Prenant le relais, M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, a souhaité s'attarder sur une action financée par cette mission : le développement des télécommunications, des postes et de la société de l'information.
Il a considéré que cette action embrassait un champ très large et très important de notre économie et jugé son actualité toujours foisonnante. Il a focalisé son propos sur La Poste, à laquelle, en évoquant le rôle joué par son collègue Gérard Larcher à l'égard de cette belle entreprise, il accordait une attention fidèle depuis plusieurs années et qui se trouve face à d'importantes échéances. Si le transport de presse constitue la part la plus importante du budget que l'Etat consacre à La Poste, avec 160 millions d'euros, l'action de l'Etat en matière postale, a-t-il fait valoir, dépasse largement cette ligne budgétaire.
Dressant d'abord le bilan du partenariat entre l'Etat et La Poste, à la veille du terme du contrat baptisé « Performances et convergences » signé en janvier 2004 pour quatre ans et destiné à accompagner sa modernisation, il a estimé le contrat rempli en grande partie.
D'abord, La Poste a entrepris de moderniser son outil de travail ; elle a lancé en 2005 un plan de modernisation industrielle baptisé « Cap qualité courrier », doté de 3,4 milliards d'euros, qui sera achevé en 2010 et qui doit apporter des gains de productivité et de qualité décisifs. La qualité de service s'en est déjà trouvée améliorée, avec plus de 81 % de lettres distribuées dès le lendemain de leur dépôt en 2006. L'objectif du contrat de plan de 85 % en 2007 n'a toutefois pas encore été atteint : il reste donc des progrès à réaliser.
Ensuite, la présence postale a été réinventée : La Poste s'est engagée à maintenir ses 17.000 points de contact, et elle tient cet engagement tout en faisant évoluer la physionomie de son réseau afin de l'adapter à la France d'aujourd'hui. Le réseau postal s'appuie désormais sur 5.000 partenariats (3.500 avec les communes, 1.500 avec les commerçants). Surtout, la contribution de La Poste à l'aménagement du territoire a été identifiée par la loi adoptée en 2005 et organisée par les décrets d'application. Ainsi, sauf circonstances exceptionnelles, plus de 10% de la population du département ne peut se trouver éloignée de plus de 5 kilomètres et de plus de 20 minutes de voiture d'un point de contact de La Poste. Un fonds postal national de péréquation territoriale a été créé pour contribuer au financement de cette mission. La Poste bénéficie à ce titre d'une dépense fiscale, par le biais d'un allègement de fiscalité locale, évaluée à 140 millions d'euros pour les trois prochaines années. Précisant qu'un contrat pluriannuel de présence postale territoriale organisant la répartition de ces fonds entre départements avait été signé avant-hier par La Poste, l'Etat et l'Association des maires de France (AMF), il a admis que le coût de l'aménagement du territoire ne serait pas couvert par ces 140 millions et que, selon le Gouvernement, 240 millions d'euros pèseraient encore annuellement sur les comptes de La Poste.
En outre, la question des retraites a été réglée pour La Poste en décembre 2006 et la solution validée au plan communautaire. Ainsi, La Poste va se trouver placée à partir de 2010 en situation d'équité concurrentielle : après versement d'une soulte de 2 milliards d'euros en 2006, le taux de la contribution employeur libératoire de La Poste devrait égaliser les niveaux de charges sociales et fiscales sur les salaires entre La Poste et ses concurrents du secteur postal et du secteur bancaire. Mais, parallèlement, la charge de la liquidation du paiement des retraites des fonctionnaires de La Poste va s'accroître très sensiblement pour le budget de l'Etat au cours des prochaines années, ce qui implique de rechercher un adossement d'une partie du financement de ces pensions sur les régimes de retraites de droit commun ; la loi prévoyant que ce dossier aboutisse d'ici à la fin 2008, M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il s'enquerrait auprès du ministre de son état d'avancement.
Enfin, les services financiers ont été transformés en Banque postale au 1er janvier 2006 : si M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, a estimé que le démarrage de cette banque semblait répondre au plan d'affaires de La Poste, il a jugé que l'un des défis des cinq ans à venir était de dynamiser la progression de son produit net bancaire.
En définitive, il a reconnu que La Poste avait amélioré sa rentabilité, passée de 0,6 % en 2002 à 4,7 % en 2006, et fait observer qu'elle réalisait désormais 70 % de son chiffre d'affaires dans le secteur concurrentiel.
Il a ensuite présenté les défis que devait relever La Poste, grâce au contrat 2008-2012 qu'elle élabore aujourd'hui avec le Gouvernement.
D'abord, la concurrence totale sur le marché du courrier : la position commune dégagée au Conseil en octobre 2007, dans la foulée de la position prise par le Parlement européen cet été, devrait finalement conduire à une ouverture totale à la concurrence de la distribution du courrier au 1er janvier 2011. M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, y a vu, pour La Poste, l'opportunité de bénéficier de deux années supplémentaires pour se préparer -achèvement de la modernisation de son outil industriel, développement des services associés au courrier, amélioration de l'accueil du client- et, pour la France, une chance pour conforter le service public postal avant d'envisager un substitut à son financement par le secteur réservé. Sur ce point, il a souligné que le Sénat avait été entendu puisque, comme il le demandait dans sa résolution européenne de février 2007, le Gouvernement français avait obtenu que des précisions sur les modalités de calcul du service universel soient annexées à la directive, que les missions de service public complémentaires au service universel, comme l'aménagement du territoire, soient prises en compte et que le périmètre du service universel soit assuré, la possibilité d'une sixième levée par semaine étant incluse dans le service universel et même prévue dans le texte. Il a déclaré qu'il s'agissait donc d'une victoire pour La Poste et pour le service public dans notre pays.
Ensuite, La Poste doit à l'avenir relever un défi important, selon M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis : dynamiser La Banque postale. Si son activité est en croissance (+ 6,3 % en 2006), une note interne laisse entendre que La Banque postale aurait perdu des parts de marché sur la plupart de ses produits, notamment sur les dépôts à vue et l'épargne ordinaire. A ces résultats mitigés, il faut ajouter la menace d'une banalisation de la distribution du livret A, décidée en mai dernier par la Commission européenne avec effet au 10 février 2008. Si le Gouvernement a introduit un recours, auquel s'est joint La Poste, pour contester cette décision, il n'est pas suspensif et son issue est incertaine. C'est sans doute, a expliqué M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, pourquoi Madame Lagarde, ministre de l'économie, a décidé avant-hier d'autoriser La Banque postale à distribuer du crédit à la consommation, moyen efficace de rajeunissement de sa clientèle et gisement de rentabilité.
a estimé que, si elle devait intervenir, une banalisation du livret A, auquel La Banque postale doit aujourd'hui 13 % de son produit net bancaire, ne pourrait pas s'envisager sans une gamme bancaire complète : le droit commun doit jouer dans les deux sens. Il est en effet indispensable que La Banque postale combatte à armes égales avec les banques concurrentes. Il a rappelé que le livret A concourait à deux missions d'intérêt général : le financement du logement social et l'accessibilité aux services bancaires. Il a jugé que la distribution de crédits à la consommation constituait, en tout état de cause, un nouvel enjeu pour La Banque postale : bien sélectionner les partenaires avec lesquels offrir le crédit à la consommation pour en faire, d'ici à deux ans, un vecteur de dynamisation de son positionnement concurrentiel.
Enfin, a-t-il relevé, La Poste doit encore affronter une dernière incertitude relative à la garantie de couverture par l'Etat de ses obligations financières. La Commission européenne a ouvert le mois dernier une enquête approfondie sur la garantie illimitée de l'Etat français dont bénéficie La Poste en tant que personne morale de droit public : cette garantie publique permet à La Poste de se financer à des conditions particulièrement avantageuses, que ce soit pour ses activités de service postal universel ou pour ses activités en concurrence, ce qui, aux yeux de Bruxelles, constitue un avantage déloyal à l'égard de ses concurrents à la veille de l'ouverture totale des marchés postaux. La Poste se défend en faisant observer qu'elle ne bénéficie pas de la note triple A de l'Etat, mais d'un AA justifié par la solidité de son actionnaire unique et ses bons fondamentaux économiques. M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, a toutefois rappelé que la Commission européenne avait obtenu en 2003 la fin de la garantie équivalente dont bénéficiait EDF et que ce dossier pourrait être lourd de conséquences pour La Poste.
Il a donc appelé à la vigilance sur le contrat 2008-2012 que La Poste va bientôt signer avec l'Etat, ce contrat étant en mesure d'offrir à La Poste française un avenir en Europe, tout en confortant le service public postal.