Quoique trois articles seulement du projet de loi organique aient été votés conformes, nous nous retrouvons sur de nombreux points de convergence, ainsi des incompatibilités, de la saisine ou du pouvoir du Défenseur des droits. Quelques améliorations rédactionnelles ou précisions sont bienvenues. De même, l'intégration de la Halde est confirmée.
Il reste néanmoins des points de divergence. Sur le champ de compétences, d'abord, l'Assemblée nationale a ajouté, avec le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, une cinquième institution que nous n'avions pas souhaité intégrer au Défenseur des droits - j'y reviendrai.
Il y a des divergences non négligeables sur l'organisation interne, le rôle des adjoints et des collèges. Avec la rédaction de l'Assemblée nationale, le Défenseur des droits risquerait de devenir un dictateur des droits ayant tous les pouvoirs. Or l'institution demande un minimum de collégialité : associer les collèges aux décisions empêchera qu'elles soient contestées.
L'accord est assez vaste sur l'équilibre général, sur le statut du défenseur, ses moyens d'information, l'audition des personnes et les vérifications sur place. Nous sommes en phase sur la place des délégués au niveau local. En revanche, l'extension au Contrôleur des lieux de privation de liberté est matériellement impossible. Cette institution est jeune : M. Delarue, qui exerce son mandat depuis un peu plus de deux ans, l'achèvera en 2014. L'Assemblée nationale a prévu à cette date une intégration au Défenseur des droits, mais quelle portée aurait son action pour les trois années qui restent ? Comment, d'ailleurs, intégrer une institution qui n'intervient pas à titre principal sur saisine des personnes lésées dans leurs droits et dont la mission n'est pas seulement de défense des libertés individuelles, mais de contrôle et de prévention, une mission organisationnelle ? Le Médiateur, qui assure déjà un contrôle interne, n'intervient pas dans l'organisation pénale. Après avoir entendu M. Delarue, je pense qu'il est souhaitable qu'il termine son mandat et que l'on ne grève pas l'avenir. La question se posera en 2014. Je proposerai donc des amendements supprimant l'intégration du Contrôleur.
Nous préférons le texte du Sénat sur les rapports avec les autorités indépendantes chargées de la protection des droits et libertés, telles que la CNIL et la CADA. Ne compliquons pas les choses et évitons que le Défenseur des droits intervienne dans les différends entre les collectivités et les établissements publics : ce serait un dérapage.
Nous avons été amenés à repenser la composition des collèges. La méfiance de l'Assemblée nationale à l'égard des parlementaires n'est pas justifiée, comme on l'a vu avec la CNDS. Le Conseil économique social et environnemental représente la société ; les députés ont supprimé la désignation de membres des collèges par son président, alors que nous venons de réformer cette institution où siègent les syndicats et associations. Nous avons donc revu et allégé la composition des collèges, mais il n'y a pas là-dessus de désaccord fondamental.
L'Assemblée nationale a supprimé le rôle des adjoints dans les collèges. Or le Défenseur des droits ne peut être simultanément présent dans tous les collèges. Puisque l'adjoint est appelé à le suppléer, nous proposons qu'il ait en ce cas voix délibérative, et que le reste du temps, il siège avec voix consultative.
Il faudra interroger le ministre sur un problème qui ne relève pas directement du texte. Les quatre institutions ont chacune leurs locaux, loués à des prix extravagants en vertu de baux aux clauses léonines. Même si une telle situation est plaidable, elle pose le problème du courrier : à qui l'adresser ? Le Médiateur, lui, a prévu des locaux qui pourraient accueillir tout le monde.
L'Assemblée nationale a supprimé l'audition des adjoints par les commissions compétentes des deux chambres. Bien que nous n'ayons pas prévu de vote à une majorité qualifiée, une telle procédure est susceptible de conférer une autorité au Défenseur des droits et à ses adjoints. L'Assemblée ayant retenu une nomination par le Premier ministre sur proposition du Défenseur des droits sans avis des commissions, je vous proposerai de rétablir le mécanisme que nous avions retenu.
L'Assemblée nationale a décidé que le texte entrerait en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa promulgation, ce qui est trop bref pour tout faire. Non seulement je proposerai un délai de trois mois, mais au cas où le Défenseur des droits ne serait pas nommé dans les délais, il convient de proroger de quelques jours la mission de l'actuel Médiateur.
L'Assemblée nationale a mis en place une procédure d'action collective dans le domaine du droit administratif. Depuis l'arrêt sur l'égalité des droits entre hommes et femmes dans le calcul de leur retraite, plusieurs centaines de recours ont été déposées au Conseil d'Etat. Celui-ci a donc souhaité un regroupement des actions pour ce type de contentieux, et un amendement a été soufflé au rapporteur de l'Assemblée nationale. Cependant, ce n'est pas au Défenseur des droits qu'il revient d'assumer une mission qui constitue un transfert de charges. La requête collective appartient beaucoup plus aux syndicats ou aux associations.