M. Michel et moi-même étions députés lors de la réforme du code pénal. Il y eut de longs débats à l'Assemblée nationale sur l'article 64, et l'on tint compte de l'avis des psychiatres. Environ 17 % des crimes donnaient lieu alors à une déclaration d'irresponsabilité pénale ; cette proportion diminuait peu à peu. Certains malades mentaux, auteurs de crimes atroces, sont pénalement irresponsables, mais il est apparu nécessaire de les placer au sein d'unités pour malades difficiles (UMD), par exemple à Cadillac ou Sarreguemines. La psychiatrie française reste rétive à ce genre de pratiques, alors qu'aux Pays-Bas, en Allemagne ou en Suisse, de telles personnes peuvent être internées en établissement spécialisé pendant vingt ou trente ans. La prison ne leur est pas adaptée, mais elles ne peuvent être laissées en liberté.
Aujourd'hui on a tendance à confondre dangerosité et responsabilité pénale. L'altération du discernement ne diminue pas la sanction mais l'accroît, et l'on ne reconnaît plus que rarement son abolition pure et simple ; c'est ainsi que l'on condamne certaines personnes à de lourdes peines de prison afin de protéger la société, alors que leur place est en établissement psychiatrique. Certes, on a institué l'obligation de soins. Mais on confond les troubles mentaux liés à la commission d'actes criminels, et ceux qui apparaissent en prison, du fait des addictions ou de la dureté du monde carcéral. On évalue à 10 % la proportion de détenus atteints de troubles psychiques, mais ils sont à mon avis beaucoup plus nombreux.