Intervention de Luc Chatel

Commission des affaires économiques — Réunion du 4 décembre 2007 : 1ère réunion
Audition de M. Luc Chatel secrétaire d'etat auprès de la ministre de l'economie des finances et de l'emploi chargé de la consommation et du tourisme sur le projet de loi n°109 2007-2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs

Luc Chatel, des finances et de l'emploi, chargé de la consommation et du tourisme :

Répondant tout d'abord à M. Gérard Cornu, rapporteur, M. Luc Chatel, après s'être félicité d'avoir pu travailler avec lui « en amont » sur le projet de loi, a notamment apporté les précisions suivantes :

- l'amendement adopté par l'Assemblée nationale pour offrir la possibilité de choix entre la convention unique et un contrat cadre annuel complété par des contrats d'application, selon le système adopté en 2005, a pour objet de permettre une certaine souplesse, et c'est pour cette raison que le Gouvernement a été favorable à son adoption ;

- l'obligation pour les banques de fournir un récapitulatif annuel des frais bancaires n'était prévue par le texte d'origine du projet de loi qu'au bénéfice des consommateurs, personnes physiques n'agissant pas pour des raisons professionnelles. L'Assemblée nationale l'a étendue aux associations, qui ne tiennent pas toujours une comptabilité détaillée leur permettant d'apprécier le montant de ces frais. On pourrait certes songer à l'étendre également à des personnes physiques agissant pour des besoins professionnels mais cela n'aurait pas beaucoup d'utilité pour celles qui sont obligées de tenir une comptabilité : il y aurait donc une nuance à introduire à cet égard ;

- le problème de la durée des contrats de téléphonie mobile est un sujet très important et dont le Parlement doit débattre. L'autorité de régulation aurait été favorable à une norme législative interdisant les contrats de plus de 12 mois. Aujourd'hui, sur 53 millions d'abonnés, 75 % ont un forfait, assorti dans les deux tiers des cas d'une durée minimale d'engagement. Une telle formule était à l'origine à l'avantage des consommateurs, auxquels le mobile était offert en contrepartie. Aujourd'hui, on peut s'interroger sur ce système, sachant que les opérateurs virtuels, les MVNO (mobile virtual network operators), qui sont une quinzaine, attirent 28 % des nouveaux abonnements mais ne représentent que 2,8 % du marché : ils risquent de mettre très longtemps, avec une durée minimale d'engagement de 24 mois, pour élargir leur part de marché. Le compromis trouvé à l'Assemblée nationale n'est pas entièrement satisfaisant dans la mesure où, en cas de rupture du contrat à compter du treizième mois, le montant du dédit n'est pas plafonné. Il faut donc voir comment le faire évoluer, sachant aussi qu'une durée d'engagement limitée à 12 mois pourrait être contre-productive si elle entraînait une hausse du coût des forfaits.

Le ministre a ensuite souligné, en réponse à Mme Odette Terrade, que si les dépenses des consommateurs concernées par le projet de loi, comme les dépenses alimentaires ou les dépenses non alimentaires dans la grande consommation, ont un poids apparemment limité dans le budget des ménages (environ 14 %), elles ont une grande importance symbolique. Quant aux dépenses de téléphonie, elles représentent par an, pour une famille de quatre personnes, une somme de l'ordre de 950 euros. Il faut donc pouvoir faire baisser les prix. Sur le peu d'empressement des grandes surfaces à baisser leurs marges, M. Luc Chatel a rappelé qu'avant 2005, on observait fréquemment qu'il n'y avait plus de concurrence et que toutes les enseignes d'un même bassin de chalandise pratiquaient les mêmes prix : la loi « Dutreil » a redonné la possibilité de « faire du commerce » en réintégrant dans les prix une partie des avantages commerciaux obtenus. Indiquant que, comme l'avait annoncé le Président de la République, il faudrait aller plus loin, il a évoqué la « négociabilité », c'est-à-dire la possibilité de négocier les conditions générales de vente et les tarifs. Notant cependant qu'il convenait d'étudier l'impact d'une telle mesure, il a indiqué qu'une mission en ce sens avait été confiée à Mme Marie-Dominique Hagelsteen, conseillère d'Etat, ancienne présidente du Conseil de la concurrence. Il faudra également aborder, dans le cadre de la loi sur la modernisation de l'économie, d'autres sujets, tels l'équipement commercial ou les délais de paiement, évoqués par M. Gérard Bailly. M. Luc Chatel a souligné que le Gouvernement entendait agir parallèlement dans deux directions : d'une part, sur les salaires en proposant aux Français de travailler davantage pour gagner davantage -et ce sont en particulier les salariés les moins favorisés, les ouvriers ou les jeunes, qui pourront bénéficier du nouveau régime des heures supplémentaires-, en engageant le projet de « conditionnalité » des réductions de charges et en permettant de monétiser les jours de RTT, d'autre part, sur les prix, y compris celui du logement avec l'indexation des loyers sur les prix à la consommation, la suppression des cautions et la réduction de la garantie.

En réponse à M. Gérard Bailly, M. Luc Chatel a rappelé que les règles relatives à l'étiquetage étaient d'origine communautaire et qu'il avait évoqué la possibilité de les faire évoluer avec la commissaire chargée de la consommation, Mme Meglena Kuneva, pour tenir compte de certaines situations. En ce qui concerne les délais de paiement, ce sujet pourrait être traité dans le cadre de la négociabilité des conditions générales de vente, mais il faudra dans ce domaine aussi être attentif aux conséquences possibles des mesures qui pourraient être prises : ainsi, imposer la règle des 30 jours, ce qui pourrait être tentant, sans se limiter aux PME, bénéficierait surtout à la trésorerie de grandes multinationales. Le ministre a également observé qu'en dépit des progrès de l'automatisation, la grande distribution continuait à créer des emplois -3.000 l'année dernière-, même si elle en crée moins que le commerce d'artisanat.

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