Au contraire : cela signifie qu'il y a moins d'enfants mais plus d'adultes dans les établissements !
Pourtant, malgré l'effort financier indéniable, de 15 % à 20 % des élèves franchissent les portes du collège sans maîtriser la lecture d'un texte.
Dans l'enceinte des établissements scolaires, se multiplient les délits, actes de violence, insultes, difficiles cependant à chiffrer réellement parce que souvent classés comme de banales incivilités.
Nous venons d'apprendre que 32 000 professeurs, pourtant payés, ne sont pas utilisés pour enseigner. Le coût budgétaire est de 1, 5 milliard d'euros ! Il n'y a donc toujours pas assez de transparence, monsieur le ministre, dans la gestion du personnel de l'éducation nationale. C'était pourtant, en 1999 déjà, une des conclusions de la commission d'enquête mise en place par le Sénat et que présidait notre collègue Adrien Gouteyron.
Je vous livre, mes chers collègues, tous ces chiffres « en vrac » et sans analyse précise, mais ils sont incontestables. Nous ne pouvons les écarter d'un revers de la main.
Toutes ces insuffisances appellent la réforme, et il me faut vous donner acte, monsieur le ministre, de l'avoir entreprise. C'est d'ailleurs ce qu'avait bien compris M. Allègre, l'un de vos prédécesseurs, mais les mêmes groupes et les mêmes réseaux que ceux qui se déchaînent aujourd'hui contre votre projet l'avaient empêché d'agir.
Il fallait réagir, non pas en donnant encore plus de moyens, comme le réclament des syndicalistes sourds et aveugles face aux chiffres que je viens d'énoncer, insensibles aux difficultés budgétaires de notre pays, mais en tentant de réformer, en définissant les grands objectifs du système éducatif, de la maternelle à la classe de terminale, pour les quinze années à venir.
Les progrès de l'école ne se feront pas grâce à l'adjonction de nouveaux moyens. L'urgence est non pas de donner toujours plus, mais d'utiliser autrement et mieux le potentiel de moyens et de compétences de l'éducation nationale.
Le malaise des élèves et des enseignants est plus diffus, plus profond que les slogans affichés sur les pancartes.
Les lycéens redoutent l'avenir : avec ou sans diplôme, ils craignent de ne pouvoir s'intégrer dans notre société et de ne pas trouver leur place dans la vie professionnelle.
Les enseignants n'ont pas l'impression d'être reconnus par la République et doutent de leur mission. Ils doivent, plus que jamais, être respectés, dans la société, dans leur hiérarchie ; ils doivent être confortés dans leur légitimité. Il faut redéfinir leurs missions et leur rendre leur fierté ; ils le méritent.
Je rejoins les conclusions de la commission Thélot, qui voudrait que « la réussite de tous les élèves repose, au-delà de leurs efforts et de leur travail scolaire, sur des personnels confiants, convaincus, reconnus et qui travaillent autrement ».
Le Président de la République a souhaité qu'un grand débat ait lieu, qu'une consultation nationale puisse être organisée. Cela a été fait, et souvent bien. Un million de personnes ont été mobilisées.
Il est vrai, monsieur le ministre, que la synthèse de ce travail n'engageait pas le Gouvernement, comme vous l'avez déclaré à plusieurs reprises, mais j'aurais aimé que, profitant du consensus qui s'était dégagé, vous repreniez un plus grand nombre de propositions de la commission nationale du débat sur l'avenir de l'école. J'aurais aimé, et c'est un sentiment partagé par mon groupe, que vos bonnes propositions soient plus audacieuses en de nombreux domaines
Le temps me manque pour énoncer tout ce que nous aurions aimé voir dans votre texte pour améliorer plus durablement le service public de l'éducation.
Je pense à l'accroissement de l'autonomie des établissements en termes de marges de manoeuvre financières et pédagogiques, à l'accroissement de la capacité d'action de l'équipe de direction ; je pense aussi aux propositions concernant l'école primaire et visant à transformer les établissements en établissements disposant d'un statut propre.
Je pense aussi aux propositions visant à transformer les écoles primaires en établissements disposant d'un statut propre.
Le brevet des collèges sera rénové ; qui pourrait s'en plaindre ? Il aurait néanmoins été souhaitable de considérer que, dans le collège, maillon faible de notre système éducatif, il n'est plus possible de dispenser à des classes hétérogènes un enseignement laissant de côté tous ceux qui, à ce niveau, présentent de lourds déficits.
Ce texte était aussi peut-être l'occasion, monsieur le ministre, de dire que le goût du travail, l'effort d'entreprendre, l'évaluation, la sanction de l'absence de travail sont incontournables dans la formation d'un citoyen.
J'aurais aimé, par ailleurs, que vous redéfinissiez mieux les missions des enseignants, s'agissant de l'accompagnement des élèves en difficulté, parfois menacés d'illettrisme, donc d'échec scolaire, du suivi individualisé, des relations avec les parents, du travail en équipe et de la concertation. Est-il concevable que les parents de ces élèves, parents aisés bien sûr, soient contraints de se tourner vers le marché florissant du soutien scolaire ? Est-il concevable que l'Etat, par le biais d'un avantage fiscal, finance indirectement les insuffisances de l'école ?
Le coeur de ce texte repose sur l'idée d'un socle commun, sur un ensemble de connaissances et de compétences indispensables. C'est, de mon point de vue, un élément très positif de la loi. Le recentrage de l'école primaire sur un nombre réduit de savoirs fondamentaux doit permettre à l'école de retrouver sa fonction essentielle : apprendre à parler, à écrire, à compter et à vivre ensemble.
Il est bon de rappeler que tel était déjà le souci de Lionel Jospin, ministre de l'éducation nationale en 1989, puisque la loi d'orientation sur l'éducation du l0 juillet 1989 précisait ceci : « la maîtrise de la langue française fait partie des objectifs fondamentaux de l'enseignement ». Tel était aussi le souci de Claude Allègre qui affirmait : « Transmettre la langue nationale est la priorité absolue. Se sentir chez soi dans la langue française est indispensable pour accéder à tous les savoirs ; ce que l'école doit d'abord à tous ses enfants, ce sont les apprentissages fondamentaux : lire, écrire, compter. » C'était également le souci de Jack Lang qui déclarait, le 20 juin 2000 : « quelle que soit la valeur de l'école, on ne peut se résigner à voir 10 % à 15 % d'élèves en situation d'échec scolaire. »