Intervention de Bruno Le Maire

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 24 novembre 2009 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2010 — Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'alimentation de l'agriculture et de la pêche

Bruno Le Maire, ministre :

a tout d'abord souligné que la politique agricole devait tendre à la fois à préserver le capital de production agricole de base et à s'insérer dans le jeu compétitif car, contrairement aux idées reçues, l'agriculture est délocalisable, à l'image des tomates, produites moins cher au Maroc. Dans cette optique il faut tenir un langage de vérité aux agriculteurs, sans toutefois abandonner les objectifs d'équilibre du territoire. Puis il a apporté les éléments de réponse suivants :

- dans le secteur du lait, les tensions ne révèlent pas une nouvelle crise mais un conflit de répartition dans un contexte où les prix ont augmenté. Un équilibre devrait être trouvé afin d'éviter que les industriels, du fait de prix trop élevés en France, s'approvisionnent en Allemagne. Par ailleurs, la politique des quotas ne pouvait pas être prolongée, car la France était isolée ;

- l'objectif fixé par le Gouvernement consiste à ce que les exploitants qui touchaient la PHAE ne perdent pas un euro avec la nouvelle prime. Une négociation est actuellement en cours avec la Commission européenne pour permettre le renouvellement d'un soutien équivalent à la PHAE ainsi qu'un basculement de tous les agriculteurs dans le nouveau dispositif qui sera en place à partir de 2011. Ce soutien serait co-financé par l'Etat. Par ailleurs, la nouvelle prime herbagère ne fixe pas de chargement minimum, mais la prime est dégressive à partir d'un taux plein de 0,8 UGB/ha, qui correspond à une densité faible d'utilisation de l'espace. La revalorisation de l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) devrait par ailleurs permettre de maintenir les grands équilibres dans les zones de montagne ;

- 700 000 euros seront ajoutés en gestion aux crédits prévus en loi de finances pour le financement des ADASEA, conformément aux engagements pris devant l'Assemblée nationale ;

- l'objectif de développement de l'agriculture biologique est de passer de 3 % aujourd'hui à 6 % de surfaces cultivées en 2012, grâce à 50 millions d'euros de soutiens en 2010. Toutefois, le bio reste un marché de niche qui ne garantit pas l'alimentation des français. Par ailleurs, les agriculteurs non engagés dans le bio et qui rencontrent des problèmes de débouchés acceptent mal un soutien apporté à une filière qui ne rencontre, elle, pas de problèmes de ce type ;

- les mesures du plan de soutien aboutissent quasiment à la mise en place d'une année blanche en 2010 pour les agriculteurs qui sont les plus en difficulté, leurs intérêts d'emprunt sont pris en charge à hauteur de 100 millions d'euros, ils bénéficient d'une possibilité de report d'intérêts d'une année et également d'une prise en charge de cotisations sociales à hauteur de 50 millions d'euros. La prise en charge de tous les intérêts d'emprunts aurait représenté 4 milliards d'euros, ce qui était impossible sur le plan budgétaire ;

- des exonérations de TFNB seront consenties au cas par cas, en fonction des difficultés des agriculteurs, dans le cadre d'une enveloppe de 50 millions d'euros ;

- concernant la mise en oeuvre du plan de soutien, des vérifications seront faites pour s'assurer que les aides arrivent effectivement à leurs destinataires, même si certaines exploitations ne survivront peut-être pas à la crise, y compris en raison d'erreurs de gestion ;

- les négociations communautaires sur la mise en place d'une régulation européenne des marchés agricoles sont très difficiles et les ministres de l'agriculture du groupe des vingt-deux pays constitué autour de la France seront réunis le 10 décembre pour défendre cet objectif. Mais d'autres partenaires européens, ainsi qu'une partie de la Commission européenne, considèrent que le budget d'intervention de la PAC est trop élevé et préfèreraient une renationalisation des dépenses après 2013, ce qui serait une erreur majeure, la PAC étant la seule politique européenne vraiment intégrée. Il est cependant possible de plaider contre une dérégulation totale, car celle-ci méconnaît les impératifs d'entretien des territoires et de sécurité alimentaire, mais la bataille pour la construction d'une nouvelle PAC sera difficile ;

- le regroupement des producteurs viticoles constitue un point de départ indispensable, même s'il ne règlera pas toutes les difficultés du secteur. Les 170 millions d'euros par an apportés par l'Union européenne en 2009 et 2010 au secteur viticole pouvaient être utilisés soit sous forme de bonus individuel aux droits à paiement uniques (DPU) soit sous forme collective destinée à valoriser les produits. La revalorisation des DPU n'aurait pas permis le redressement de la filière, seule l'organisation collective, passant notamment par une stratégie de vins de cépage, constitue une voie d'avenir. Il sera également nécessaire d'établir des contrats avec les metteurs sur marché, afin d'assurer une visibilité sur les débouchés ;

- les dispositifs comme SOPEXA et CapExport gérés par le ministère de l'agriculture soutiennent l'exportation dans l'agro-alimentaire. Dans la mesure où l'industrie agro-alimentaire utilise 70 % de la production agricole, ses difficultés se répercutent en effet sur les agriculteurs.

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