le Parlement avaient été institutionnalisées. Ainsi chaque année, a-t-il relevé, depuis la loi du 12 avril 2000, le rapport annuel du médiateur faisait l'objet d'une communication devant chacune des deux assemblées. Il a indiqué qu'il lui était toutefois apparu nécessaire de favoriser un échange plus approfondi avec la commission des lois et les sénateurs des autres commissions sur l'activité du médiateur et ses propositions de réforme, dans le cadre d'une réunion postérieure à la remise du rapport annuel. Il a noté en effet que plusieurs de ses propositions de réforme devaient emprunter la voie législative. Il a rappelé que l'Office parlementaire d'évaluation de la législation conduisait par ailleurs, sous la responsabilité de M. Patrice Gélard, un bilan des autorités administratives indépendantes, dont les conclusions seraient présentées prochainement.
M. Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, s'est d'abord félicité de l'initiative prise par la commission des lois d'organiser un véritable échange autour de son rapport. Il a précisé que le médiateur était une autorité indépendante et non une autorité administrative indépendante et, qu'à ce titre, il formulait des recommandations qui n'étaient pas susceptibles de recours devant les juridictions. Il a estimé que le médiateur apparaissait plus comme acteur de l'équité que comme acteur du droit. Il a rappelé que le médiateur disposait d'un large éventail d'initiatives : solliciter des autorités publiques l'élaboration d'études et d'enquêtes, procéder à des inspections, formuler des recommandations en équité ainsi que des injonctions, proposer des réformes ou des sanctions.
Le Médiateur de la République a mentionné parmi ses priorités le souci de l'efficacité qui passait par une plus grande réactivité avec un délai de réponse aux réclamations compris entre 3 jours et 3 semaines. Il a également rappelé l'importance qu'il attachait à la transparence de l'institution, aux réformes qu'elle pouvait promouvoir et enfin à la défense des droits de l'homme. Il a indiqué que sur les 59.974 affaires reçues par le médiateur en 2005, 53.529 avaient été traitées par ses délégués locaux -principalement en saisine directe- et 6.445 au niveau national -46 % en saisine directe et 54 % sur saisine par les parlementaires. Il a observé que certaines réclamations tendaient à instrumentaliser l'institution au bénéfice d'intérêts individuels par exemple en demandant à l'administration d'adapter les textes à un cas particulier.
M. Jean-Paul Delevoye a relevé que le médiateur disposait de 277 délégués répartis sur l'ensemble du territoire national, dont une partie de l'activité était principalement consacrée à l'information des citoyens. Il a souligné les différentes initiatives prises pour renforcer cette présence à travers la création d'une cellule d'urgence, le développement du réseau des délégués dans les zones sensibles, la poursuite de l'installation des délégués dans les établissements pénitentiaires, ainsi que la mise en place de la « médiation directe », destinée à accélérer le traitement des dossiers. Il a également mentionné son souci d'appliquer l'article 64 de la loi du 11 février 2005 relative aux personnes souffrant d'un handicap qui définit les compétences du médiateur en matière de règlement amiable des litiges pouvant survenir entre une personne handicapée, à propos de la mise en oeuvre de ses droits, et un service public.
Le Médiateur de la République a plus particulièrement insisté sur l'expérimentation, issue d'une convention signée le 16 mars 2005 avec le garde des sceaux, de délégués tenant une permanence dans dix établissements pénitentiaires. Il a estimé que cette démarche portait d'ores et déjà ses fruits, en notant par exemple une baisse des faits de violence de près de moitié aux Baumettes, à l'annonce de l'installation du délégué. Il a relevé par ailleurs que 32 % seulement des dossiers traités par ces délégués concernaient l'administration pénitentiaire, les autres réclamations concernant des administrations extérieures. A cet égard, il a souligné que la privation de liberté ne devait pas s'accompagner de celle de l'accès au droit.
M. Jean-Paul Delevoye a indiqué son souhait de renforcer les relations du médiateur avec ses interlocuteurs. Il a cité ainsi la signature d'accords de partenariat avec la Caisse d'assurances maladie et l'Unedic, relevant que des protocoles similaires seraient également conclus avec la Caisse nationale d'allocations familiales ainsi que les auxiliaires de justice (avocats, notaires). Il a rappelé en outre les relations qu'entretenait le médiateur avec les acteurs de la société civile, qu'il s'agisse des associations ou des syndicats, de même qu'avec les médiateurs internationaux. Il a expliqué que la médiature conduisait par ailleurs des actions en matière de recherche et développement à travers les liens noués avec les universités et les écoles et avec les juridictions européennes (Cour de justice des communautés européennes et Cour européenne des droits de l'homme).
Evoquant les enseignements que l'on pouvait tirer des réclamations individuelles, M. Jean-Paul Delevoye a souligné que celles-ci pouvaient d'abord refléter un sentiment d'arbitraire. Relevant que certaines décisions de l'administration pouvaient être incomprises, il a jugé indispensable de développer une action pédagogique tendant à renforcer la légitimité de l'action administrative. A cet égard, il a estimé que ses réponses pouvaient mettre en oeuvre une « pédagogie du non » face aux contestations abusives des décisions de l'administration. Il a également plaidé pour l'amélioration des fonctions d'accueil des services publics. Il a relevé que les réclamations traduisaient également un sentiment d'iniquité lié à l'écart de plus en plus grand entre les citoyens et un système qui leur paraissait imposer sa logique, sans les aider à trouver des solutions. Face à ces blocages, a-t-il poursuivi, certains étaient tentés de faire appel aux médias qui paraissaient fournir une alternative aux mécanismes classiques de règlement des conflits, alors même que les délais nécessaires au traitement en profondeur d'un dossier n'étaient pas compatibles avec la primauté donnée par les médias à une réponse immédiate.
Le Médiateur de la République s'est demandé si l'adage selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » ne constituait pas un leurre. Il a observé en outre que la loi pouvait être appliquée de manière différente sur le territoire national compte tenu de la disparité des moyens mis en oeuvre par les collectivités, ce qui pouvait entraîner des inégalités entre les citoyens. Il a estimé que la loi semblait désormais perçue comme un instrument destiné à préserver les droits des individus plutôt que comme une source d'obligations vis-à-vis de la collectivité. Cette évolution, a-t-il relevé, paraissait être la marque d'une société de plus en plus atomisée. Les institutions étaient ainsi jugées, selon lui, plus en fonction du service rendu que des valeurs qu'elles étaient censées porter. Il a estimé que, de son côté, l'administration paraissait parfois privilégier le respect des procédures sur l'efficacité des décisions.