Intervention de Jean Acar

Mission commune d'information sur le Mediator — Réunion du 17 mai 2011 : 1ère réunion
Audition du professeur jean acar cardiologue et de Mme Agnès Fournier et M. Mahmoud Zureik épidémiologistes à l'institut national de la santé et de la recherche médicale inserm

Jean Acar, cardiologue :

Vous avez peut-être raison.

M. Zureik assure que le nombre d'hospitalisations et d'opérations chirurgicales pour remplacement valvulaire est multiplié par trois, par rapport à l'autre cohorte, chez les patients exposés à l'action du benfluorex.

Cette règle est cependant appliquée quelle que soit la population prise en compte. Or, la population suivie dans Cnam 1 n'est pas celle suivie dans Cnam 2. Ni les tranches d'âges, ni la répartition des patients par sexe ne sont les mêmes. La proportion de femmes est ainsi de 75 % dans l'une et de 52 % dans l'autre.

Les indications sont elles-mêmes également distinctes. Les patients suivis dans l'une des deux études sont de ce point de vue divisés en deux groupes : certains, constituant la moitié du groupe, prenaient le Mediator comme un coupe-faim ; les autres l'utilisaient effectivement comme un antidiabétique. Les taux d'ALD et de maladies cardio-vasculaires associées divergent aussi profondément.

Il n'est pas possible, dans ces circonstances, d'extrapoler d'un cas à l'autre.

Contrairement à Catherine Hill, je crois cependant primordial le critère de l'âge. Pour ce type de calcul, ce qui est valable à un certain âge, nous dit cependant cette épidémiologiste, reste valable à un autre âge de la vie. Imaginons alors deux populations d'âge différent : d'une part, une population âgée de cinquante-huit à soixante-cinq ans, soit la tranche retenue dans Cnam 1 ; d'autre part, une population âgée de soixante-six à soixante-quatorze ans.

Concernant ce critère, les auteurs de Cnam 1 ont malheureusement négligé d'intégrer dans leurs calculs une relation majeure : la prévalence ou la fréquence des valvulopathies non liées à l'action du benfluorex - le plus souvent des valvulopathies dégénératives (insuffisances aortiques, insuffisances mitrales) - augmente régulièrement avec l'âge ; elle augmente même brusquement à partir d'un certain âge.

Un récent article, paru dans la revue The Lancet, était intitulé « Le fardeau des valvulopathies pour la société ». Il était bien entendu question du fardeau économique. Les auteurs du travail ont étudié la prévalence des valvulopathies et, de façon plus secondaire, leur suivi. Ils ont montré que leur prévalence s'était fortement accrue au cours des deux dernières décennies.

Pour appuyer leurs propos, ces scientifiques ont eux-mêmes mis en avant deux études : d'un côté, une étude portant sur la population générale ; de l'autre, une étude focalisée sur une communauté basée près de Rochester. Ils ont constaté que les prévalences de l'insuffisance mitrale et de l'insuffisance aortique étaient respectivement six et deux fois plus importantes au sein de la population la plus âgée.

Nous verrons nous-mêmes les cas d'insuffisances valvulaires non liés à l'action du benfluorex croître de façon très conséquente au cours de la prochaine décennie. Autrement dit, le poids du benfluorex sera à l'avenir d'autant moins important que la population prise en compte sera âgée.

Au vu de ces explications, j'admets volontiers le sur-risque retenu dans le cadre de l'étude Cnam 1. Il est là de niveau 3. Le sur-risque appliqué à des populations âgées dans le cadre de l'étude Cnam 2 me paraît en revanche nettement surestimé.

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