Intervention de Denis Ranque

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 25 janvier 2005 : 2ème réunion
Audition de M. Denis Ranque président-directeur général de thales

Denis Ranque, Président-directeur général de Thales :

a tout d'abord présenté le bilan de sa société pour l'année 2005 : elle a été marquée par un chiffre d'affaires de 10 milliards d'euros dont 7 milliards réalisés dans le domaine de la défense. La France concourt à la moitié de la production de la société et en consomme un tiers pour un total de 3 milliards d'euros.

a souligné que cette année 2005 avait été également marquée par un niveau élevé de prises de commande, d'un montant de 12 milliards d'euros. Ces commandes découlent d'abord du déroulement de trois grands programmes : les FREMM (Frégates européennes multimissions), réalisées en partenariat avec Armaris, l'achat de six sous-marins SCORPENE par l'Inde, et la commande du programme Watchkeeper pour 1 milliard d'euros par la Grande-Bretagne. M. Denis Ranque a précisé que ce programme avait été remporté par sa société à l'issue d'une large compétition et au terme d'un processus original qui avait conduit le client, en l'occurrence l'armée britannique, à décrire une demande capacitaire en laissant à l'industriel le soin de construire un système d'armement de nature à la satisfaire. Le budget de ce programme sera affecté, pour les deux tiers, au système sol et, pour un tiers, à la partie aéroportée (plate-forme elle-même et senseurs embarqués).

s'est également félicité que les programmes de petite et moyenne taille aient crû de 20 % durant l'année écoulée, pour une somme passant de 9 milliards d'euros en 2004 à 10 milliards d'euros en 2005.

La réalisation de nombreux équipements, a-t-il constaté, s'est également déroulée en 2005, avec, notamment, la qualification du missile Aster et l'arrivée du standard F2 du Rafale, qui a bénéficié des expériences du standard F1 affecté à la marine. Evoquant l'échec intervenu dans l'exportation de cet avion à Singapour, M. Denis Ranque a évoqué des raisons à la fois politiques et financières découlant du rapport défavorable entre l'euro et le dollar. Les autres grands programmes tiennent au lancement du satellite Syracuse III, à la livraison à la marine du MINREM Dupuy-de-Lôme, bâtiment d'écoutes électromagnétiques, et à la remise de la dernière frégate Sawari à l'Arabie saoudite.

Cette nouvelle progression des résultats opérationnels s'est accompagnée de la fin de l'endettement de Thales et a conduit la taille de la société ainsi que ses profits à doubler en huit ans.

a mentionné qu'en 2005, Thales avait vendu sa branche qui fournissait des plates-formes pour les services de télévision ainsi que ses composants optiques pour se dégager de productions qui ne sont plus stratégiques pour la société. En revanche, Thales a signé avec l'Etat une déclaration commune d'intention relative au regroupement, au sein de DCN, de ses activités navales françaises et à la prise de participation de Thales dans le capital de DCN à hauteur de 25 %. Ce rapprochement devrait être finalisé durant le premier semestre 2006. Cet achat, a-t-il observé, a un double but, stratégique et managérial : il s'agit de réunir deux sociétés pour acquérir une maîtrise d'oeuvre française dans le domaine de la construction navale militaire et de faire évoluer DCN vers de meilleures capacités commerciales. M. Denis Ranque a estimé que beaucoup avait déjà été fait en ce sens, comme en témoignent les contrats en cours avec l'Italie, l'Inde et la Malaisie. L'activité à venir sera marquée par le début des études portant sur le deuxième porte-avions ainsi que sur le nouveau sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda. Ces projets démontrent que DCN constitue un outil stratégique car participant à la composante nucléaire maritime et industrielle.

En revanche, s'agissant de l'achat de la société allemande Atlas Elektronik, filiale à 100 % de BAE Systems, le gouvernement allemand a préféré que le consortium Thyssen Krupp en fasse l'acquisition. C'est une occasion manquée pour l'industrie navale européenne.

Puis M. Denis Ranque a évoqué les crédits affectés à la recherche et au développement, se félicitant d'un regain des commandes d'études amont qui se sont élevées à 200 millions d'euros en 2003, année de rattrapage, puis à 120 millions d'euros en 2004 et 130 millions en 2005. M. Denis Ranque a estimé qu'il s'agissait là d'un effort qui était nécessaire à l'entreprise et qu'il convenait de le pérenniser. Ces commandes ont porté sur le démonstrateur BOA (Bulle opérationnelle aéroterrestre), développé en coopération avec Sagem Défense Sécurité et GIAT Industries, ainsi que sur le démonstrateur SPECTRE, système de protection de zones sur le champs de bataille visant à pallier l'interdiction des mines anti-personnel. La poursuite du projet de deuxième porte-avions, marquée par la signature, la veille, du protocole de coopération entre les ministres de la défense français et britannique, visera à l'interopérabilité entre les deux nations et à la réalisation d'économies d'échelle.

Le projet de sous-marin Barracuda sera, quant à lui, axé sur la permanence de nos capacités sous-marines.

Evoquant ensuite les drones, M. Denis Ranque a souligné que ces engins n'avaient pas d'intérêt en eux-mêmes et que seules leurs capacités d'emploi présentaient des atouts. Il a rappelé que Thales UK est en charge, depuis août 2005 (notification du contrat global de développement et d'acquisition), d'un programme destiné à couvrir les besoins de reconnaissance au sol de l'armée de terre britannique, projet qui pourrait également intéresser l'armée française. Le programme Watchkeeper utilisera une plateforme achetée à la société israélienne Elbit dont le savoir-faire sera transféré en Grande-Bretagne, ce qui assurera une permanence de l'approvisionnement. La plate-forme proprement dite représentera environ un dixième de la valeur totale du système qui a été élaboré à partir d'une demande capacitaire formulée par l'armée britannique. M. Denis Ranque a fait valoir que les besoins français en matière de reconnaissance aérienne pourraient être assurés par le système tactique Watchkeeper dont les évolutions permettront de fournir 70 % des capacités d'EuroMALE pour 30 % de son coût, combiné avec l'engagement pris par la France, dans le programme de l'OTAN AGS (Alliance Ground Surveillance) en matière de surveillance stratégique. Cette combinaison pourrait présenter, pour un coût inférieur, une alternative fonctionnelle beaucoup plus intéressante aux projets de drones de reconnaissance, à l'étude en France. Il a précisé que la maîtrise d'oeuvre de Watchkeeper était assurée par Thales UK, avec une sous-traitance d'environ 30 % du total à une entreprise conjointe, associant à égalité Thales à Elbit, pour européaniser les droits de propriété industrielle et les dessins de la plateforme. En cas d'exportation vers la France, les adaptations nécessaires du système (transmission de données, traitement d'images, intégration dans les chaînes de commandement, etc...) seraient naturellement réalisées par Thales France.

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