Merci de votre invitation, qui m'a d'emblée enthousiasmée. Nous trouvons tous la loi de 2007 formidable : c'est une étape historique dans l'évolution des relations sociales dans notre pays. Il reste évidemment des marges de progression, des interrogations mais, un peu plus qu'avant, l'espace propre aux partenaires sociaux est délimité, les responsabilités spécifiques définies. Nous savons désormais utiliser pleinement ce mécanisme.
Soit l'on dit que tel ou tel sujet relève exclusivement du contrat, non de la loi. A nous alors de trouver la bonne entente pour fixer la norme. Soit on juge que seule la loi peut établir la norme. Se pose alors la question de la transposition de l'accord conclu par les partenaires sociaux. Jusqu'à quel point le Parlement peut-il le transformer ? C'est un vrai sujet, difficile à trancher. Démocratiquement, on ne peut imposer au législateur de transposer tel quel un accord : le dernier mot revient à la représentation nationale. Doit-elle pour autant arrêter les moindres détails ?
Aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail. Est-ce à dire qu'il y a des sujets que le législateur ne devrait même pas regarder ? C'est une question difficile, qui n'est ni de gauche ni de droite, mais relève plutôt du débat sur la démocratie participative : il s'agit de donner un rôle plus important aux partenaires sociaux. Les protocoles adoptés au Sénat et à l'Assemblée nationale étendant le principe de la loi de 2007 aux propositions de loi sont très utiles, mais nous n'avons que quinze jours de délai pour répondre aux sollicitations : c'est très court.
On connaît l'antienne des politiques : le dialogue social ne marcherait pas, il faut le réveiller, le relancer, le renouveler... Mais nous négocions sans cesse ! Voyez le nombre d'accords d'entreprise ou de branche : la France est au premier rang en termes de couverture de branche ! Le dialogue social aboutit-il toujours à la construction sociale ? Les organisations syndicales sont parfois impatientes mais le dialogue social marche mieux que ce que l'on dit - n'en déplaise aux politiques, qui le dénigrent volontiers pour mieux justifier leur propre rôle ! Nous aussi, nous en jouons : après le conflit sur les retraites, le patronat a eu beau jeu d'inviter les syndicats à discuter avec lui plutôt qu'avec le Gouvernement ! Nous, nous ne sommes pas dupes, mais on dupe l'opinion publique.