Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission, ouverte à tous les sénateurs, reçoit les présidents et secrétaires généraux des organisations professionnelles pour un échange sur l'agenda social 2011 : MM. François Chérèque, secrétaire général de la confédération française démocratique du travail (CFDT), Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière (FO), Jacques Voisin, président de la confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), Bernard Van Craeynest, président de la confédération française de l'encadrement-confédération générale des cadres (CFE-CGC), Mme Laurence Parisot, président du mouvement des entreprises de France (Medef), MM. Jean-François Roubaud, président de la confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) et Jean Lardin, président de l'union professionnelle artisanale (UPA).
Cette réunion de la commission des affaires sociales est une expérience inédite : c'est la première fois que nous entendons les partenaires sociaux sur l'agenda social, qui constitue, depuis 2008, la feuille de route de la négociation annuelle retenue par les organisations professionnelles. Je remercie le président Larcher d'avoir pris l'initiative de ce moment d'échange et d'expression de la démocratie sociale.
Je suis heureux de participer à cette audition. Nous allons entendre sept des huit présidents ou secrétaires généraux des organisations professionnelles. Pour la première fois, vous venez présenter devant le Sénat votre agenda social pour 2011, ainsi que votre cycle pluriannuel de délibérations et de négociations. Cet agenda est riche : il comporte les négociations incontournables, assurance chômage et retraites complémentaires, mais aussi, à votre initiative, d'autres thèmes comme l'emploi des jeunes. Nous souhaitons vous entendre sur vos priorités dans les négociations, ainsi que sur votre conception du dialogue social et de son évolution, pour une meilleure articulation entre démocratie politique et démocratie sociale.
La loi du 31 janvier 2007, qui avait le mérite de la brièveté, a constitué une première étape dans la rénovation du processus de préparation des réformes dans le domaine du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Elle a fixé le cadre méthodologique de la concertation préalable entre le Gouvernement et les partenaires sociaux et introduit la notion d'agenda social, que vous avez interprétée de manière extensive le 10 janvier dernier.
La seconde étape a été d'élargir cette procédure aux propositions de loi à caractère social. Le bureau du Sénat a adopté un protocole le 16 décembre 2009, l'Assemblée nationale a suivi. Par deux fois, nous vous avons renvoyé des propositions de loi.
Troisième étape, notre rencontre d'aujourd'hui est un exercice de pédagogie réciproque : il s'agit, dans le respect de l'indépendance du pouvoir législatif, de permettre aux parlementaires de mieux prendre en compte les exigences liées aux négociations collectives, et stimuler l'initiative parlementaire. Certains parlementaires estiment peut-être que la négociation collective prend beaucoup de temps devant l'urgence des réformes ; a contrario, les partenaires sociaux peuvent ne pas comprendre les amendements parlementaires à un texte transposant un accord. Il ne doit pas y avoir de mur de verre entre nous : nous partageons la même préoccupation, celle de l'avenir de notre pays. C'est un rendez-vous fort, fondé sur l'échange.
Pour la première fois, vous utilisez la méthode « réversible » ouverte par la loi de 2007 : les sujets inscrits à l'agenda social peuvent l'être à votre initiative comme à celle du Gouvernement. Dans une société qui redoute l'avenir, qui se replie sur elle-même, où pointe la tentation du populisme, nos relations sont essentielles.
C'est avec plaisir que nous venons parler de l'agenda social devant les parlementaires, preuve que nous tentons de travailler ensemble. Trop souvent, les relations entre Parlement et partenaires sociaux donnent lieu à des combats de légitimité. La loi de janvier 2007 - dite loi Larcher - a été la première à organiser les espaces de responsabilité des uns et des autres. Jusqu'à présent, elle a été plutôt bien utilisée, malgré quelques accrocs lors de la reprise d'accords. Peu après son élection, le Président de la République avait réuni les partenaires sociaux et lancé un agenda social, dont plusieurs éléments, comme la modernisation du marché du travail ou la formation professionnelle, ont été traduits dans la loi.
C'est aujourd'hui la première fois que nous prenons nous-mêmes en main le dialogue social. Premier volet de l'agenda social : les thèmes imposés par la loi, assurance chômage et retraites complémentaires. Deuxième volet, un thème que nous avons choisi : l'emploi des jeunes. Il s'agit de trouver des mesures concrètes, avec des objectifs chiffrés, en matière de formation, d'apprentissage, de stages, de logement, etc. Je regrette que le Président de la République ait annoncé hier des mesures en matière d'apprentissage : cette transgression, si j'ose dire, risque d'être un frein à la négociation.
Les sujets choisis conjointement - les institutions représentatives du personnel et le partage de la valeur ajoutée - figuraient dans le précédent agenda social. S'y ajoute l'évolution du paritarisme. Sujets plus prospectifs, l'évolution du bilan d'étape professionnelle et l'accompagnement des cadres au chômage pourront déboucher sur une négociation une fois les choses mises à plat.
Deux pistes de réflexion pour l'avenir : le lien entre initiative parlementaire et agenda social, sachant que le délai qui nous est accordé pour répondre aux demandes d'avis sur les propositions de loi est bien court, et l'amélioration de la concertation entre nous, sans empiéter sur la responsabilité du législateur ou sur l'espace réservé des partenaires sociaux.
Je me félicite de cet échange démocratique entre les partenaires sociaux et les élus. Le débat sur le lien entre démocratie sociale et démocratie politique est ancien. Aux termes de l'article 1er de la Constitution, la France est une république sociale. Celle-ci repose sur trois piliers : des services publics à la hauteur des besoins ; la solidarité, qui suppose de préserver nos régimes de protection sociale collective ; une couverture conventionnelle ou statutaire des salariés exceptionnelle, qui place la France au premier rang en la matière. La couverture des salariés des hôtels, cafés et restaurants, par exemple, secteur qui compte surtout des très petites entreprises, ne peut passer que par un accord de branche.
En France, ce sont souvent les crises qui font évoluer. La loi de 2007 a fait suite à la crise du contrat première embauche (CPE). Largement débattue avec les partenaires sociaux, elle a fait consensus et marqué un progrès important. Les politiques, parlementaires ou pouvoirs publics, font primer l'intérêt général ; les organisations syndicales défendent des intérêts particuliers. Il n'y a pas pour autant un mur entre nous, pas plus qu'entre la loi et le contrat. Cela suppose de respecter la liberté de négociation, de déterminer ce qui relève ou non de la négociation collective. Tout ce qui est dans et autour du contrat de travail est de notre responsabilité. Sur ce terrain, nous pouvons solliciter le législateur - sans pour autant nous substituer à vous - mais le tempo du dialogue social n'est pas celui du politique, rythmé par l'élection présidentielle. Nous pouvons, nous, avoir besoin de plus de temps !
L'épisode des retraites a montré la nécessité de clarifier les rôles, même s'il y aura toujours des zones d'ombre et des passerelles. Nous avons soutenu l'agenda social, défini ce qui relève de notre responsabilité, annoncé nos chantiers, fixé un calendrier. En ce qui concerne l'emploi des jeunes, nous voulons du concret sur la formation, la mobilité, le logement, les stages, etc. Pourquoi pas une prime pour les jeunes qui trouvent un emploi loin de leur domicile ?
Sur l'apprentissage, nous demandons à être consultés, mais le sujet est de la responsabilité des pouvoirs publics. Il faut respecter nos champs de responsabilité respectifs. Notre pays a besoin de démocratie politique et de démocratie sociale. La loi de 2007, excellente par ailleurs, ne doit pas conduire à nous imposer un rythme qui n'est pas le nôtre sur des dossiers qui sont de notre responsabilité. Il ne faudrait pas que trop de libéralisme économique conduise à trop d'autoritarisme social !
Merci au président Larcher de cette initiative. Le dialogue social est essentiel : pour nous, la construction sociale se fonde sur la négociation collective.
Comment clarifier les rôles ? Quand nous disons « complémentarité », nous pensons « subsidiarité ». La loi de 2007, la consultation des partenaires sociaux sur les propositions de loi à caractère social ne règlent pas tout. La question des retraites reste posée. Idem pour l'emploi des jeunes. Comment articuler nos compétences pour avancer ensemble ? La loi de 2007, par ailleurs satisfaisante, ne répond pas à cette question de la responsabilité partagée.
Autre préoccupation : comment améliorer l'organisation de notre dialogue social ? Quelles méthodes et quels moyens ? Rien n'est formalisé, sinon un rendez-vous hebdomadaire. Si les négociations de branche et d'entreprise sont encadrées et structurées par le code du travail, il reste à préciser le rôle de l'interprofessionnel.
L'agenda social organise un cycle de discussions sur la qualité de la vie au travail, qui abordera notamment la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle ou l'organisation du travail. Nous avons besoin de temps pour préparer cette négociation.
Nous nous voyons tous les deux ans pour le renouvellement de la convention d'assurance chômage mais, à s'y prendre trop tard, nous n'avons pas le temps d'étudier des questions aussi importantes que la portabilité des droits, le niveau des cotisations ou l'accompagnement des demandeurs d'emploi. Il nous faut oser aborder certains sujets sensibles, que nous avons tendance à laisser au législateur, comme le financement de la protection sociale, la pénibilité, la modernisation du dialogue social, la négociation d'entreprise, le partage de la richesse, etc. Pour nous en emparer réellement, il nous faudrait un lieu neutre, où prendre le temps de débattre : un conseil du dialogue social sur le modèle de ce qui existe dans d'autres pays.
Je me réjouis de cette rencontre, alors que les partenaires sociaux viennent de prendre l'initiative, inspirée par la loi de 2007, d'établir un agenda social pluriannuel. Le menu des négociations est copieux ; j'espère que nous en sortirons rassasiés, sans indigestion...
Comme dans le patinage artistique, il y a les figures libres et les figures imposées - l'essentiel est de ne pas chuter ! Il y aura des résultats en matière d'assurance chômage et de retraites complémentaires ; à chacun d'en apprécier la qualité.
Nous sommes dans une période transitoire, qui n'est pas à la hauteur des enjeux. La rapidité de l'évolution du monde tranche avec la lenteur de l'adaptation de notre vie économique et sociale. Beaucoup restent au bord de la route. Nous n'arrivons pas à retrouver notre place dans le concert international et dans la compétition économique mondiale.
Cet agenda social a été établi au lendemain de l'échec des retraites. Les retraites complémentaires sont clairement du domaine des partenaires sociaux. La réforme est loin de répondre à nombre d'interrogations. Chacun sait que nous n'avons fait que différer les solutions de fond ; il faudra y revenir bien avant 2018.
Notre histoire sociale est celle d'une relation tripartite, où deux partenaires ont toujours su s'entendre sur le dos du troisième et attendu des pouvoirs publics qu'ils maintiennent l'ordre public social. Or, depuis la loi de mai 2004, la protection en la matière s'est étiolée, compte tenu de l'existence de déserts syndicaux. Je salue la qualité du rapport de votre délégation à la prospective sur le pacte social en entreprise. Si l'on peut se contenter d'un pacte oral dans les petites entreprises, les plus grandes ont besoin d'intermédiation. Encore faut-il trouver des acteurs du dialogue social, susciter des vocations... La loi du 20 août 2008 est emblématique de l'incompréhension entre partenaires sociaux et politiques. Son titre II, qui porte sur la durée du travail, pollue la relation de confiance nécessaire pour bâtir l'édifice social.
Pourquoi ne pas mettre en place une sorte de commission mixte paritaire, regroupant députés, sénateurs et représentants des partenaires sociaux, afin d'échanger et mieux nous comprendre ? Sans remettre en cause le droit d'amendement des parlementaires, il peut être utile d'expliciter la rédaction de tel ou tel article... Idem pour les formulations auxquelles nous aboutissons, parfois rédigées de manière fort alambiquée car il ne fallait fâcher personne !
A l'instar des Pays-Bas ou du Danemark, nous voulons sortir de ce tripartisme. Nos discussions sont dictées soit par l'Elysée, qui nous invite, avec force médiatisation, pour évoquer les grands sujets sociaux, soit par le Medef, qui nous reçoit à son siège, nous fournit l'hospitalité mais commande du coup le rythme de la négociation ! C'est pourquoi nous demandons la création d'une maison du dialogue social indépendante, où nous réunir en tant que de besoin.
Merci de votre invitation, qui m'a d'emblée enthousiasmée. Nous trouvons tous la loi de 2007 formidable : c'est une étape historique dans l'évolution des relations sociales dans notre pays. Il reste évidemment des marges de progression, des interrogations mais, un peu plus qu'avant, l'espace propre aux partenaires sociaux est délimité, les responsabilités spécifiques définies. Nous savons désormais utiliser pleinement ce mécanisme.
Soit l'on dit que tel ou tel sujet relève exclusivement du contrat, non de la loi. A nous alors de trouver la bonne entente pour fixer la norme. Soit on juge que seule la loi peut établir la norme. Se pose alors la question de la transposition de l'accord conclu par les partenaires sociaux. Jusqu'à quel point le Parlement peut-il le transformer ? C'est un vrai sujet, difficile à trancher. Démocratiquement, on ne peut imposer au législateur de transposer tel quel un accord : le dernier mot revient à la représentation nationale. Doit-elle pour autant arrêter les moindres détails ?
Aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail. Est-ce à dire qu'il y a des sujets que le législateur ne devrait même pas regarder ? C'est une question difficile, qui n'est ni de gauche ni de droite, mais relève plutôt du débat sur la démocratie participative : il s'agit de donner un rôle plus important aux partenaires sociaux. Les protocoles adoptés au Sénat et à l'Assemblée nationale étendant le principe de la loi de 2007 aux propositions de loi sont très utiles, mais nous n'avons que quinze jours de délai pour répondre aux sollicitations : c'est très court.
On connaît l'antienne des politiques : le dialogue social ne marcherait pas, il faut le réveiller, le relancer, le renouveler... Mais nous négocions sans cesse ! Voyez le nombre d'accords d'entreprise ou de branche : la France est au premier rang en termes de couverture de branche ! Le dialogue social aboutit-il toujours à la construction sociale ? Les organisations syndicales sont parfois impatientes mais le dialogue social marche mieux que ce que l'on dit - n'en déplaise aux politiques, qui le dénigrent volontiers pour mieux justifier leur propre rôle ! Nous aussi, nous en jouons : après le conflit sur les retraites, le patronat a eu beau jeu d'inviter les syndicats à discuter avec lui plutôt qu'avec le Gouvernement ! Nous, nous ne sommes pas dupes, mais on dupe l'opinion publique.
Merci d'avoir organisé cette rencontre. Pour nous, le paritarisme est un pilier fondamental de l'équilibre social de notre pays. Il y a gestion paritaire dès lors que nous fixons les paramètres : cotisations prélevées, prestations de services, structures de gestion... C'est le cas en matière de formation professionnelle, de retraites complémentaires, d'assurance chômage.
La politique conventionnelle a fait la preuve de son efficacité. L'agenda social du 10 janvier illustre la capacité des partenaires à s'emparer de nombreux thèmes. Pour autant, toutes les questions ne peuvent être traitées ou trouver des solutions dans ce seul cadre. Sur certains sujets, il n'y a pas de consensus entre nos organisations : à la loi de trancher, qu'elle fixe directement les règles ou qu'elle reprenne des dispositifs élaborés par les partenaires sociaux.
L'autonomie des partenaires sociaux est une valeur fondamentale. S'il est légitime que l'Etat nous signifie ses attentes, il ne lui revient pas de nous fixer un calendrier trop rapide. Nous avons dû boucler la réforme de la formation professionnelle à la hâte - mais ensuite attendu dix mois que le législateur achève ses discussions !
L'assurance chômage et les retraites complémentaires sont les piliers du dialogue social paritaire. La troisième priorité est l'emploi des jeunes. J'ai pour ma part salué les mesures annoncées hier par le Président de la République, car il faut aller vite. L'alternance est la meilleure voie de l'insertion dans l'entreprise, et 77 % des contrats de professionnalisation sont signés dans des entreprises de moins de vingt salariés.
Il faut être attentif à la modernisation du paritarisme, y compris concernant son financement. Le dialogue social paritaire fonctionne : nous faisons au moins aussi bien que l'Allemagne ! Sur la forme comme sur le fond, nous pouvons nous décerner un satisfecit, même s'il y a toujours des marges d'amélioration. Faut-il une maison du dialogue social ou une permutation circulaire des lieux de rencontre ? Nous n'avons guère d'argent à y consacrer... L'important, c'est qu'on ne nous donne pas le dossier deux minutes avant le début de la négociation !
UPA. - Cette rencontre était attendue. Il est important d'échanger sur la manière d'améliorer l'articulation entre démocratie sociale et démocratie politique. Longtemps, les partenaires sociaux ont regretté de n'être pas suffisamment associés à l'élaboration des règles du droit du travail. La loi de 2007, que nous devons à M. Larcher, a marqué une avancée majeure ; son extension aux propositions de loi est positive.
Il n'est pas question pour nous d'empiéter sur le rôle du législateur, mais il est indispensable que les sujets qui concernent les employeurs et les salariés soient traités en priorité par leurs représentants, qui sont les plus à même de traiter les problèmes. Dialoguer, c'est apprendre à se connaître ; c'est aussi créer les conditions du vivre ensemble.
L'UPA s'attache à organiser un dialogue social adapté aux plus petites entreprises. L'agenda social résulte d'un travail collectif, malgré des approches nuancées des diverses organisations sur certains sujets : nous savons travailler ensemble.
Outre les figures imposées, assurance chômage et retraites complémentaires, nous avons choisi de travailler sur l'emploi des jeunes car la jeunesse, c'est l'avenir de la France. Nous avons de l'expérience en la matière : les entreprises de l'artisanat et du commerce de proximité forment plus de 60 % des apprentis. Je sais le Sénat sensible à ce sujet. L'UPA s'emploie à trouver des pistes pour redonner confiance aux jeunes.
La négociation sur la modernisation du paritarisme peut sembler technique, mais elle doit renforcer la visibilité de la gestion paritaire et du rôle des partenaires sociaux. Nous avons des outils, à nous de les faire vivre. Le dialogue social doit être conforté ; il doit concerner tous les salariés, être adapté aux entreprises de toute taille.
Il faut construire ensemble une relation de confiance réciproque entre le Parlement, le Gouvernement et les partenaires sociaux. Plus les règles seront définies par la négociation, plus elles seront solides et stables. Il faut un bon équilibre entre accord, règlement et loi.
Merci pour toutes ces suggestions. Il était particulièrement intéressant de vous entendre vous exprimer tous ensemble.
Je crains que nous ne puissions pas répondre aux questions que vous nous avez posées et vous n'aurez certainement pas non plus le temps de répondre à toutes celles de nos collègues sénateurs qui sont nombreux à avoir demandé la parole.
J'ai été rapporteur au Sénat de la loi de 2007 : à l'époque, j'avais posé deux questions au ministre du travail dont l'une était relative aux directives européennes : comment les insérer dans le dialogue social ? Avez-vous rencontré des problèmes depuis lors avec des directives ? L'autre question concernait l'initiative parlementaire : au cours des différents textes, je n'ai jamais eu l'impression que les partenaires sociaux voulaient remettre en cause notre droit d'initiative parlementaire. Certes, vous souhaiteriez parfois que l'on transpose certains accords sans en modifier une virgule, mais aucun d'entre vous ne nous a dit qu'il n'était pas question que nous y touchions.
Lorsqu'une proposition de loi est déposée, elle est rarement examinée en séance publique dans les quinze jours : il faut plutôt six mois, voire plus, avant qu'elle soit inscrite à l'ordre du jour. Vous avez donc le temps de l'examiner. Je m'interroge beaucoup plus sur les amendements car là, le temps politique et le temps du dialogue social ne sont pas les mêmes. Un certain nombre d'amendements qui portaient sur des sujets relevant du champ de la négociation collective nous ont franchement surpris. A la commission des affaires sociales, nous réagissons, mais ce n'est pas le cas des autres commissions. Sans doute y a-t-il un manque de suivi de votre part : nous devrions y réfléchir ensemble.
Merci pour cette initiative, monsieur le Président du Sénat. Commission du dialogue social, maison du dialogue social, mais quid du Conseil économique, social et environnemental (CESE) ?
Un agenda social permet de donner de la visibilité à la société, de préparer les dossiers et d'articuler les différents projets. Ne faudrait-il pas, en début de législature, prévoir une conférence entre le Parlement et les partenaires sociaux pour fixer les priorités ? Le temps de l'action est en effet ponctué par la vie démocratique.
Je m'interroge sur les thèmes qui figurent dans l'agenda social. Certes, certains sont obligatoires, comme l'assurance chômage. Cette année, vous vous préoccupez de l'emploi des jeunes, et vous nous demandez de respecter vos choix et de ne pas interférer dans les négociations que vous menez au sein de cet agenda. Mais des thèmes importants n'y figurent pas, comme le mal-être au travail : une mission sénatoriale s'est penchée sur cette question et son rapport a été voté à l'unanimité de ses membres, même si, ensuite, il a été mis sous la table. Sur la pénibilité, rien non plus dans l'agenda. Certes, vous ne contestez pas l'initiative parlementaire mais comment faire pour que vos choix de discussion correspondent aux thématiques qui nous semblent importantes ?
Vous disiez qu'il y a beaucoup de négociations et d'accords signé dans notre pays. Pourtant, les résultats restent en deçà des attentes. Voyez ce qui se passe avec les négociations annuelles obligatoires : à qualification égale, l'écart des salaires entre les femmes et les hommes est de 25 %. Même remarque sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (Gpec) : la formation des seniors laisse encore à désirer.
Enfin, l'emploi des seniors fait partie de la Gpec et de l'agenda social : il faudrait que les entreprises gardent les salariés jusqu'à l'âge de la retraite. Cela éviterait les difficultés actuelles.
En janvier 2011, le nombre de demandeurs d'emplois toutes catégories confondues s'élevait à 4 644 700 personnes. Dans le même temps, le nombre de chômeurs de longue durée continuait de s'accroître : plus de 19 % en un an. Le nombre de chômeurs de très longue durée, c'est-à-dire plus de deux ans, a continué, lui aussi, d'augmenter. Pourquoi ces problèmes ne sont-ils pas inscrits à l'agenda social alors qu'ils sont les plus générateurs d'exclusion ?
Depuis 2008, il y a eu 478 667 ruptures conventionnelles. Ne s'agit-il pas d'un habillage du licenciement pour motifs personnels, plutôt qu'un choix délibéré des parties ?
L'allocation équivalent retraite (AER) était financée par l'Etat au titre de la solidarité, mais celui-ci se désengage et renvoie aux partenaires sociaux la charge de subvenir aux besoins des personnes de plus de cinquante ans.
L'allocation pour les demandeurs d'emplois en formation va être payée par Pôle Emploi.
Les récentes déclarations du Président de la République risquent de parasiter l'agenda social. Il a insisté sur l'apprentissage et il a promis la création de dix centres de formation d'apprentis (CFA) supplémentaires, mais les régions vont-elles devoir les financer ?
Le 1er mars, le Premier ministre a proposé aux organisations patronales un deal : la pérennisation, dite « barémisation », des allégements de cotisations patronales contre l'engagement par les entreprises de prendre des jeunes en alternance. Que peut-on attendre de cette mesure ?
Que pensent les syndicats de l'apprentissage dans la fonction publique ?
L'agenda social est une excellente idée mais on peut avoir une imagination sociale très forte et ne pas en avoir les moyens financiers. Notre pays a 1 600 milliards de dette : ne pourrait-on prévoir un agenda économique et financier qui permettrait de déterminer les moyens dont nous disposons pour soutenir la concrétisation de cet agenda social ?
Je suis tellement content de voir les partenaires sociaux presque tous ensemble que j'ai envie de poser une question politiquement non correcte : avec Patricia Schillinger, nous avons rendu un rapport sur le pacte social dans l'entreprise et nous avons été étonnés de voir que la plupart des syndicats ne souhaitaient pas que les salariés participent à la gouvernance des entreprises. Nous restons donc dans un modèle traditionnel de lutte des classes et je voudrais comprendre ces réticences. Pourquoi n'y aurait-il pas dans les conseils d'administration de certaines entreprises ou dans les conseils de surveillance des représentants de salariés avec voix délibérative ? Il est anormal que des fonds de pension étrangers siègent dans les conseils d'administration et privilégient le court terme alors que les personnels n'y sont pas représentés. Sans aller jusqu'aux modèles suédois, allemand ou danois, pourquoi pas un peu de codétermination dans l'entreprise ?
Evaluez-vous les accords que vous signez ? Si oui, comment ?
M. Chérèque a évoqué la question de l'emploi des jeunes : le Président de la République a récemment fait une déclaration sur l'apprentissage, ce qui ne règle en rien l'emploi des jeunes qui est une question bien plus large. Certes, la formation professionnelle ne dépend pas seulement du dialogue social, mais vous avez votre mot à dire : comment parler de l'augmentation du nombre d'apprentis dans les grandes entreprises alors que des sections dans les lycées professionnels ferment ?
Lorsque nous avons examiné le projet de loi sur les retraites, il a beaucoup été question de l'emploi des seniors. Le recul de l'âge légal de la retraite devait leur permettre de travailler plus longtemps, nous a-t-on dit. Pouvez-vous demander aux grandes entreprises, madame Parisot, qu'elles cessent de licencier leurs salariés de plus de cinquante ans ?
Quel lien faites-vous entre la rupture conventionnelle et le retrait du marché du travail des seniors ?
Le chômage des plus de cinquante ans a augmenté de plus de 13 % l'an passé et un tiers des chômeurs indemnisés se trouvent en situation de pauvreté, voire de grande pauvreté.
L'AER, créée en décembre 2001, a été supprimée puis rétablie en mai 2010 et non prorogée au-delà du 31 décembre 2010. Hier, lors de la séance des questions orales, M. Bourquin a interrogé le Gouvernement en la matière et Mme Berra lui a répondu ceci : « Les bénéficiaires actuels continuent de percevoir l'AER. C'est seulement au 1er janvier 2011 qu'il n'y a plus d'entrants. Les partenaires sociaux ont engagé une renégociation de l'assurance chômage. La situation de ces personnes doit être abordée dans ce cadre. Pérenniser l'AER reviendrait à perpétuer la notion même de préretraite. Il faut réduire les effets pervers de la cessation anticipée d'activité ». Qu'en pensez-vous ?
J'ai noté avec satisfaction qu'il y avait un large consensus à cette tribune sur le fonctionnement du dialogue social, contrairement aux idées reçues dans le milieu politique, avez-vous dit, même si je n'ai pas vraiment l'impression que telle était notre perception des choses. Mme Parisot a dit que le dialogue n'aboutissait pas toujours à la construction sociale. Or, c'est bien cela qui nous intéresse. M. Voisin a ajouté que certains sujets sont laissés de côté. Ne serait-il pas légitime que les parlementaires se saisissent des questions relatives à la pénibilité, au financement de la protection sociale, au fonctionnement de Pôle Emploi ? Nous devrions dialoguer tous ensemble sur ces thèmes, comme l'ont d'ailleurs fait nos collègues avec le rapport d'information sur le pacte social.
Je reviens sur la maison du dialogue social : le Conseil économique, social et environnemental (CESE) serait le lieu tout trouvé pour instaurer ce dialogue. Nous pourrions d'ailleurs y participer pour faire valoir nos points de vue.
Comment interpréter l'explosion des ruptures conventionnelles ? Ne s'agit-il pas de licenciements déguisés ou d'un nouveau moyen pour se séparer des seniors ?
Elu d'un quartier populaire de l'agglomération lyonnaise, je suis très sensibilisé à la question de la formation professionnelle des jeunes, notamment des jeunes Français d'origine maghrébine, car ils rencontrent de grandes difficultés pour accéder à l'emploi.
Une suggestion qui ne demande pas de réponse immédiate : depuis très longtemps, le problème de la frontière entre contrat et loi empoisonne nos relations. Personne n'a trouvé de solution. Mme Parisot a parlé de l'article 34 de la Constitution : il faut savoir que les parlementaires le respectent assez peu. La distinction entre législatif et réglementaire est souvent perdue de vue et nous allons très loin dans les détails.
Sur une loi sociale, vous pourriez nous dire quels sont, à vos yeux, les principes généraux qui sont du domaine législatif et quelles sont les mesures d'application qui n'ont pas à figurer dans le texte. Si nous pouvions nous livrer à un tel exercice, nous améliorerions sans doute nos relations réciproques et nous éviterions d'encombrer le code du travail de toute une série de dispositifs contractuels.
L'objet de notre réunion était la présentation de l'agenda social. Je vous propose de répondre brièvement, et par priorité, sur le sujet d'aujourd'hui.
S'il suffisait d'une maison du dialogue social pour améliorer le dialogue social, elle serait déjà construite. En revanche, il serait très intéressant de prévoir une conférence sociale en début de quinquennat. Nous avons essayé de le faire une fois et nous avons négocié pendant deux ans. Un tel dialogue me semble fondamental : il en va de l'organisation de la démocratie dans notre pays.
Pour qu'un accord d'entreprise soit valable, il doit être signé par des syndicats qui représentent au minimum 30 % des salariés et il peut être contesté par des syndicats qui représentent au moins 50 % des salariés. A partir du moment où un accord n'est pas contesté, il a une validité démocratique. Globalement, toutes les organisations syndicales signent 70 % des accords d'entreprise.
Il ne peut y avoir qu'explosion du nombre des ruptures conventionnelles puisqu'elles n'existaient pas auparavant. Si nos quatre organisations syndicales ont signé cet accord, c'est pour éviter les ruptures de contrats de travail qui, auparavant, étaient faites n'importe comment dans les entreprises. Nous avons mis en place un système clair, déclaratif et qui est contrôlé par l'inspection du travail. Qu'il y ait des abus, en particulier pour les seniors, c'est probable, mais il faut évaluer la loi et les accords.
Je suis bien évidemment favorable à l'apprentissage dans la fonction publique, dans toutes les fonctions publiques, y compris dans les collectivités locales. Les responsables politiques doivent arrêter de donner des leçons sur l'apprentissage dans le privé alors que la fonction publique en est encore au Moyen-Age dans ce domaine. Je regrette que ce sujet ne soit pas abordé dans la négociation actuelle.
La CFDT souhaite changer le mode d'organisation des consultations du personnel. Pour l'instant, nous nous bornons à des négociations sur les conséquences des décisions prises par les dirigeants d'entreprise. Il faut organiser le dialogue en amont pour anticiper sur ces décisions.
L'Etat doit financer l'AER : reculer l'âge de la retraite et dire aux partenaires sociaux qu'ils doivent financer l'AER, ce n'est pas acceptable. En revanche, nous sommes prêts à cofinancer les formations longue durée pour les chômeurs.
Il serait très intéressant que notre agenda social se déroule en même temps que les agendas des parlementaires.
L'emploi des seniors figure bien dans l'agenda social du deuxième semestre : nous allons voir si la situation s'est améliorée.
Faut-il que la maison du dialogue social soit située dans un immeuble ?
Le CESE a une autre mission que la nôtre : chacun doit pouvoir dialoguer de son côté.
La pratique fait que l'on ne définira jamais très précisément ce qui ressortit à la responsabilité du Parlement et ce qui relève de celle des partenaires sociaux. Je ne souhaite pas qu'il soit impossible de toucher à un accord : politiquement, cela s'appelle le corporatisme. Vous avez la responsabilité finale des lois que vous votez. En revanche, si un accord a été signé par quasiment toutes les organisations patronales et syndicales, à vous de mesurer s'il a plus de poids qu'un accord signé par un ou deux syndicats. Mais votre responsabilité doit rester pleine et entière, sinon nous ne sommes plus dans un régime démocratique et républicain. Cela ne veut pas dire que lorsqu'on a signé un accord, nous ne souhaitions pas que vous le respectiez, mais c'est vous qui avez le dernier mot.
Nous savons tous que de plus en plus de directives conduisent à l'adoption de lois, voire d'accords. L'accord sur le stress au travail que l'on a négocié en France est issu d'un accord européen signé par le patronat européen et par la confédération européenne des syndicats. La vie contractuelle au niveau européen est encore plus compliquée que ce qu'elle est au niveau national.
Mais a-t-on eu un jour un véritable débat dans notre pays sur la nature des transferts de pouvoirs que l'on acceptait au niveau européen ? Le peuple français attend beaucoup de ses politiques, quels qu'ils soient. Mais ces derniers sont-ils encore en situation de décider ou sont-ce les marchés ou d'autres instances qui le font à leur place ?
Je ne vois pas vraiment l'intérêt d'une maison du dialogue social. Le CESE ne peut en tenir lieu : cette assemblée consultative a d'autres fonctions. Je regrette que nous n'ayons plus dans notre pays de lieu transversal de débat et de démocratie à froid, ce qu'était en son temps le commissariat général du plan où l'on pouvait discuter de tout. Aujourd'hui, nous avons des instances spécialisées mais plus de lieu transversal. Je le regrette.
Nous ne sommes pas responsables de la loi sur les retraites : que ceux qui l'ont votée assument leurs choix et que l'Etat finance l'AER.
Nous avons déjà cofinancé la formation des chômeurs en fin de droit avec les fonds paritaires et nous sommes prêts à recommencer.
J'en viens à la rupture conventionnelle : auparavant, on appelait cela les « chèques-valise » : vous vous mettiez d'accord avec l'employeur qui vous licenciait. La négociation sur cette question avec le patronat n'a pas été chose aisée : aujourd'hui, la comparaison avec la situation antérieure est très difficile, d'une part parce qu'il n'y a aucun point de repère et d'autre part parce que la crise est passée par là. Comment faire des comparaisons ? Bien sûr, une part des ruptures conventionnelles est due à la crise, mais cela ne me choque pas que 20 % des ruptures conventionnelles concernent les seniors : l'Etat n'a qu'à remettre en place des préretraites.
Des salariés dans les conseils d'administration ? Ce n'est pas la tasse de thé de FO. On a souvent plus d'informations dans les comités d'entreprise que dans les conseils d'administration. Ou alors, transformons toutes les entreprises en sociétés coopératives !
Quelques mots sur l'articulation du dialogue social avec la démocratie politique. La rencontre d'aujourd'hui montre que nous avons plein de choses à nous dire : il faudrait sans doute que des réunions de ce type se tiennent plus régulièrement.
Manque-t-il un lieu pour le dialogue social ? Je ne le crois pas. Au cours des multiples réunions que nous avons, je n'ai jamais eu le sentiment que l'un des partenaires ait manqué de liberté, d'indépendance, de capacité de négociation. Je ne suis pas sûre qu'un lieu spécifique changerait quoi que ce soit.
Ensuite, il y a beaucoup de lieux de rencontre : nous passons notre temps à courir d'une commission à une autre, d'un centre d'analyse à un autre...
Il ne faut pas non plus se montrer nostalgique : les débats se déroulent aujourd'hui sur BFM, sur LCI, sur les forums ou sur nos sites internet.
Plusieurs d'entre vous ont laissé entendre que tel ou tel thème ne figurait pas sur l'agenda : c'est faux ! Nous les abordons tous. Les enjeux de mal-être au travail sont sur l'agenda. Je ne connais pas un thème que nous ayons refusé. Il y a certes des thèmes sur lesquels des discussions ont lieu mais qui n'aboutissent pas à un accord. C'est le cas de la pénibilité. Notre désaccord ne porte pas sur la pénibilité, dont nous ne nions pas la réalité, mais sur le financement.
Comme l'a dit le président Poncelet, le social ne se conçoit pas sans l'économie, mais nous en parlons aussi. Nous allons d'ailleurs prochainement parler de la compétitivité et des enjeux du financement de la protection sociale. Nous ne sommes pas sûrs de trouver une solution miracle qui conviendrait à tous, mais nous allons discuter, avancer et nous mettre d'accord sur des diagnostics. Ces dernières années, nous avons eu beaucoup de délibérations, notamment en matière économique.
On m'a interpellé sur la proposition de M. Fillon : la « barémisation » des allègements de charges n'est pas un deal avec le patronat. Je ne puis vous répondre sur ce que nous allons proposer au Premier ministre car le sujet est très complexe, mais aussi très structurant : en fonction des orientations prises, le mode de financement de la sécurité sociale et les principes même de son financement pourraient profondément évoluer. Vous serez nécessairement saisis de ce débat.
J'en viens à la rupture conventionnelle : il est quand même paradoxal que vous critiquiez autant un des accords les plus novateurs qui ait été signé ces dernières années !
Côté patronal, nous sommes partis d'un point A et côté syndical, d'un point B. Ensemble nous sommes parvenus à un point C : il s'agit d'une véritable création ! Bien sûr, il faut faire des évaluations : les abus devront être corrigés mais avec ce dispositif, nous avons pour la première fois dans notre pays introduit de la flexisécurité, ce qui est remarquable.
La maison du dialogue social nous tient à coeur. Dans les années 2000, quand nous avions évoqué la refondation sociale, le lieu choisi avait été le Conseil économique et social afin que ce sujet sensible soit débattu sur un terrain neutre.
Lorsque M. Raffarin parle du CESE, nous applaudissons car nous disposerions de sa logistique. Nous avons besoin de créer ce lieu du dialogue social car il y a des sujets sur lesquels nous n'avons pas le temps de parler. Nous pourrions ainsi évaluer les chiffres des ruptures conventionnelles et débattre à froid de sujets importants, comme la pénibilité, la modernisation des conditions de travail, le financement de la protection sociale. Il faudra bien qu'un jour les partenaires sociaux se penchent sur cette question essentielle.
Sur l'assurance chômage, nous avons voulu aborder la portabilité et le niveau des cotisations en fonction des contrats. On nous a répondu qu'on n'avait pas le temps d'en débattre.
M. Poncelet a parlé économie : durant ces huit dernières années, l'artisanat a créé 100 000 entreprises et 600 000 emplois.
Des sections d'apprentissage en lycées professionnels ferment ? Ce sont celles qui ne correspondent pas aux besoins des entreprises. Dans tous les conseils régionaux, les entreprises demandent des ouvertures de section : l'adéquation entre l'offre et la demande doit s'améliorer.
S'il faut un lieu de dialogue, pourquoi pas le CESE, mais à une condition : qu'on ne lui fasse pas jouer de rôle qui ne soit pas le sien.
Tout à fait.
Le Gouvernement a saisi le Conseil économique et social sur l'harmonisation des Smic : ce sont les partenaires sociaux de la section du travail qui ont trouvé la solution. De même, le plan de cohésion sociale de Jean-Louis Borloo a été préparé durant l'été 2004 au sein du Conseil économique et social par les partenaires sociaux.
Sur la pénibilité, l'UPA a la même approche que celle indiquée par Mme Parisot : les discussions ont achoppé sur le financement.
Pour le dialogue social, le Palais d'Iéna me semble tout à fait approprié, mais ne confondons pas la très belle institution qu'est le CESE, et qui a toute sa raison d'être, avec le dialogue social que nous appelons de nos voeux.
Ne stigmatisons pas la rupture conventionnelle mais ce véhicule est en train d'être utilisé pour contourner la suppression de toutes les formules de cessation anticipée d'activité qui existaient depuis trente ans, ce qui n'est pas neutre, y compris pour le financement de la protection sociale et de l'assurance chômage.
Il y aurait beaucoup à dire sur les directives européennes : je pense en particulier à celle sur les services d'intérêt économique généraux et à celle sur le temps de travail. Nous avons besoin d'une approche de l'Europe un peu plus constructive et objective, y compris de la part des politiques. Nous avons collectivement tendance à dire que c'est à cause de l'Europe si tout va mal.
Il y a des thèmes qui ne figurent pas explicitement dans l'agenda mais que nous abordons : quand nous parlons d'emploi, nous visons bien sûr les jeunes et les seniors. Nous sommes particulièrement actifs sur les problèmes de santé au travail et le rapport de la mission sénatoriale est tout à fait remarquable. Nous en avons d'ailleurs parlé fin novembre avec le patronat. En revanche, Mme Parisot nous a fait remarquer que le Medef pouvait difficilement aborder officiellement la question de l'organisation du travail qui est du ressort du chef d'entreprise. En revanche, parlons de la qualité de vie au travail : il en va d'ailleurs de notre intérêt collectif à tous ! Une meilleure qualité de vie permettrait en effet de réduire le nombre d'arrêts maladie et donc d'alléger les dépenses de santé.
Merci pour vos contributions et tout ce que vous nous avez apporté : comme Mme Parisot l'a suggéré, il faudra nous rencontrer plus souvent.