Intervention de Jean Arthuis

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 21 juillet 2009 : 1ère réunion
Réforme des finances locales et de la taxe professionnelle — Communications

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président :

Puis, la commission des finances a entendu M. Jean Arthuis, président, sur la synthèse des travaux de la commission sur la réforme des finances locales et de la taxe professionnelle.

a évoqué les deux réformes d'envergure concernant les collectivités territoriales, engagées au cours de l'année 2009 : la quasi-suppression de la taxe professionnelle et la modernisation de l'organisation territoriale, alimentée par les conclusions du comité pour la réforme des collectivités locales présidé par M. Edouard Balladur. Rappelant que ces initiatives feront l'objet de débats au Parlement au cours de l'automne, il a précisé que la réforme de la taxe professionnelle sera abordée dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2010.

Dans cette perspective, la commission des finances a ouvert une réflexion préparatoire, qui s'est appuyée sur un nombre volontairement limité d'auditions, ainsi que sur le concours appréciable des sénateurs membres du groupe de travail sur la réforme de la taxe professionnelle, placé auprès de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Par ces auditions et les débats qui les ont suivis, la commission investit un domaine auquel elle avait consacré en 2003 un rapport d'information, qui proposait de fixer les principes devant guider la réforme, non seulement de la fiscalité locale, mais également de l'ensemble des finances locales.

a rappelé que les débats se sont focalisés sur trois sujets : la taxe professionnelle, la réalité de l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et la péréquation, et qu'ils ont permis de mettre à jour des enjeux et de réfléchir aux orientations proposées par le Gouvernement en les confrontant aux réalités de la compétitivité de l'économie et du déséquilibre actuel des comptes publics.

Il s'est félicité que les échanges au sein de la commission aient écarté les tabous et les réflexes conservateurs dont l'expérience a montré qu'ils sont souvent présents dans le domaine des finances locales.

Il a ensuite présenté les observations principales résultant de ces travaux sur chacun des trois thèmes abordés.

S'agissant de la réforme de la taxe professionnelle, il a constaté que le débat n'est pas clos et que nombre d'arbitrages n'ont pas encore été rendus, notamment sur la répartition des compensations et du produit des nouveaux dispositifs fiscaux qui seront mis en place.

La justification de la réforme de la taxe professionnelle ne tient qu'à l'amélioration qu'elle peut apporter à la compétitivité des entreprises et à l'attractivité du territoire. Dans ce but, elle doit répondre simultanément à trois conditions. Elle ne doit pas pénaliser ou avantager à l'excès un secteur de l'activité économique par rapport aux autres. Elle doit s'accompagner de la révision des valeurs locatives cadastrales qui sont décalées par rapport à la réalité économique. Enfin, elle doit être l'occasion de renforcer la responsabilisation des collectivités territoriales, par la suppression des dégrèvements, qui ont fait de l'Etat le premier contribuable de fait de la fiscalité locale.

Après avoir souligné la nécessité de la réforme pour préserver l'activité économique et limiter les délocalisations, M. Jean Arthuis, président, a considéré que si la réforme de la taxe professionnelle ne doit pas aboutir, par le jeu de nouvelles garanties, à geler des situations acquises en confortant les blocages du système actuel des finances locales, elle doit aussi rester neutre pour le budget de l'Etat et ne pas être financée par un recours au déficit ou à l'emprunt.

Toutefois, quel que soit le mode de financement retenu, augmentation d'une imposition existante ou création d'une nouvelle taxe, son coût sera, directement ou non, in fine à la charge des ménages, par le biais des prix à la consommation ou par celui d'une augmentation de la fiscalité.

Il a ensuite dressé un bilan de la révision constitutionnelle du 25 mars 2003 en matière d'autonomie financière.

Cinq ans plus tard, les principes constitutionnels alors adoptés semblent particulièrement inopérants :

- les transferts d'impôts, sur lesquels les collectivités territoriales n'ont aucune marge de manoeuvre, étant intégrés dans la notion de « recettes fiscales et autres ressources propres », aucune garantie n'est apportée à une réelle autonomie financière des collectivités ;

- le choix de l'année 2003 comme année de référence est arbitraire et illustre la difficulté à établir un critère objectif permettant de garantir l'effectivité de l'autonomie financière des collectivités territoriales ;

- enfin, le lien entre autonomie financière, d'une part, et capacité pour les collectivités à fixer l'assiette et le taux de leurs recettes fiscales, d'autre part, est loin d'être évident comme le démontre l'exemple des Länder allemands.

a observé que, par rapport à nos principaux voisins européens, l'autonomie financière des collectivités territoriales françaises est relativement préservée en matière de ressources.

Elles disposent, notamment, d'une liberté de recours à l'emprunt qui est une spécificité en Europe. Par ailleurs, la part des recettes fiscales des collectivités françaises est légèrement supérieure à celle des collectivités européennes.

Enfin, alors que la révision constitutionnelle consacrait l'importance d'une autonomie des recettes des collectivités, c'est davantage l'autonomie de leurs dépenses qui semble être menacée, les budgets des collectivités territoriales étant de plus en plus grevés par des dépenses contraintes, telles que les dépenses sociales pour les départements, dans un contexte de crise économique et de vieillissement de la population.

Il a jugé souhaitable que des progrès soient accomplis pour améliorer les modalités de compensation financière des transferts de compétences, par l'affectation de ressources aussi dynamiques que les charges transférées, et par la limitation des abattements, exonérations et dégrèvements de fiscalité locale, décidés et pris en charge par l'Etat, qui réduisent d'autant l'autonomie des collectivités territoriales.

Sur ce point, il a rappelé que les dotations de compensations d'exonérations sont de plus en plus appelées à servir de variables d'ajustement dans le cadre du mécanisme de « l'enveloppe fermée » des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales.

Pour ce qui concerne la péréquation, M. Jean Arthuis, président, a formulé trois observations principales qui ressortent des travaux de la commission.

La première est liée à la réduction des marges de manoeuvre financières. Le dynamisme de la péréquation a reposé longtemps sur la croissance de la DGF. Aujourd'hui, le contexte économique a changé, l'état des finances publiques et les perspectives d'évolution des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales ne donnent plus les mêmes facilités.

En conséquence, les mécanismes horizontaux de péréquation, qui présentent l'intérêt de ne pas peser directement sur le budget de l'Etat, doivent être préférés aux dotations liées à la péréquation verticale.

Les dispositifs de péréquation doivent également être mieux ciblés. La dilution de la péréquation induit en effet deux effets négatifs qui se cumulent : une moindre correction des inégalités et un accroissement des coûts budgétaires. Le « toujours-gagnant » n'est pas tenable et certaines collectivités territoriales devront accepter de voir stagner leurs recettes.

La deuxième observation porte sur la complexité grandissante des politiques de péréquation, qui devient de moins en moins acceptable. La simplification des dispositifs de péréquation doit viser particulièrement les critères relatifs à l'éligibilité et ceux relatifs à la répartition, dont l'application aboutit souvent à des résultats très injustes.

a, enfin, évoqué l'opportunité de se saisir de la réforme de la taxe professionnelle pour relancer la réforme de la péréquation.

Du fait de la réforme, en effet, les indicateurs de ressources, potentiel fiscal et potentiel financier, qui servent à l'éligibilité mais aussi à la répartition des dotations, perdront leur pertinence. De nouveaux indicateurs de richesse fiscale devront donc être définis en vue d'apprécier, le plus finement possible, les écarts de ressources entre les collectivités territoriales.

La remise à plat sera aussi nécessaire pour les deux dispositifs de péréquation horizontale que sont les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) et le fonds de solidarité de la région Ile-de-France (FSRIF), dont le financement repose sur la taxe professionnelle.

Par ailleurs, le système de compensations, qui sera mis en place dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, ne doit pas figer durablement des écarts significatifs de ressources et renforcer, année après année, les inégalités existantes entre les collectivités territoriales.

Enfin, cette réforme permet aussi d'engager une réflexion plus large sur les finances locales, portant notamment sur l'expérimentation d'une affectation d'une fraction de la future cotisation sur la valeur ajoutée au financement de la péréquation ou le transfert d'impôts d'Etat.

Puis M. Jean Arthuis, président, a proposé que le bilan des échanges de la commission soit retranscrit dans un rapport d'information et que ses travaux se poursuivent au cours de la session extraordinaire envisagée en septembre 2009.

Un débat s'est alors ouvert.

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