Intervention de Philippe Marini

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 12 novembre 2009 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2010 — Examen des principaux éléments de l'équilibre

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

Evoquant les dépenses inscrites dans le projet de loi de finances pour 2010, M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que leur montant s'établit à 285,2 milliards d'euros, soit 3 % de plus que celui de la loi de finances pour 2009, mais 1,5 % de moins que celui de la prévision d'exécution pour la même année. L'ampleur de cet écart s'explique par l'ouverture, en cours d'exercice 2009, de crédits au titre du plan de relance pour l'économie. Hors plan de relance et à périmètre constant, les dépenses de l'Etat augmentent de 1,1 % par rapport à 2009 soit, le taux d'inflation prévisionnelle s'établissant à 1,2 %, une baisse en volume de 0,1 %.

Présentant les dépenses de l'Etat au regard de la norme d'évolution définie dans la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, le rapporteur général a observé que le Gouvernement aurait pu, aux termes de la loi, faire évoluer les dépenses de 1,75 % en 2010 mais qu'il a choisi, marquant ainsi une volonté de maîtriser les dépenses « structurelles » même pendant la crise, la solution plus rigoureuse d'une indexation sur le taux d'inflation prévisionnelle de 1,2 %. Compte tenu de la progression des dépenses de pensions et de charge de la dette inférieure aux prévisions, les enveloppes de la plupart des missions ont pu être maintenues au niveau envisagé par la programmation pluriannuelle, conservant ainsi aux gestionnaires des dotations le bénéfice de la prévisibilité des crédits. Un certain nombre de missions voient même leurs crédits progresser au-delà des montants de la programmation.

a insisté sur le fait que les dépenses fiscales, qui représentent dans le projet de loi de finances pour 2010 l'équivalent du quart des dépenses nettes du budget général, pèsent sur le solde budgétaire de la même façon que les dépenses « budgétaires ». Constatant que leur montant est supérieur de 8 % à celui de la loi de finances pour 2009, il s'est inquiété de leur dynamisme et a, en particulier, insisté sur le coût des crédits d'impôts. En 2010, l'augmentation du coût pour l'Etat de trois mesures - le crédit d'impôt recherche, le crédit d'impôt dit de « développement durable » et le crédit d'impôt remboursant aux ménages le coût de la taxe carbone - sera supérieur à celle des dépenses prises en compte dans la norme de dépense.

Il a ensuite évoqué l'incidence budgétaire de la suppression de la taxe professionnelle, en relevant que le besoin à couvrir, qui s'élève à 25,7 milliards d'euros, l'est pour moitié par des impositions nouvelles, pour un tiers par la suppression des dégrèvements de taxe professionnelle - cette économie étant en partie reprise par des pertes de recettes au titre d'impôts antérieurement perçus par l'Etat - et, pour un peu moins de 20 %, par le déficit budgétaire, à hauteur de 4,3 milliards d'euros.

Le rapporteur général a insisté sur le fait que les réformes structurelles se traduisent par des économies budgétaires à moyen terme, bien qu'elles soient actuellement masquées par les effets de la crise et les décisions discrétionnaires prises en matière fiscale. Il a illustré son propos par la politique de réduction des effectifs de la fonction publique conduite depuis 2002, qui engendre, en 2010, 440 millions d'euros de moindre dépense. Il a rapproché ce chiffre des estimations présentées par la commission des finances du Sénat en 2002, selon lesquelles cette politique permettrait de réduire les dépenses de l'Etat d'environ 500 millions d'euros par an.

a constaté que le montant des recettes inscrit dans le budget représente moins de 70 % de celui des dépenses et que le déficit, malgré une diminution affichée de 25 milliards d'euros, restera supérieur à 100 milliards d'euros, très loin de son niveau d'avant la crise. Entre 2009 et 2010, la réduction du déficit s'explique principalement par l'interruption de la plupart des mesures de relance et par les recettes supplémentaires issues de l'amélioration de la conjoncture économique. Toutefois, le Gouvernement ne renonce pas à l'accompagnement de la sortie de crise puisque certaines mesures de relance, notamment le remboursement anticipé des créances au titre du crédit d'impôt recherche, sont reconduites. En outre, la réforme de la taxe professionnelle se traduira par un allègement de la trésorerie des entreprises de 11,6 milliards d'euros en 2010.

a ensuite évoqué la dette de l'Etat et son financement en appelant l'attention sur la situation paradoxale de l'année 2009, au cours de laquelle le montant de la charge de la dette diminue malgré l'augmentation de son capital. Il a cité l'exemple de l'année 2008 pour illustrer la sensibilité de la charge de la dette aux variations du taux d'inflation et a considéré, sans pouvoir le prévoir avec certitude, que 2010 permettrait peut-être de constater les effets d'une remontée des taux d'intérêt. En réponse à Mme Nicole Bricq, il a précisé que la prévision de charge de la dette figurant dans le projet de loi de finances pour 2010 est fondée sur l'ensemble des hypothèses économiques retenues pour sa construction.

Le rapporteur général a alors constaté que la France est l'Etat de la zone euro qui, avec l'Allemagne, se finance aux meilleures conditions. Après avoir évoqué l'exemple de l'Italie, il a insisté sur la nécessité de conduire une politique budgétaire dont la soutenabilité permette de conserver la confiance des marchés et la notation AAA. Il a souligné que cette question renvoie à la préparation du « grand emprunt » et à la manière dont il sera perçu.

Enfin, il a rappelé que, en 2008 et en 2009, la variation de la dette de l'Etat a été financée pour plus de moitié par des emprunts à court terme, réduisant ainsi la portée du vote sur la variation de la dette à plus d'un an émis par le Parlement à l'article d'équilibre des lois de finances. Il s'est félicité que le tableau de financement figurant dans le projet de loi de finances pour 2010 revienne à des proportions plus habituelles, puisque la variation de 83,1 milliards d'euros de la dette à plus d'un an correspond aux trois quart de la variation totale de l'encours.

Selon les dernières prévisions de la Commission européenne, le déficit public serait en 2010 de 14,7 points de PIB en Irlande, 12,2 points en Grèce, 10,1 points en Espagne et 8,2 points en France, qui serait ainsi le quatrième Etat le plus déficitaire de la zone euro. La procédure de déficit excessif dont notre pays fait l'objet depuis avril 2009 a connu le 11 novembre dernier de nouveaux développements, la Commission européenne ayant alors recommandé au Conseil de repousser de 2012 à 2013 l'expiration du délai au terme duquel elle doit avoir mis fin à son déficit excessif. La programmation annexée au présent projet de loi de finances prévoit cependant un déficit public d'encore cinq points de PIB en 2013. Par ailleurs, le 5 novembre 2009, M. François Fillon, Premier ministre, a estimé que la France ne peut ramener son déficit à 3 points de PIB qu'en 2014. Le Conseil doit se prononcer à ce sujet en décembre 2009. Il faut à cet égard souligner que l'intention de l'Allemagne d'alléger ses prélèvements obligatoires de 24 milliards d'euros ne contribue pas à renforcer la crédibilité du pacte de stabilité.

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