Intervention de Michel Sergent

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 2 avril 2008 : 1ère réunion
Contrôle budgétaire — Sports - droit à l'image collective des sportifs professionnels - communication

Photo de Michel SergentMichel Sergent, rapporteur spécial :

a tout d'abord rappelé que les deux derniers débats budgétaires sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » avaient été dominés par le coût du droit à l'image collective (DIC) des sportifs professionnels, créé par la loi n° 2004-1366 du 15 décembre 2004.

Ce dispositif, qui permet, sous certaines conditions, d'exonérer de cotisations sociales jusqu'à 30 % de la rémunération des sportifs, avait conduit à des remboursements à l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (ACOSS) sur le programme « Sport ». A ce titre, 32 millions d'euros avaient été inscrits dans le projet de loi de finances pour 2008 et, au vu de la modicité des crédits du sport, l'apparition d'une telle ligne avait abouti à des arbitrages douloureux, ce qui avait conduit le rapporteur à s'interroger sur l'efficacité du DIC.

souhaitant revenir sur le contexte de son adoption par le Parlement, a rappelé que, le 15 décembre 1995, la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) par son arrêt dit « Bosman » avait déclaré les règlements de l'Union européenne de football amateur (UEFA) instaurant des quotas liés à la nationalité contraires à l'article 39 du Traité de Rome sur la libre circulation des travailleurs entre les Etats membres de l'Union européenne (UE). L'abolition des quotas de joueurs communautaires à partir de la saison 1996-1997 a instauré une concurrence « sauvage » sur le marché du travail des sportifs. De plus, cette libéralisation s'est déroulée dans des conditions non harmonisées en Europe et pénalisantes pour les clubs français, moins riches que leurs homologues européens, subissant un niveau élevé de charges sociales et mieux encadrés financièrement.

a indiqué que M. Jean-François Lamour, alors ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, avait, dans ce contexte, demandé un rapport sur « certains aspects du sport professionnel » à M. Jean-Pierre Denis, inspecteur des finances. Il a relevé que l'instauration d'un « droit à l'image collective » avait été la principale proposition de ce rapport, remis au ministre en novembre 2003. Il a noté que cette proposition avait ensuite été reprise par MM. Edouard Landrin et Jean-Marie Geveaux, alors députés, dans une proposition de loi, devenue la loi du 15 décembre 2004 portant diverses dispositions relatives au sport professionnel.

Souhaitant dresser un bilan du DIC trois ans après sa création, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, a constaté que ce dispositif était très populaire auprès du public visé : en effet, trois disciplines (football, rugby, basket-ball) l'ont adopté dès l'origine et mis en place en 2005, le cyclisme ayant suivi en 2006 tandis que le handball devrait en bénéficier dès la prochaine saison (2008-2009). Il a précisé qu'à ce jour 1.267 sportifs bénéficiaient du DIC.

Il a évoqué le grand attachement du monde sportif au DIC, que lui ont exprimé l'ensemble des personnalités auditionnées au cours de son contrôle budgétaire. Il a noté que, outre son aspect financier, les acteurs y voyaient un signe de soutien des pouvoirs publics dans le contexte concurrentiel précédemment décrit.

s'est ensuite interrogé sur la réalité du DIC, précisant qu'il s'agissait certes d'un succès relatif, mais dont il convenait de prendre la mesure.

En termes d'écart de charges sociales, il a noté que le but était en partie atteint puisque, selon une étude du cabinet Deloitte, l'écart de charges entre la France et ses voisins avait été réduit de moitié par le DIC : alors qu'en 2001, le coût total du salaire net d'un footballeur était de 100 en France contre 60 à l'étranger, en 2006, cet écart avait été ramené de 100 à 80 avec les principaux championnats européens.

Il a cependant relativisé la réussite du DIC, expliquant que, ramené à l'ensemble du budget des clubs, le DIC représentait un avantage de l'ordre de 3 %, chiffre constaté aussi bien dans un club de basket que dans un club de rugby d'élite ou dans une « grosse écurie » de L1 de football. Dès lors, il a considéré que si le DIC pouvait constituer un utile complément au budget des clubs, il n'apportait pas de réponse à la mesure des déséquilibres du sport européen, en particulier du football.

a estimé qu'une action efficace ne pouvait être menée qu'à un niveau international, par exemple en encourageant l'action de M. Michel Platini, président de l'UEFA, tendant à renforcer le contrôle financier des clubs européens, ou en soutenant des initiatives tendant à limiter les transferts internationaux de joueurs. Il a espéré que l'inclusion d'un article sur la spécificité du sport dans le traité de Lisbonne puisse permettre d'avancer sur cette voie.

a ensuite évoqué le coût du DIC pour le budget de l'Etat. Il a indiqué que les exonérations relevées par l'ACOSS s'étaient élevées à 13,3 millions d'euros en 2005, à 21,2 millions d'euros en 2006 (+ 59 %) et à plus de 26 millions d'euros en 2007 (+ 23 %). Puis, après avoir relevé l'approximation des inscriptions budgétaires au titre du DIC dans les projets de loi de finances pour 2006 et 2007, il a déclaré que cette dépense pesait lourdement sur les crédits du programme « Sport ». En effet, les 32 millions d'euros inscrits au titre du DIC représentent plus de 15 % des crédits de paiement de ce programme dans la loi de finances pour 2008.

De plus, M. Michel Sergent, rapporteur spécial, s'est inquiété du caractère « incontrôlable » de cette dépense, notant, d'une part, que de nouvelles disciplines pouvaient intégrer le dispositif et, d'autre part, que l'évolution des recettes des clubs de football était imprévisible.

a conclu qu'au vu de son efficacité relative et de son coût élevé, il apparaissait nécessaire de réformer le DIC.

Toutefois, il s'est dit défavorable à la suppression du DIC expliquant que, si tout devait être fait pour que le paysage du sport européen évolue, les clubs français avaient, pour l'heure, besoin de soutien. De plus, il a indiqué que les conventions collectives et les contrats pluriannuels clubs-joueurs avaient été construits en tenant compte du DIC et qu'il serait donc malvenu de bouleverser l'économie générale du sport en supprimant cette mesure.

Puis, après avoir examiné l'hypothèse d'une baisse de la fraction de la rémunération des sportifs exonérable au titre du DIC, il a exprimé sa préférence pour un plafonnement du dispositif, qui ne toucherait pas les clubs les plus modestes et qui garantirait un meilleur contrôle de la dépense à long terme. Il a conclu son propos en indiquant qu'un plafond s'établissant à 15 fois le plafond de la Sécurité sociale, soit 41.595 euros bruts par mois, lui paraissait correspondre à la réalité actuelle du sport de haut niveau car il s'agit du salaire moyen des footballeurs de Ligue 1.

Un large débat s'est ensuite instauré.

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