a souhaité obtenir des précisions sur l'initiative prise par la France, en commun avec l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas, en vue de la création d'un commandement européen du transport aérien. Il s'est interrogé sur les modalités de coordination entre ce futur commandement, et la structure déjà mise en place par l'OTAN dans ce domaine. Evoquant le programme Rafale, il s'est inquiété de la date retenue pour la commande de la prochaine tranche, ainsi que des enjeux opérationnels, industriels et financiers que cette commande représentait. Puis il a évoqué les difficultés rencontrées par notre pays dans le développement du système intérimaire de drone MALE (SIDM), dérivé du drone israélien Eagle, et s'est enquis de l'état du programme Euromale. Il a constaté qu'un projet de coopération entre l'Allemagne, la France et l'Espagne portait sur la mise au point d'un futur drone MALE, dénommé Advanced UAV et a souhaité en connaître le contenu et le calendrier.
En réponse, le général Abrial, chef d'état-major de l'armée de l'air, a apporté les éléments suivants :
- les 522 emplois supprimés en 2008, répartis entre 469 emplois militaires et 53 emplois civils, correspondent à des suppressions effectives de postes, car il n'y a pas de postes vacants dans l'armée de l'air ;
- le personnel militaire est toujours marqué par une forte motivation, mais s'interroge légitimement lors de son recrutement sur le futur déroulement des carrières, ainsi que sur les possibilités offertes en matière de reconversion. Le taux de recrutement est satisfaisant, avec 1 admis pour 8,5 candidats pour le personnel navigant ; il faut cependant souligner que ce taux était de 1 pour 10 il y a deux ans. Les officiers sous contrat sont recrutés au taux de 1 pour 6, avec des difficultés dans des filières concurrencées par le secteur civil ; les sous-officiers sont recrutés au taux de 1 pour 4, contre 1 pour 2,5 en 2006. Les tensions les plus fortes touchent les secteurs du renseignement, de la sécurité incendie et des commandos de l'air ;
- la rémunération au mérite se limite pour l'instant à quelques postes dans la haute hiérarchie : il est donc trop tôt pour en tirer un bilan significatif ;
- la priorité assignée à la maintenance des aéronefs est de garantir leur capacité opérationnelle. Dans cette perspective, les structures de commandement ont été simplifiées, et les niveaux de maintenance ont été réduits de 3 à 2 : un niveau industriel et un niveau opérationnel. La création de la SIMMAD, en 2002, ainsi que celle du SIAé (service industriel de l'aéronautique), au 1er janvier 2008, qui agrègera des éléments de la Délégation générale à l'armement et des trois armées, sont des avancées notables dans la simplification du MCO aéronautique ;
- s'agissant du MCO du Rafale, sa gestion est mutualisée entre l'armée de l'air et la marine, en amont de son arrivée dans les unités. Une fois en fonction, les conditions de sa maintenance sont spécifiques à chaque armée, et une réflexion est en cours sur ce point. Le Rafale est un appareil en début de vie, et donc marqué par un coût décroissant de son MCO. Ainsi, les deux escadrons présents sur la base de Saint-Dizier réclameront 23 % de personnel en moins pour leur maintenance au regard de ce qu'exigeaient les Mirage. De plus, la disponibilité en OPEX, supérieure à 90 % pour le Rafale, est une preuve de la qualité du concept de maintenance retenu. Cet appareil réclame, en moyenne, 12 heures de maintenance pour une heure de vol, ce qui fixe le coût de l'heure de vol à un niveau supérieur d'environ 15 % à celui du Mirage 2000 : il s'agit là d'une remarquable performance, car le Rafale est un appareil beaucoup plus complexe, et en début de vie ;
- il est nécessaire que la commande de Rafale, initialement prévue pour 2008, soit passée en 2009, de façon à garantir leur arrivée à temps au sein de l'armée de l'air et de l'aéronavale. En effet, cette « montée en puissance » est indispensable au renouvellement de la flotte d'avions de combat, qui permettra de retirer du service les appareils les plus anciens, et donc coûteux à maintenir, et plus encore à rénover. Cette commande, prévue à hauteur de 60 appareils, est également un enjeu industriel, car elle permettra d'éviter la rupture de la chaîne de production, qui conduirait à passer d'une fabrication industrielle à une fabrication artisanale, avec les défauts qui s'y attachent ;
- le recours à l'externalisation pour la formation des pilotes d'avion sur la base de Cognac présente un bilan très positif : en effet, l'armée de l'air achète des heures de vol à EADS, qui se charge de la maintenance des appareils. Ceci permet une notable économie en termes de personnel, tout en garantissant l'encadrement militaire nécessaire. S'agissant de la maintenance des infrastructures, une expérimentation de longue durée est en cours, dans le but de conserver un socle de compétences au sein de l'armée de l'air ;
- le coût annuel du MCO des 14 ravitailleurs C 135 est de l'ordre de 95 millions d'euros : il est très difficile de le réduire, car il n'existe plus de concurrence dans ce domaine, du fait de l'ancienneté des appareils. Cette forte dépense n'aboutit cependant qu'à une disponibilité moyenne de 50 % de la flotte. En matière de nouvelles capacités, ces ravitailleurs peuvent également être transformés en structure médicalisée pour assurer les évacuations de blessés, civils ou militaires, qu'aucun appareil n'effectuait auparavant ;
- en matière d'avions de transport, la France attend la livraison prévue à partir de 2010, de l'A400M, et devra rapidement commander une quinzaine d'avions MRTT (multirole transport tanker). La Grande-Bretagne utilise des C 130 Hercules et des C 17 de fabrication américaine, et l'Allemagne dispose de Transall qui sont en bien meilleur état que la flotte homologue française, du fait de leur moindre utilisation différente en opérations. Une réflexion est en cours au sein de l'OTAN sur un achat commun de C 17, qui seraient mis à la disposition des Etats membres ; cette option n'est pas privilégiée par la France, car elle implique un engagement de 30 ans, pour s'assurer les services d'un avion qui a, certes, 3 fois le volume de l'A400M, mais dont le coût d'utilisation est également le triple, et dont le gabarit de soute n'est pas supérieur ;
- les capacités disponibles en France en matière de drones sont très insuffisantes ; le programme SIDM enregistre ainsi un retard de près de 5 ans du fait de difficultés d'intégration industrielle. Le déploiement d'une première unité, comportant 3 vecteurs aériens et 2 stations au sol, est cependant prévu pour 2008 sur la base de Cognac. Il faut prendre acte de la difficulté d'impulser une dynamique européenne dans ce domaine, car l'Allemagne privilégie la fonction de reconnaissance, alors que la France a pour priorité la fonction de surveillance. C'est pourquoi l'étape qui suivra le SIDM présente de réelles difficultés, et que le projet Advanced UAV a du mal à se mettre en place ; dans le même temps, nombre de nos partenaires européens achètent des drones américains Predator ;
- l'Allemagne, la Belgique, la France et les Pays-Bas ont décidé de mettre en place un commandement européen du transport aérien, à compter de la mi-2008 ; ce projet est ouvert à tous les Européens désireux d'y participer. Parallèlement, s'est développée l'initiative Strategic airlift interim solution (SALIS) qui fonctionne de façon satisfaisante du fait de sa souplesse, puisqu'elle réunit un groupe de pays partenaires ;
- l'armée de l'air comporte 44 implantations sur le territoire français, dont 37 en métropole et 24 avec plate-forme ; si aucune n'est dépourvue d'appareils militaires, certaines en ont peu, comme la base de Bordeaux, qui abrite un état-major et dont la piste est désormais utilisée principalement par l'aéroport civil de Mérignac. La base de Creil accueille, pour sa part, un escadron de 12 avions de transport CASA, mais également de nombreux éléments interarmées, dont la direction du renseignement militaire. Il est indéniable que ce réseau d'implantations peut sembler surdimensionné par rapport au format actuel, et inégalement réparti sur le territoire du fait du poids de l'histoire; une réflexion est donc en cours pour examiner, base par base, le type de matériels à y conserver, sa place dans les réseaux de l'armée de l'air, et une éventuelle reconversion interarmées ou interministérielle. Toute réduction de ce réseau relèvera d'une décision des autorités politiques ;
- l'armement nucléaire français doit impérativement comporter deux composantes complémentaires : les sous-marins bénéficient de leur invisibilité ; les avions permettent un emploi plus souple, notamment du fait de leur visibilité volontaire, et une réversibilité de la mission. La composante aéroportée garantit également l'invulnérabilité des sous-marins, qui dévoileraient leur position en tirant. Ce double dispositif contraint nos adversaires potentiels à devoir organiser leur défense contre deux menaces différentes. Il s'agit d'un élément particulièrement important en Europe, zone où de nombreux pays s'en remettent, pour l'instant, à la protection nucléaire assurée par l'OTAN ;
En réponse à M. Jean Guy Branger qui souhaitait connaître le taux de féminisation de l'armée de l'air, le général Abrial a précisé :
- le recrutement des personnels féminins n'est soumis à aucun quota ; ce taux est de 20 % au sein de l'armée de l'air et de 14 % au sein du ministère de la défense. L'ouverture aux femmes de toutes les filières de l'armée de l'air est récente, et c'est pourquoi peu d'entre elles sont présentes dans les hauts niveaux de commandement.