« Je vous confirme que, si la situation le nécessite, je ferai appel aux réquisitions » d’immeubles vides cet hiver, avez-vous déclaré, madame la ministre, le 7 novembre 2007 en présentant le plan grand froid destiné à l’accueil des personnes sans abri.
« Que les petits propriétaires privés se rassurent, il ne s’agit pas de réquisitionner leurs appartements, mais d’essayer d’identifier les immeubles qui appartiennent aux personnes morales et qui seraient disponibles », avez-vous également indiqué en évoquant les bâtiments vides appartenant à des banques ou à des compagnies d’assurance qui auraient pu faire l’objet de réquisitions l’hiver dernier en cas de manque de places dans les centres d’hébergement.
Une telle mesure me semble plus que jamais d’actualité. Au moment où les banques font l’objet de toutes les sollicitudes, il n’est pas choquant d’imaginer qu’elles puissent rendre à la communauté nationale une partie des efforts qui sont consentis pour les sauver. La France compte plusieurs centaines de milliers de logements vides. On l’a déjà vu hier, on le répétera sans doute : les solutions à mettre en œuvre pour les mobiliser ne sont pas aussi simples qu’il y paraît.
Si la réquisition des logements vides n’est pas la panacée, elle fait partie de ces possibilités théoriques qui, dans la pratique, ne sont quasiment jamais utilisées.
Je suis bien consciente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, que cette disposition heurte le droit de propriété, dont je n’ignore pas qu’il est « inviolable et sacré » selon les termes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, adossée à la Constitution. Je n’oublie pas non plus que la Déclaration précise aussi que nul ne peut être privé de son droit de propriété, « si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment ». En la matière, il est bon, me semble-t-il, d’en revenir aux textes fondateurs.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la nécessité publique me paraît largement constatée : trois millions de personnes sont mal logées alors que des centaines de milliers de logements sont vides.
Pour autant, par cet amendement, je ne vous propose pas de créer de nouvelles dispositions législatives : la possibilité de réquisition par la puissance publique est déjà reconnue par la loi, depuis fort longtemps. Je vous suggère simplement d’étendre aux maires la possibilité de recourir à ces réquisitions.
Je précise, afin de prévenir toute confusion, qu’il n’est pas question de priver les préfets de la faculté d’y recourir, il s’agit seulement d’étendre cette faculté aux maires.
Enfin, j’évoquerai un dernier point, madame la ministre : en étendant aux maires la possibilité de recourir à ce dispositif, vous n’avez pas à craindre l’inflation de réquisitions ou l’abus de procédures. Les maires sont des élus responsables, qui mesurent parfaitement l’impact qu’aurait une telle décision. Ils n’useraient pas de cette faculté à la légère. Qu’au moins la loi les laisse juger de la nécessité d’y avoir recours. Qu’elle leur permette d’user à la mesure qu’ils estimeront la plus juste de cette possibilité !