Après avoir rappelé que ce projet de loi organique et ce projet de loi ordinaire constituaient les premiers textes d'application de la réforme des institutions adoptée en juillet 2008, M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, a précisé que ces textes concernaient, d'une part, la révision de la carte des circonscription d'élection des députés, et, d'autre part, le remplacement temporaire au Parlement des parlementaires devenus ministres.
Il a rappelé que ces textes, qui mettent en oeuvre l'article 25 de la Constitution, avaient été adoptés par l'Assemblée nationale le 20 novembre 2008, le projet de loi organique ayant fait l'objet de sept amendements et le projet de loi ordinaire, de quinze amendements.
faisant référence à la tradition parlementaire qui consiste, pour une assemblée, à ne pas s'immiscer dans les questions ne concernant que l'autre assemblée, a relevé que l'essentiel de ces deux textes ne s'appliquait qu'à l'élection des députés.
Il a rappelé que l'article 1er du projet de loi organique complétait l'article L.O. 119 du code électoral en fixant à 577 le nombre de députés, respectant le plafond figurant désormais dans la Constitution et correspondant à l'effectif de l'Assemblée nationale depuis 1985.
Il a ensuite expliqué que la plupart des dispositions du projet de loi ordinaire visent à adapter la carte des circonscriptions législatives aux évolutions démographiques, ces circonscriptions ayant été définies en 1986 sur la base d'un recensement de la population effectué en 1982.
Il a observé qu'il n'était plus possible de reporter cette réforme, compte tenu des observations du Conseil constitutionnel et de la multiplication des recours des citoyens auprès de cette juridiction. Toutefois, il a insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'élaborer une nouvelle carte électorale, mais bien de se limiter aux ajustements nécessités par l'évolution de la population depuis 1982.
a ensuite rappelé que le projet de loi ordinaire avait également pour objet de créer des sièges de députés élus par les Français de l'étranger, conformément à la nouvelle rédaction de l'article 24 de la Constitution.
Il a indiqué que le Gouvernement avait choisi, pour l'élection de ces nouveaux députés, le mode de scrutin majoritaire uninominal à deux tours, estimant que ce système devrait mieux permettre aux Français de l'étranger d'identifier le député qu'ils élisent alors que la représentation proportionnelle n'aurait pas permis ce lien direct entre les électeurs et leur représentant.
Pour tenir compte des difficultés que soulèvera l'organisation à l'étranger d'une élection au scrutin majoritaire à deux tours, le secrétaire d'Etat a précisé que le Gouvernement sollicitait l'habilitation du Parlement à procéder par ordonnances aux adaptations nécessaires des dispositions législatives du code électoral.
a ainsi précisé qu'en l'absence d'un recensement exhaustif du nombre des Français installés à l'étranger, le nombre des nouveaux députés serait déterminé à partir du nombre de Français immatriculés dans nos consulats, soit environ 1,4 million de personnes. Il a toutefois souligné que ce chiffre ferait probablement l'objet d'une révision à la baisse pour tenir compte des personnes qui demeurent inscrites dans une commune française pour les élections présidentielles et législatives et qui souhaitent pouvoir continuer à voter sur le territoire national.
Rappelant que le nombre de sénateurs représentant les Français de l'étranger est aujourd'hui de douze, il a indiqué que le nombre de députés élus par ces derniers établis hors de France s'établirait au total à huit ou neuf.
Il a ensuite observé que la nouvelle répartition des sièges entre les départements, les collectivités d'outre-mer et les Français de l'étranger serait définie par voie d'ordonnance qui feraient l'objet d'une publication dans le délai d'un an. Il a fait observer que le Gouvernement avait tenu à inscrire, dans le texte même du projet de loi d'habilitation ou dans son exposé des motifs, les critères selon lesquels cette délimitation serait opérée. Il a fait valoir que ces critères correspondaient à ceux retenus en 1986, qui avaient reçu alors l'approbation du Conseil constitutionnel.
Ainsi, M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, a tout d'abord confirmé le maintien de la règle traditionnelle assurant à tout département un minimum de deux députés, notant que cette règle permettait une représentation diversifiée de chaque territoire et paraissait être la plus adaptée au scrutin uninominal.
Il a rappelé que cette règle avait été introduite au début de la IIIème République et conservée lors du passage au scrutin proportionnel en 1985 avec l'approbation de tous les groupes politiques, l'application de cette règle à la réforme en cours s'avèrerait favorable à deux départements (la Lozère et la Creuse), contre quatre en 1986.
En revanche, il a indiqué que la règle du minimum d'un député par collectivité d'outre-mer, qui figurait dans le projet du Gouvernement, n'avait pas été acceptée par l'Assemblée nationale, celle-ci s'étant déclarée défavorable à de trop grands écarts de population entre les circonscriptions.
Il a constaté que les députés avaient ainsi manifesté leur refus de créer un siège de député pour chacune des collectivités de Saint-Barthélémy et de Saint-Martin, instituées par la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer. Il a rappelé que les députés n'avaient, à cette occasion, accepté de créer ces deux sièges qu'à la condition de ne les pourvoir qu'en 2012, en s'appuyant sur la prochaine actualisation de la carte des circonscriptions.
Puis il a rappelé qu'au moment de la révision constitutionnelle, lorsque les députés avaient adopté l'amendement du président de leur commission des lois plafonnant leur nombre à 577, et non pas à 579, ils avaient très clairement manifesté leur intention de revenir sur la décision de créer deux sièges de députés pour les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy, et de mettre ainsi un terme à la règle selon laquelle chaque collectivité d'outre-mer a le droit d'être représentée par au moins un député.
a souligné le fait que le Sénat avait, de son coté, adopté une solution totalement différente en fixant le nombre de sénateurs à 348, ce qui inclut les deux sièges de sénateur créés pour ces deux collectivités, et aujourd'hui pourvus.
Il a ensuite indiqué que le Gouvernement entendait conserver la règle de répartition des sièges dite « de la tranche », en vertu de laquelle un siège supplémentaire est attribué automatiquement à chaque département par tranche de population, rappelant que cette règle avait été fixée à un député pour 75.000 habitants en 1885, conservée en 1958, avec une tranche portée à 93.000 habitants, puis portée à 108.000 habitants lors du changement de mode de scrutin en 1985.
Il a estimé qu'à l'occasion de la réforme envisagée, l'actualisation de cette règle devrait, au vu des chiffres provisoires dont dispose le Gouvernement, aboutir à l'élection d'un député supplémentaire par tranche de 125.000 habitants mais que seuls 40 départements (sur 101) seraient concernés par la redéfinition de cette règle, 25 départements perdant un ou plusieurs sièges et 15 autres gagnant un siège.
Il a souligné que le choix de la répartition proportionnelle aurait eu un impact sur un nombre beaucoup plus important de départements : 50 selon le système du plus fort reste (33 départements auraient perdu un ou plusieurs députés et 17 en auraient gagné) ou 60 départements selon le système de la plus forte moyenne (39 départements auraient perdu un ou plusieurs députés et 21 en auraient gagné).
a par la suite affirmé que la réforme envisagée conserverait la règle de l'écart maximal de plus ou moins 20 % entre la population d'une circonscription et la moyenne de la population de chaque circonscription du département concerné, rappelant que cette règle avait été expressément validée par le Conseil constitutionnel en 1986, et estimant que la nécessité de respecter cette règle conduirait très vraisemblablement le Gouvernement à « remodeler » les limites de circonscriptions dans une dizaine de départements. Il a indiqué que ce point pourrait être précisé dans quelques jours, dès que les chiffres du recensement glissant effectué depuis 2004 seraient disponibles.
Il a affirmé que le Gouvernement se conformerait à la règle selon laquelle les circonscriptions doivent être constituées d'un territoire continu et respecter les limites cantonales, indiquant qu'un amendement adopté par les députés précisait les circonstances dans lesquelles il pouvait être fait abstraction de ces limites, notamment dans le cas de cantons de plus de 40.000 habitants et pour réunifier des communes de moins de 5.000 habitants.
Il a indiqué que les nouvelles circonscriptions destinées à élire les députés désignés par les Français établis hors de France devraient intégrer, sauf exception, les circonscriptions existant aujourd'hui pour l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.
Il a fait observer que les députés avaient précisé les adaptations pouvant être apportées, pour des motifs d'intérêt général, à la prise en compte du seul critère démographique. Il a indiqué que par un amendement de M. René Dosière adopté à l'unanimité, les députés avaient considéré que pouvait figurer parmi ces motifs « l'évolution respective de la population et des électeurs inscrits sur les listes électorales », souhaitant par là prendre en considération la situation démographique tout à fait particulière de Mayotte et, dans une moindre mesure, celle de la Guyane.
a souligné que l'ensemble de ces opérations de révision de la carte électorale (modification de la répartition des sièges, fixation du nombre de députés représentant les Français de l'étranger, création de nouvelles circonscriptions et ajustement des circonscriptions existantes) seraient soumises à une commission indépendante, avant d'être examinées par le Conseil d'Etat. Il a rappelé que cette commission, dont la création est prévue par le nouvel article 25 de la Constitution, serait consultée à la fois sur les projets de textes et les propositions de loi « délimitant les circonscriptions pour l'élection des députés ou modifiant la répartition des sièges de députés ou de sénateurs » et qu'elle serait donc saisie, non seulement des futures ordonnances sur l'élection des députés, mais aussi, à l'avenir, de tout texte, d'origine gouvernementale ou parlementaire, ayant pour objet de modifier la répartition des sièges de sénateurs.
Il a précisé que cette commission serait composée, d'une part, de trois magistrats issus du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, élus par leurs pairs, et, d'autre part, de trois personnalités désignées respectivement par le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat.
Insistant sur le caractère pluraliste de cette commission, il a souligné que ces trois dernières personnalités ne pourraient pas être nommées en cas d'opposition des trois cinquièmes des membres des commissions des lois du Sénat et de l'Assemblée nationale, précisant que, dans le cas de la personnalité désignée par le Président de la République, les deux commissions des lois seraient appelées à se prononcer, tandis que dans le cas des personnalités nommées par le Président du Sénat et par celui de l'Assemblée nationale, seule la commission des lois de la chambre concernée interviendrait.
Il a également rappelé que la personnalité désignée par le Président de la République serait appelée à présider cette commission indépendante, conformément aux propositions faites en ce sens par le Conseil d'Etat. Le secrétaire d'Etat a ainsi illustré son propos en indiquant qu'en application de ces dispositions, 29 membres de la commission des lois du Sénat auraient la possibilité d'opposer leur veto à la nomination de la personnalité désignée par le président du Sénat, tandis que 44 membres de la commission des lois de l'Assemblée nationale pourraient faire de même en ce qui concerne la nomination de la personnalité choisie par le président de leur assemblée. Il a estimé que ces dispositions devraient permettre d'entourer ces nominations d'un certain consensus.
Il a indiqué que cette commission serait nommée pour six ans et renouvelée par moitié tous les trois ans, et qu'elle obéirait aux règles classiques de fonctionnement des autorités administratives indépendantes.
Il a fait état des articles 2, 3 et 4 du projet de loi organique mettant en oeuvre les nouvelles dispositions constitutionnelles relatives au remplacement temporaire des parlementaires nommés au gouvernement. Il a ainsi indiqué qu'un sénateur devenu ministre serait remplacé provisoirement par son suppléant (s'il a été élu au scrutin majoritaire) ou par son suivant de liste (en cas d'élection au scrutin proportionnel) et qu'il retrouverait son siège automatiquement, au plus tard un mois après la cessation de ses fonctions gouvernementales, à moins qu'il ne renonce à le récupérer. Il a précisé que, dans ce cas, son remplacement deviendrait définitif, jusqu'au prochain renouvellement partiel de la série à laquelle il appartient.
Il a également noté que, dans le cas où plusieurs remplacements seraient intervenus sur une même liste sénatoriale, le dernier sénateur nommé serait amené à céder son siège et qu'un dispositif semblable était prévu pour les députés européens devenus ministres. Il a également souligné le fait que, conformément au texte de la réforme constitutionnelle, le nouveau système serait applicable aux actuels membres du gouvernement.
En conclusion, M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, a souligné que si les dispositions de ce « paquet électoral » présentaient une indéniable complexité, la réforme proposée ne s'en ferait pas moins dans la plus totale transparence, conformément aux engagements pris auprès des responsables des groupes et formations politiques représentés dans les deux assemblées, par le Premier ministre le 16 septembre dernier. Le secrétaire d'Etat a ainsi affirmé que, dès la publication des deux textes, les parlementaires auraient la possibilité de consulter les cartes et les chiffres du recensement dans les nouveaux locaux du ministère de l'intérieur, situés au 14, rue de Miromesnil. Il s'est également engagé à ce que la commission indépendante soit installée le plus rapidement possible, dès le vote du Parlement sur les deux projets de textes, afin que celle-ci soit rapidement en mesure de se prononcer sur les projets de délimitation qui lui seront soumis.
Concernant la nouvelle procédure de nomination impliquant un avis public des commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, M. Jean-Jacques Hyest, président, a rappelé que la rédaction de l'article 13 de la Constitution, à l'initiative du Sénat, impliquait que ces commissions se prononcent séparément sur la nomination proposée par le Président de la République, conformément au principe de l'autonomie de chaque assemblée.