Ce dernier amendement vise à modifier le code pénal, afin d'assurer une sanction effective des pratiques de certains établissements : ceux-ci ont tendance à « oublier » fort opportunément soit d'appliquer la convention, soit, plus souvent encore, d'informer simplement une personne atteinte ou anciennement atteinte d'une maladie constituant un risque aggravé de santé ou souffrant d'un handicap des possibilités offertes par la convention. L'adoption de cette disposition serait donc un plus par rapport à la situation actuelle.
En effet, aux termes de l'article 225-1 du code pénal, constitue « une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de [...] leur état de santé ».
Cependant, l'article 225-3 du même code institue une exception, en autorisant explicitement la discrimination fondée sur l'état de santé en vue de la couverture des risques décès ou invalidité. Or, l'objectif de la convention AERAS, comme celui de la convention précédente, est justement de faire en sorte de limiter cette discrimination, en aménageant un accès spécifique au crédit pour les personnes présentant un risque aggravé de santé.
C'est pourquoi, outre l'exception des prédispositions génétiques, qui constituent - mais pour combien de temps encore ? - une discrimination, nous souhaitons viser les violations volontaires de la convention relative aux personnes présentant un risque aggravé de santé : il y aurait, alors, présomption de discrimination.
Même si j'ai écouté attentivement les arguments avancés tout à l'heure par notre collègue Jean-Pierre Michel, il nous semble en effet peu cohérent, d'un côté, de poser la règle selon laquelle toute personne présentant un risque aggravé de santé bénéficie de plein droit de cette convention et, de l'autre, de ne pas sanctionner la violation de ce droit.
Certains ont parlé, à plusieurs reprises, d'une « double peine », qui s'appliquerait aux personnes concernées. J'avoue ne pas aimer cette expression : elle renvoie le malade ou l'ancien malade à l'idée de la mort tant médicale, s'il est condamné, que sociale, alors même que le projet d'emprunt en vue d'un achat immobilier ou mobilier est un projet de vie, un projet d'avenir, qu'il faut encourager autant que possible.
Mais puisque vous-même, monsieur le ministre, avez souhaité employer cette expression, je vous rappelle qu'une personne mise en cause pénalement voit ses droits garantis par la loi : pourquoi donc ne pas apporter à la personne malade ou handicapée les mêmes garanties ?
Ce qui est peut-être le plus dramatique dans les refus de crédit, c'est que les personnes qui sont ou ont été atteintes d'une maladie grave ne sont pas toujours elles-mêmes convaincues d'avoir gagné le droit de vivre. Or, c'est ce droit de vivre qui leur est à nouveau refusé quand on leur dit « non » à l'achat d'une maison ou d'une voiture. La convention AERAS et la convention Belorgey ont été conclues pour leur rappeler qu'elles peuvent prétendre à un avenir et qu'elles ont des droits. Dans ces conditions, pourquoi la privation de ces droits ne serait-elle pas sanctionnée ?
Comme ma collègue députée Muguette Jacquaint, je ne crois pas à la sanction médiatique : la prudence affichée par le Gouvernement pour lutter contre cette forme de discrimination tranche un peu trop, à mon goût, avec la prolixité dont il a fait preuve, dans d'autres domaines, pour durcir la loi pénale.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais voir cet amendement adopté.