Les libraires souhaitent, en préambule, remercier le Sénat d'avoir contribué à l'adoption de cette première version du texte de loi. Il nous importe qu'il existe un cadre juridique qui nous permette de monter dans le train du numérique. Cette loi vise en priorité à offrir à l'ensemble des distributeurs de livres physiques la possibilité de participer à cette aventure. Sans loi, les libraires ne pourront pas intégrer le marché du numérique. Face à la taille des « mastodontes » que sont Apple, Google et Amazon, les petits libraires comme nous n'existent pas. Cette loi s'inscrit dans le même raisonnement que la loi de 1981 sur le livre papier. Si les conditions de la concurrence se fondent uniquement sur les prix, les grands acteurs américains pourront fixer les prix qu'ils souhaitent et écraser le marché. Par ailleurs, le contrat de mandat ne peut à lui seul constituer une solution alternative à la loi, notamment pour les libraires. Je travaille aujourd'hui avec 2 400 maisons d'édition et dispose de plus de 900 comptes fournisseurs. Je ne peux négocier des contrats de mandat avec l'intégralité de ces derniers, d'autant que ces contrats présentent de nombreux inconvénients, restreignant notamment la possibilité de choisir l'offre en fonction de ses spécificités et de sa clientèle.
Les libraires sont attachés à la loi et souhaitent qu'elle soit votée le plus rapidement possible afin de pouvoir entrer immédiatement sur ce marché comme les éditeurs. Se pose cependant la question de l'extraterritorialité. Nous conservons sur ce point une position de prudence. Nous ne pouvons aujourd'hui menacer l'existence de cette loi. Si l'extraterritorialité fait courir peu de risques à la loi notamment vis-à-vis de la Commission européenne, elle représente en soi une protection supplémentaire que les libraires ne peuvent que regarder d'un bon oeil. Si les plateformes étrangères sont soumises à la même loi que les libraires, la loi étant plus forte que le contrat, nous serons tous mieux protégés. Si, en revanche, l'analyse du risque montre que l'extraterritorialité peut entraîner la remise en cause de l'ensemble de la loi, il convient de s'assurer que le dispositif ne devienne pas contre-productif. Une analyse juridique sur le droit européen doit donc être opérée mais le syndicat de la librairie française ne détient pas en interne les compétences pour la réaliser. Nous nous en remettons au savoir-faire, aux compétences et à la sagesse du Parlement et du Gouvernement qui, nous le savons, représenteront au mieux les intérêts des libraires. Nous nous tenons prêts néanmoins à participer aux réunions qui pourraient être organisées dans ce cadre.