Intervention de Pierre Hérisson

Commission des affaires économiques — Réunion du 3 mai 2005 : 1ère réunion
Culture — Droit d'auteur et droits voisins - communication

Photo de Pierre HérissonPierre Hérisson :

Après avoir établi un parallèle avec le débat sur la loi n° 2004-575 pour la confiance dans l'économie numérique, dont il avait été le rapporteur avec son collègue Bruno Sido, M. Pierre Hérisson s'est félicité des échanges fructueux que cette réunion permettait d'avoir sur le sujet de la protection des droits d'auteur dans le contexte du développement des technologies de l'information, sujet aux implications autant industrielles que strictement culturelles à l'heure de la convergence entre les secteurs des télécommunications, des médias et des technologies de l'information.

Il a rappelé que, conformément à nos obligations communautaires, le texte consacrait effectivement le régime juridique des mesures techniques de protection (MTP) afin de permettre au titulaire du droit d'auteur de contrôler l'usage qui était fait de son oeuvre, et notamment d'en maîtriser la diffusion. Toutefois, abondant dans le sens de son collègue M. Bruno Retailleau, il a jugé tout aussi légitime de vouloir assurer la liberté de choix du consommateur, ce dernier devant pouvoir lire sur n'importe quel support la reproduction numérique d'une oeuvre qu'il a légalement acquise. A cet égard, il a déploré le cloisonnement vertical du marché qui aboutissait à la formation d'oligopoles fondés sur des systèmes propriétaires détenus par Microsoft, Apple ou Sony.

Evoquant la tension entre les intérêts commerciaux des grands groupes et les exigences croissantes et tout aussi légitimes des consommateurs, il a estimé qu'au coeur de cette tension, se trouvait la notion d'interopérabilité, qu'il a définie comme la capacité, pour un système, à communiquer avec d'autres, grâce au respect d'une norme commune et qu'il a présentée comme la pierre angulaire du réseau Internet, lequel s'appuyait sur un protocole permettant des échanges d'informations entre des systèmes différents. Il a fait observer que la directive communautaire, alors qu'elle imposait la protection juridique des MTP, ne comportait aucune disposition précise pour assurer l'interopérabilité. Puisqu'il revenait au législateur national d'organiser la mise en oeuvre effective de l'interopérabilité, il a affirmé son soutien à la proposition de la commission des affaires culturelles du Sénat de confier à une autorité de régulation le soin de statuer sur la fourniture des informations essentielles à l'interopérabilité.

S'agissant de la proposition de M. Bruno Retailleau de revenir à la rédaction qu'avait retenue l'Assemblée à l'issue de sa première délibération, c'est-à-dire de faire du Conseil de la Concurrence, plutôt que du Tribunal de grande instance, le gardien de l'interopérabilité, il a jugé que cette position se défendait parfaitement et qu'il était en effet plus naturel de renvoyer des entreprises subissant des pratiques anticoncurrentielles vers le juge de la concurrence, plutôt que de permettre à tout un chacun de prendre connaissance des informations nécessaires à l'interopérabilité. Toutefois, il a rappelé que le Conseil de la Concurrence, dans sa décision de novembre 2004 relative à Apple, avait considéré qu'il ne devait tenir compte de l'intérêt du consommateur qu'en cas de pratique anticoncurrentielle avérée et, pour ce motif, n'avait donc pas fait droit à une demande d'interopérabilité.

Il a donc plaidé pour asseoir sur l'expertise et l'indépendance d'une autorité de régulation la garantie d'une interopérabilité raisonnée. Néanmoins, il s'est interrogé sur la multiplication des autorités de régulation dans le domaine de la communication, proposant de créer une passerelle entre cette autorité de régulation et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), qui, a-t-il relevé, traite déjà de l'interopérabilité entre réseaux, désignée sous le nom d'interconnexion, définie comme la liaison physique et logique des réseaux permettant aux utilisateurs de communiquer entre eux ou bien d'accéder à des services.

Enfin, M. Pierre Hérisson a conclu en congratulant M. Bruno Retailleau pour le travail considérable qu'il avait accompli sur le texte.

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