Intervention de Thierry Repentin

Commission des affaires économiques — Réunion du 28 novembre 2006 : 1ère réunion
Pjlf pour 2007 — Mission « ville et logement » - examen du rapport pour avis

Photo de Thierry RepentinThierry Repentin, rapporteur pour avis :

Présentant ensuite les deux programmes de la mission « Ville et logement » relatifs à la politique du logement, M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que les crédits consacrés à cette politique représentaient, dans le projet de loi de finances pour 2007, un peu plus de 84 % des 7,3 milliards d'euros d'autorisations d'engagement affectées à la mission. Ces moyens budgétaires se répartissent entre deux programmes qui concernent respectivement les aides à la personne, avec le programme « Aide à l'accès au logement », et les aides à la pierre, avec le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

Il a ensuite évoqué le contexte général du financement de la politique du logement, en mettant en avant deux faits marquants :

- le remplacement progressif des moyens budgétaires de soutien à la politique du logement par des aides fiscales. Ainsi, les dépenses fiscales associées au programme « Développement et amélioration de l'offre » constituent une masse financière dix fois supérieure au montant des crédits budgétaires consacrés à ce programme ;

- la très nette tendance à la hausse observée pour les aides des collectivités territoriales en faveur du logement, qui sont passées de 398 millions d'euros en 2001 à 749 millions d'euros en 2004, dernière année pour laquelle le chiffre est connu, soit un quasi-doublement en quatre ans.

Puis le rapporteur pour avis a souligné que la dotation budgétaire destinée à financer le fonds national d'aide au logement (FNAL), qui assure le paiement de l'aide personnalisée au logement (APL) et de l'aide au logement social (ALS) était en recul de 3,8 %. En effet, le Gouvernement table sur un ralentissement des versements de prestations au cours de l'année 2007 en raison :

- de l'entrée en vigueur de l'indice de référence des loyers à la place de l'indice du coût de la construction, qui a permis de modérer les évolutions des loyers ;

- d'une réduction du chômage qui permet d'accroître la masse salariale, sur laquelle repose la majorité du financement des aides et qui réduit le volume de certaines prestations, comme l'aide majorée en cas de perte d'emploi.

Par ailleurs, M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, a expliqué que l'équilibre financier du budget du FNAL était également assuré par d'autres évolutions budgétaires comme l'affectation d'une partie de la taxe sur les tabacs ou celle d'une partie du prélèvement effectué sur les fonds propres des sociétés anonymes de crédit immobilier (SACI), et a jugé curieux que ce prélèvement, qui constitue une source de financement non reconductible, finance des dépenses courantes.

Il a ensuite indiqué que l'article 62 du projet de loi de finances pour 2007 proposait d'assujettir l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs à une cotisation sur leur masse salariale, aujourd'hui payée par les seuls employeurs privés disposant de plus de 20 salariés, afin de dégager 236 millions d'euros au profit du FNAL. Il a fait part de son désaccord avec cette mesure en relevant que ce dispositif entraînerait un transfert d'une partie du financement des aides à la personne de l'Etat vers les collectivités territoriales, pour un montant de 65 millions d'euros, alors que les collectivités territoriales ne sont pas compétentes en la matière.

Puis le rapporteur pour avis a noté qu'une actualisation de d'1,8 % du barème des aides au logement serait effectuée au 1er janvier 2007, mais qu'aucune revalorisation n'avait été effectuée en 2006. Relevant que les hausses des années précédentes avaient été insuffisantes pour compenser l'augmentation des loyers et des charges, il a jugé que cette évolution ne permettrait pas de diminuer le taux d'effort des ménages et a réaffirmé la nécessité d'inscrire dans la loi le principe selon lequel les évolutions des aides à la personne doivent être indexées sur les variations de l'indice de référence des loyers, ou, à défaut, sur celles de l'inflation. Il a enfin déclaré attendre que le Gouvernement, conformément à ses engagements, dépose un amendement afin de ramener de 24 à 15 euros le seuil mensuel en deçà duquel l'aide personnalisée au logement n'est pas versée.

a ensuite relevé qu'en matière de développement de l'offre locative sociale le bilan de l'année écoulée était plutôt positif, dans la mesure où près de 95 000 logements sociaux devraient être financés en 2006, après une année 2005 au cours de laquelle ce chiffre s'était élevé à 81 000. Tout en soulignant que pour 2007 l'objectif était fixé à 100.000 nouvelles réalisations, il a noté qu'en matière de financement de ces opérations le budget des SACI avait également été sollicité, pour un montant de 250 millions d'euros, afin de rembourser une partie de la dette des organismes HLM. Pour cette raison, les crédits budgétaires en faveur de la construction locative sociale dans le PLF 2007 seront inférieurs aux montants prévus dans la loi de programmation pour la cohésion sociale.

Il a indiqué que, par ailleurs, l'équilibre financier des opérations locatives sociales serait fragilisé en raison de la hausse du taux du Livret A de 2,25 à 2,75 % et de la stabilité du montant de la subvention budgétaire par logement social construit, ce qui risquera de se traduire par une sollicitation plus importante des finances des collectivités territoriales pour équilibrer ces opérations.

Puis le rapporteur pour avis a attiré l'attention des membres de la commission sur la question de la banalisation de la distribution du Livret A. Après avoir rappelé que plusieurs établissements bancaires français et étranger s'étaient regroupés pour déposer une plainte devant la Commission européenne afin d'obtenir le droit de distribuer le Livret A, qui est aujourd'hui l'exclusivité de La Poste et des Caisses d'épargne, il a souligné qu'il s'agissait d'un produit d'épargne très populaire, près de 46 millions de Français en étant titulaires. Il a cependant noté que l'encours du Livret A, qui pèse près de 113 milliards d'euros, ne représentait que 4 % de l'épargne totale des Français.

a ensuite expliqué que ce système reposait sur une centralisation de ces fonds au sein de la Caisse des dépôts et consignations, qui utilise ces sommes pour effectuer les prêts aux organismes HLM et qu'il constituait, de ce fait, l'outil de financement du logement social. En effet, près de 80 milliards d'euros sont utilisés pour ces prêts, le solde étant placé pour dégager un résultat d'exploitation positif, puisque le coût de gestion de la ressource est supérieur au taux d'intérêt des prêts accordés aux organismes HLM. Le rapporteur pour avis a donc souligné que ce dispositif était particulièrement efficace dans la mesure où il permettait de transformer une épargne liquide, les titulaires du Livret A disposant librement de leurs fonds, en prêts à très longues durées s'étalant entre 30 et 50 ans.

Puis il a fait valoir que le Livret A constituait le seul outil bancaire à la disposition d'un grand nombre de ménages modestes, La Poste et les Caisses d'épargne étant tenues d'accéder à toute demande d'ouverture d'un livret à la condition que le demandeur n'en soit pas déjà titulaire. Ainsi pour cette clientèle, ce sont plusieurs centaines d'opérations qui sont effectuées aux guichets chaque année, pour des encours parfois inférieurs à 150 euros. La commission de gestion que touchent les deux établissements collecteurs est donc calculée afin d'opérer une péréquation entre ces petits livrets coûteux et les livrets avec un encours important, dont la gestion est peu onéreuse.

a donc jugé que d'autres réseaux bancaires souhaitaient vraisemblablement distribuer le Livret A afin de drainer une partie de la clientèle disposant déjà d'un fort encours sur leur livret. Il a estimé qu'une banalisation de la distribution risquait de déstabiliser le système, dans la mesure où La Poste et les Caisses d'épargne conserveraient les livrets dotés d'un encours modique, mais présentant des coûts de gestion importants. Surtout, il a considéré qu'une telle évolution pourrait menacer le mode de financement du logement social dans le cas où les nouveaux opérateurs bancaires seraient tentés de conseiller à leurs clients de réorienter progressivement leur épargne vers d'autres produits, ce qui pourrait diminuer l'encours d'épargne en faveur du logement social. Il a également ajouté qu'avec 46 millions de titulaires, les marges de développement de ce produit étaient limitées.

Le rapporteur pour avis a, en conclusion, émis le souhait que la Commission européenne soit sensible aux deux arguments d'intérêt général, soutenus par le Gouvernement français et le Président de la République, à savoir le financement du logement social et l'accès de tous aux services bancaires, justifiant le maintien du duopole de distribution.

a achevé sa présentation par un rappel de l'évolution du budget de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) en précisant que ce dernier était en évolution positive cette année, tout en notant que ces crédits étaient légèrement inférieurs aux montants prévus dans la loi de programmation pour la cohésion sociale. Sur ce sujet, il a déclaré indispensable d'examiner les conditions dans lesquelles les crédits de l'ANAH sont gérés dans le cadre des délégations des aides à la pierre aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et aux départements pour limiter les masses financières non engagées à la fin de chaque année.

Enfin, sur l'accession à la propriété, il a indiqué que le nouveau prêt à taux zéro (PTZ) continuait son développement, compte tenu de son élargissement plus net aux acquisitions de logements anciens et de la hausse des plafonds de ressources pris en compte. Il a rappelé qu'il avait critiqué cette évolution l'an dernier en considérant qu'il s'agissait d'une conception extensive de la notion de classe moyenne. Ainsi, un peu plus de 200 000 PTZ ont été émis en 2005 et ce chiffre devrait s'élever à 250 000 en 2006. Il a souligné que le coût du PTZ, compte tenu de sa réforme, était élevé puisqu'il représentait près de 770 millions d'euros de dépenses fiscales en 2007 et augmenterait jusqu'à 1,4 milliard d'euros en 2009.

En conclusion, M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis, tout en reconnaissant un certain nombre d'évolutions positives, a considéré que la politique en matière d'aides à la personne, notamment pour les plus modestes, était loin d'être satisfaisante et a rappelé ne pas souscrire au dispositif tendant à assujettir les collectivités territoriales à un prélèvement nouveau de 0,2 % de leur masse salariale afin de les faire participer au financement des aides à la personne. Il a par ailleurs souligné que les dépenses fiscales importantes consacrées à des actions telles que l'amortissement « Robien » ou le « Borloo populaire » ne lui semblaient pas être très judicieuses. Pour ces raisons, il a donc appelé la commission à rejeter les crédits consacrés à la politique du logement.

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