Ces onze pays se caractérisent tous par un haut degré de décentralisation. Dans les pays de l'OCDE, les collectivités engagent 33 % des dépenses publiques, dont 22 % des dépenses de santé et 40 % des dépenses d'enseignement. Les collectivités perçoivent 17 % des recettes fiscales prélevées. Il y a donc un décalage entre la part des dépenses publiques prises en charge par les collectivités territoriales et les recettes qui leur sont attribuées. La fiscalité acquittée par les entreprises représente 19 % des recettes fiscales des collectivités. Les États centraux doivent ainsi financer certaines compétences portées par les collectivités.
La définition de la péréquation est plurielle et elle lie ses objectifs à son financement. La péréquation est un mécanisme de redistribution : elle vise à égaliser les niveaux de vie et les capacités. Très souvent, le terme de péréquation fait référence à la notion de compensation ce qui, dans le débat français, ne simplifie pas les choses. L'égal accès aux services publics sous-tend les systèmes étudiés dès lors que les collectivités assument des compétences telles que la protection sociale ou l'enseignement. Le financement de la péréquation repose sur la collecte de l'impôt mais elle ne rompt pas tout lien avec la territorialisation des ressources. Enfin, la péréquation ne vise pas à égaliser les offres de services : le niveau d'imposition reflète, in fine, les choix et les engagements pris par les exécutifs locaux. Ainsi, la péréquation, l'égalité d'accès au service et le niveau d'imposition sont liés. La péréquation ne doit pas masquer l'adéquation entre le niveau d'imposition et l'offre de service.
Le rapport pose cinq questions qui nourrissent, sans les épuiser, les débats sur les réformes à l'étranger. Le financement des collectivités peut-il comporter une norme de dépense ? Les fonds de péréquation doivent-ils être ciblés sur quelques compétences ? La péréquation garantit-elle un égal accès aux services publics ? La stabilisation des ressources des collectivités passe-t-elle par la péréquation ? Enfin, comment mettre en oeuvre une péréquation sans clivages ?
Tout d'abord, le maillage communal : dans six pays, dont la France, l'Allemagne, l'Italie et la Suisse, plus de 25 % de la population habite dans des communes de moins de 10 000 habitants. En France et en Suisse, moins de 25 % de la population vit dans des communes de plus de 50 000 habitants. On est encore loin des métropoles ! A l'inverse, l'Espagne, la Suède, la Finlande et la Hollande se caractérisent par une concentration de la population dans des villes de plus de 50 000 habitants.
Derrière le vocable région, il faut distinguer les grandes régions - équivalentes au nôtres - et les petites régions - qui seraient comparables à nos départements. A l'instar des pays les plus peuplés, la France est maillée de régions de grande taille qui se caractérisent par des écarts de densité modérés. La péréquation devra en tenir compte. En revanche, dans les pays à petites régions, l'homogénéité n'est pas toujours de mise.
Nous avons retenu l'indicateur courant de PIB par habitant : les distorsions entre départements sont très grandes en France alors qu'elles ont tendance à s'atténuer entre régions.
Les revenus fiscaux représentent rarement la majorité des ressources des collectivités. En revanche, les transferts de fonctionnement et d'investissement sont le plus souvent majoritaires. Lorsqu'on est en présence de fiscalité partagée, la distinction entre dotation et ressource fiscale est beaucoup plus difficile à définir.
Enfin, la situation économique doit être prise en compte : comment prévoir de la péréquation quand les recettes fiscales diminuent et que les dotations budgétaires sont gelées ? Des choix politiques devront être faits.
Dans le rapport, tous les fonds péréquateurs ont été recensés. La France se caractérise, comme la plupart des pays unitaires, par la mise en oeuvre de la péréquation à tous les échelons des collectivités, même si les volumes sont plus importants au niveau communal. En France, l'ensemble des mécanismes verticaux représentent 2,7 % des dépenses publiques tandis que la péréquation horizontale représente moins de 0,5 %. Dans certains pays, les transferts se concentrent au niveau régional, comme en Italie, en Espagne, en Suisse, en Autriche ou en Allemagne.
Sur quels critères de richesse établir la péréquation ? L'opposition entre ressources et charges résiste mal à l'analyse. La distinction s'opère davantage sur la question : comment articule-t-on les richesses et les charges ? En France, aux Pays-Bas et en Suisse, le critère de ressources détermine l'éligibilité. Dans d'autres pays, comme l'Espagne, le Japon et l'Italie, on estime les besoins en fonction des compétences des collectivités. Puis, les besoins financiers sont comparés aux ressources fiscales estimées en potentiel. Un dernier groupe de pays se caractérise par une fiscalité partagée en amont et qui irrigue la péréquation en aval : en Allemagne, en Autriche et en République Tchèque, les critères de répartition sont définis au cas par cas.
Selon que l'on se situe dans une logique de répartition ou de compensation, le système est différent. La France, comme les Pays-Bas ou l'Autriche, suit une logique de répartition : une enveloppe est prédéfinie et les collectivités en ont droit à une partie. Le critère de répartition est déterminé par le Gouvernement. Pour les pays qui relèvent d'une logique de répartition, le montant de l'enveloppe n'est pas défini a priori. Ce sont les montants des besoins qui importent et la fiscalité s'adapte en fonction de ces besoins. Il en est ainsi en Espagne, en Finlande, en Italie, au Japon et en Suède. Dans ce dernier pays, un objectif de dépense est fixé sur le fonds de péréquation, comme cela se pratique en France avec l'ONDAM. Si le montant de l'enveloppe est dépassé, chaque collectivité devra consentir un effort ; s'il y a un excédent, il sera réparti entre elles.
La plupart des pays, et notamment la France, l'Autriche, les Pays-Bas et la République Tchèque, ont construit leur système de péréquation sur une logique de répartition verticale. Mais la péréquation dans une optique de compensation appelle des solutions horizontales, sans exclure des financements verticaux complémentaires ou des ajouts de fiscalité partagée, comme en Allemagne, en Suisse ou en Espagne. En Suisse, la péréquation repose sur des critères de ressources pour les trois-quarts de l'effort total. L'apport des cantons est moindre que celui de la Confédération qui participe très largement au système et prend en charge 60 % du total de la péréquation sur ressources.
Nous souhaitons maintenant vous proposer quelques pistes de réflexion pour engager le débat.