Oui. Le travail a été mené sous la responsabilité d'une équipe dirigée par M. Weill. Cette dernière comptait dans ses rangs d'éminents épidémiologistes. Elle n'intégrait en revanche aucun cardiologue.
L'étude devait quantifier, à travers le suivi d'une population témoin, les risques d'hospitalisation pour insuffisance valvulaire ou chirurgie cardiaque. Nous pouvons cependant aujourd'hui nous demander si les groupes constitués étaient comparables. D'autant que certains facteurs confondants n'ont pas été analysés : les caractères du diabète ; l'indice de poids corporel ; l'hypertension artérielle, phénomène fréquent qui peut favoriser, voire causer, la régurgitation valvulaire.
La deuxième étude, appelée Cnam 2, a analysé les causes des décès survenus au sein d'une population de patients exposés au Mediator - population composée pour une moitié de diabétiques et pour une autre moitié de non-diabétiques, de tous âges, hospitalisés pour des lésions valvulaires, suivis durant quatre ans à cinq ans et demi. Elle n'a cependant pas intégré de groupe témoin.
La troisième étude a consisté en une extrapolation des résultats obtenus à l'ensemble de la population française. A l'époque, ses auteurs estimaient couvrir ainsi 2,6 millions de personnes. D'autres estimations ont pu être données par la suite.
Le 15 novembre 2010, lors d'une séance exceptionnelle, l'Afssaps a repris à son compte l'estimation de Catherine Hill : 465 décès peuvent être imputés au Mediator sur une période de cinq ans et demi, ainsi que 3 500 hospitalisations et 1 750 remplacements valvulaires sur une période de quatre ans. Les médias ont accordé une très large publicité à ces premières informations.
Avant que mes collègues épidémiologistes n'établissent leur propre estimation, Catherine Hill avait elle-même très rapidement refixé à cinq cents le nombre de décès imputables au médicament.
Menées par des épidémiologistes reconnus, ces enquêtes de la Cnam, nationales, ont constitué un véritable tournant dans l'histoire du Mediator. En tant que cardiologue spécialiste des valves, je conteste cependant leurs résultats. Mes réserves portent sur trois points : la méthodologie, l'analyse des décès et les extrapolations.
J'en profite pour souligner que les méthodologies critiquées ont été utilisées pour la première fois pour l'évaluation de la dangerosité d'un médicament.