Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Commission des affaires économiques — Réunion du 21 novembre 2007 : 2ème réunion
Union européenne — Stratégie de lisbonne - Audition de M. Jean-Pierre Jouyet secrétaire d'etat chargé des affaires européenne

Jean-Pierre Jouyet :

Enfin, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat auprès du ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes, sur la stratégie de Lisbonne, conjointement avec la délégation pour l'Union européenne.

Après avoir remercié MM. Jean-Paul Emorine et Hubert Haenel de l'avoir invité à intervenir, M. Jean-Pierre Jouyet a rappelé que la « stratégie de Lisbonne » recouvrait l'ensemble des objectifs, des actions et des procédures dont l'Europe s'est dotée pour parvenir à augmenter durablement son potentiel de croissance et la création de nouveaux emplois. Il a indiqué vouloir faire le point des avancées réalisées dans ce domaine et des actions envisagées pour 2008.

Soulignant que la stratégie de Lisbonne avait pour ambition de faire de l'Europe « l'économie de la connaissance la plus compétitive du monde » à l'horizon 2010, il a reconnu -pour le regretter- que tous les objectifs fixés à Lisbonne en 2000 ne pourraient être atteints. Pour autant, l'Europe progresse dans la mise en oeuvre de la « stratégie de Lisbonne », qui demeure un cadre de référence pertinent pour inscrire notre stratégie économique et sociale.

a rappelé qu'en effet l'Europe se devait, pour assurer sa prospérité, de relever le défi de la mondialisation en mobilisant pleinement ses ressources en travail et en assurant sa compétitivité dans le domaine de l'économie de la connaissance, également appelée économie de « l'immatériel ». La croissance, les emplois et les investissements de demain concernent essentiellement l'économie de la connaissance et les secteurs économiques à forte composante technologique. La croissance européenne repose dorénavant sur les efforts fournis dans les domaines de la recherche et de l'innovation technologique, de l'éducation et de la formation, du développement des petites et moyennes entreprises.

Il a, en outre, rappelé que l'Europe s'était fixé pour objectif, dès 2000, la pleine utilisation de ses ressources en travail, soulignant qu'il s'agissait également d'un des principaux objectifs du Président de la République qui souhaitait « remettre le travail au coeur du projet économique et social français ». La France et l'Europe souffrent tant d'une insuffisante mobilisation du facteur travail que d'un trop faible taux d'emploi et la revalorisation de la valeur travail s'impose.

a ajouté que si l'objectif fixé à Lisbonne était le bon, les instruments définis en 2000 pour l'atteindre n'avaient pas tous été efficaces, en particulier en raison de la méthode retenue, qui s'était avérée trop peu contraignante. Pour ces raisons, les Etats membres ont décidé, en 2005, de refonder la stratégie de l'Union en la recentrant sur la croissance et l'emploi. Pour répondre au défi de la mondialisation et du vieillissement démographique, les objectifs suivants ont été fixés : une croissance de l'économie européenne de 3 % par an, un taux d'emploi de 70 % et une part des dépenses de recherche et développement (R & D) dans le PIB de 3 %.

Il a indiqué qu'en outre les instruments du partenariat entre les Etats membres et l'Union avaient été renforcés afin de garantir une plus grande implication des Etats membres. La Commission proposera prochainement, en vue du Conseil européen de mars 2008, une communication dressant le bilan de la mise en oeuvre des nouvelles lignes directrices arrêtées en 2005 et les actualisant pour la période 2008-2011.

s'est félicité de ce que le bilan de la relance de la « stratégie de Lisbonne » soit favorable. L'Europe a retrouvé le chemin d'une croissance durable (2,9 % dans l'Union européenne en 2006 et encore 2,6 % cette année), le taux de chômage est revenu en dessous de 7 %, soit le plus bas niveau atteint depuis quinze ans, et 9 millions de nouveaux emplois devraient être créés dans l'Union entre 2006 et 2008. Le taux d'emploi a atteint, en 2006, 64,3 % dans l'Union à vingt-sept et 66 % dans l'Union à quinze (contre 63 % en 2000). Ces résultats sont très encourageants, mais les efforts ne doivent pas pour autant être relâchés.

S'agissant des mécanismes institutionnels, il a indiqué que le Conseil avait adopté pour la première fois en 2006 des recommandations adressées à chaque Etat membre pour la mise en oeuvre de son programme de réforme. C'est un pas en avant important pour l'exercice d'une « pression des pairs » conforme à l'esprit européen.

a estimé que le Conseil européen de printemps devrait largement confirmer les orientations stratégiques décidées en 2005 et la nécessité de maintenir une certaine stabilité des lignes directrices intégrées. Il devrait également suivre la Commission qui propose, dans son programme législatif, de confirmer les quatre domaines stratégiques dans lesquels l'Union doit avancer, à savoir la recherche et l'innovation, l'éducation et la formation, l'environnement des entreprises et le changement climatique.

Il a ajouté que ce Conseil devrait également affirmer sa volonté de progresser dans les sept domaines d'action prioritaires proposés par le Président Barroso dans son rapport sur l'adaptation de l'Europe au défi de la mondialisation, qui sont l'adaptation du marché intérieur au XXIe siècle, l'adaptation de l'Europe à ses nouvelles réalités sociales, l'immigration, le changement climatique, la stabilité financière, la défense des intérêts de l'Europe dans la mondialisation et la promotion de ses normes au niveau mondial. C'est autour de ces sept principaux thèmes que s'organisera le programme de travail de la Commission pour 2008, qui servira de trame de fond à la présidence française du Conseil de l'Union l'an prochain. Parmi les chantiers les plus emblématiques, il faut citer, dans le domaine de la recherche et de l'innovation, l'Institut européen de technologie, dans le domaine de la nouvelle politique industrielle, les initiatives technologiques conjointes, ou encore, dans le domaine de l'enseignement, l'élargissement du programme ERASMUS à un public plus large, dans le but d'accroître la mobilité de nos jeunes en Europe, quels que soient leur origine sociale et leur niveau d'étude.

a estimé que la démarche menée par l'Union allait dans le bon sens, puisqu'elle visait à défendre davantage les intérêts de l'Europe dans la mondialisation. Face à la montée en puissance des pays émergents et au dynamisme de nos partenaires américains et japonais, l'heure n'est plus à une lecture naïve de l'ouverture économique. Sans retourner au protectionnisme, il s'agit de retrouver la voie d'une protection des intérêts de l'Europe en prenant en compte le concept de réciprocité.

Il a également souhaité que la construction européenne reste fidèle à une ambition sociale forte, indiquant partager ce constat avec les Allemands. Il a ajouté que la France soutiendrait le renforcement de la dimension sociale de la « stratégie de Lisbonne » que prépare la Commission.

En concluant, M. Jean-Pierre Jouyet a regretté que la France ait été trop souvent considérée par Bruxelles comme l'un des Etats membres les plus réticents à mettre en oeuvre les réformes décidées dans le cadre de la stratégie de l'Union. L'élection du Président de la République et l'engagement du Gouvernement dans la mise en oeuvre d'un vaste programme de réformes structurelles touchant l'ensemble des volets de la « stratégie de Lisbonne » constituent une occasion unique de mettre fin aux malentendus du passé. Il a constaté l'existence d'une large convergence entre le programme de réformes entrepris par la France et les objectifs de la « stratégie de Lisbonne », évoquant, à cet égard, le travail engagé par la Commission pour la libération de la croissance française, présidée par M. Jacques Attali.

a indiqué que la Secrétaire générale de la Commission avait estimé que les conditions étaient désormais réunies pour que la France devienne l'un des meilleurs élèves dans la mise en oeuvre de la « stratégie de Lisbonne » grâce à la réforme en profondeur des politiques de revalorisation de l'activité et du travail, à la réforme des universités et du système de recherche et de soutien à l'innovation, à la libération des freins à la croissance, à l'amélioration de l'environnement économique des petites et moyennes entreprises et à l'inscription de la croissance dans un cadre de développement durable. La France s'inscrit pleinement dans une stratégie ambitieuse qui reste parfaitement valide et adaptée aux défis de la mondialisation.

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