a souhaité présenter à la commission l'état de la régulation boursière française selon trois aspects successifs : la situation actuelle de la place financière, l'activité récente de l'Autorité et les principaux enjeux français et internationaux à moyen et long termes.
Il a constaté, en premier lieu, que la place boursière avait bénéficié en 2006 d'un environnement international porteur, avec une croissance soutenue des principales économies comme des grands indices boursiers, tels que le CAC 40, qui avait crû de 17 %, et le Morgan Stanley Capital International (MSCI) Monde, qui avait connu une augmentation de 18,8 %. Il a relevé que le point haut de la « bulle » de 2000 - soit près de 7.000 points pour le CAC 40 - n'avait pas été de nouveau atteint, et que les ratios de cours rapportés aux bénéfices étaient encore modérés et en France, plus faibles que dans la plupart des autres marchés développés.
Il a également indiqué que la bourse avait absorbé sans heurts le choc temporaire du printemps 2006, dû aux incertitudes sur la situation économique aux Etats-Unis. Sur le marché français, la volatilité des cours s'était révélée assez faible, et la capitalisation boursière globale avait fortement augmenté pour atteindre, à fin 2006, 1.842 milliards d'euros, après environ 1.500 milliards d'euros à fin 2005, ce qui représentait, par rapport au PIB, un ordre de grandeur désormais plus proche de celui habituellement constaté sur les places américaine et britannique.
Il s'est déclaré préoccupé, en revanche, par la relative érosion du nombre de sociétés cotées, malgré une nette reprise des introductions en bourse lors du second semestre de 2006. Au rang des aspects positifs, il a également relevé l'essor du marché organisé Alternext pour les petites et moyennes entreprises, le doublement du volume d'émissions d'actions, et les montants records en matière de fusions et acquisitions. Il a indiqué que l'AMF portait désormais une attention particulière à la forte croissance du capital-investissement, bien que ce secteur ne constitue pas son « coeur de cible », en raison des nombreux mouvements d'aller et de retour opérés entre ces fonds et la bourse.
s'est félicité de la très bonne santé de la gestion française pour compte de tiers, qui constituait une industrie financière très performante et se situait, avec près de 2.500 milliards d'euros sous gestion, au premier rang européen pour la gestion réellement domestique. La gestion domiciliée au Luxembourg, quoique représentant des encours proches, est, en effet, plutôt considérée comme une plate-forme d'exportation pour des gestionnaires européens, et notamment français. Il a ajouté que le contexte boursier était également marqué par la restructuration des entreprises de marché, en particulier le rapprochement entre le NYSE et Euronext, et par les débats sur l'avenir de l'industrie « post-marché », c'est-à-dire les infrastructures de règlement-livraison des titres et de compensation.
Il a jugé que les fondamentaux macro-économiques faisaient preuve d'une certaine robustesse, mais que des discussions au sein du Financial Stability Forum (FSF) témoignaient de préoccupations sur plusieurs facteurs de risque, tels que la forte croissance des liquidités disponibles, permise par le creusement des déséquilibres des balances des paiements, et la diminution corrélative de l'aversion au risque. Il a ainsi relevé que les écarts de taux de rémunération - les « spreads » - avaient beaucoup diminué entre les différentes catégories de risque, et a illustré ce constat par le fait que les taux de rendement des placements dans les pays de l'OCDE et dans les grands pays émergents se révélaient assez proches.
a ensuite abordé la gestion interne de l'Autorité. Il a considéré que la fusion entre la COB et le Conseil des marchés financiers (CMF) était à présent bien établie et que l'intégration des équipes comme des systèmes d'information était achevée, ce qui avait permis de réaliser certaines synergies de coûts. Il a indiqué que les effectifs de l'AMF s'élevaient à environ 360 personnes, une dizaine de postes ayant été créés en 2006, et se caractérisaient par une rotation élevée, ce qui n'était pas sans créer quelques difficultés de gestion. Il a rendu hommage à la grande compétence de ses collaborateurs et à leur encadrement par M. Gérard Rameix, secrétaire général.
Il a précisé qu'un système rigoureux de contrôle de gestion avait été mis au point, incluant des indicateurs et un « reporting » régulier, et qu'un comité d'audit, qui se réunissait selon un rythme trimestriel, avait été constitué au sein du collège de l'AMF. Il a ajouté que le budget de l'Autorité avait légèrement progressé, pour atteindre 65 millions d'euros en 2006, ce qui le situait à un niveau très nettement inférieur à celui de la Financial Services Authority britannique, d'environ 450 millions d'euros, autorité il est vrai totalement intégrée, à la différence de l'AMF, puisqu'elle est également responsable de la supervision des secteurs bancaire et de l'assurance, mais non de l'instruction des offres publiques d'acquisition. Il a estimé que l'AMF figurait parmi les régulateurs boursiers les moins coûteux au sein de l'Union européenne.
S'agissant des grands domaines d'activité de l'AMF, au-delà de la gestion des « affaires courantes » que constituait, par exemple, l'attribution des visas, il a insisté sur l'important travail de transposition des directives du Plan communautaire d'action pour les services financiers, qui avait largement mobilisé l'Autorité depuis 2004. Il a ainsi mentionné la transposition des directives « Prospectus » - qui était entrée en vigueur en 2005 - « Transparence », et celle relative aux offres publiques d'acquisition, qui comportait ces deux grandes innovations que sont l'expertise indépendante obligatoire, en cas de conflit d'intérêts au sein de la société acheteuse, et le dispositif de traitement des rumeurs de marché, qui avait notamment trouvé à s'appliquer dans le cas des opérations récentes.
Il a également fait référence à la transposition de la directive concernant les marchés d'instruments financiers. En dépit d'une réaction tardive, la Place avait fini par en comprendre l'importance majeure et était à présent totalement mobilisée par cet enjeu.
a déclaré que les émetteurs français s'étaient dans l'ensemble bien adaptés au nouveau cadre des normes comptables internationales IFRS et que l'AMF avait fourni beaucoup d'efforts pour accompagner leur mise en oeuvre. Il a signalé l'entrée de M. Philippe Danjou, ancien directeur du service des affaires comptables de l'AMF, au sein de l'International Accounting Standard Board (IASB), organe de conception de ces normes. Il a précisé, en outre, que l'AMF avait mis en place un référentiel pour le contrôle interne dans les sociétés cotées, requis par la loi de sécurité financière du 1er août 2003, après s'être attachée à dépasser le débat initial sur le caractère descriptif ou évaluatif du rapport du président du conseil d'administration sur ce contrôle. Un groupe de place avait, en outre, élaboré un guide sur ce référentiel.
Il a relevé que la commission des sanctions de l'AMF s'était montrée très active en 2006, avec une trentaine de décisions ayant conduit à 45 sanctions individuelles. Il s'est félicité de ce que le président de cette commission soit désormais M. Daniel Labetoulle, ancien Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, dont chacun connaissait les éminentes qualités.
Il a indiqué que l'autorité boursière avait créé un Institut pour l'éducation financière du public, pour lequel un certain nombre de difficultés relatives au financement devaient encore être réglées, et que l'AMF avait accentué sa présence, au niveau international, dans des enceintes telles que l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), dont il était le président du comité technique, le Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM / CESR) et le Financial Stability Forum (FSF).
En troisième partie de son exposé, M. Michel Prada a développé les trois principales et futures orientations de la régulation boursière française et européenne.
Le premier enjeu, de nature transversale, a trait à la remise en question de la stratégie de régulation de l'AMF, après trois années d'intenses réformes et de remise à jour continue du règlement général de l'Autorité. Il a admis que cet « activisme » réglementaire avait suscité des réactions au sein de la communauté financière, qui redoutait un excès de règles. Il a exposé la nouvelle démarche de « meilleure régulation » qui, loin d'être un « exercice de style », suscitait une réflexion impliquant tous les services sur un possible réexamen de la réglementation, son ratio coût / efficacité, le rapport entre l'enjeu et le risque, et sur une éventuelle extension du champ de l'auto-régulation. Cette stratégie constituait, selon lui, le défi majeur de l'année 2007, et ne se pouvait se concevoir isolément, mais au regard des pratiques étrangères.
Il a considéré qu'il était difficile d'établir un juste équilibre dans les arbitrages entre l'autorégulation des acteurs et un encadrement précis par l'AMF, entre la compétitivité de la Place et la protection des épargnants, compte tenu du principe communautaire de libre-établissement et de la faculté de fournir aisément des prestations transfrontalières. Il apparaissait donc nécessaire, à ses yeux, de porter au niveau international la concertation sur ces arbitrages, afin d'éviter que la protection des investisseurs ne se réduise sur le long terme. Il a ajouté qu'il n'était pas un farouche partisan de l'auto-régulation des professionnels, qui fonctionnait mal lorsque les professions étaient placées en conflit d'intérêts. L'autorégulation, selon lui, comportait néanmoins des mérites et incitait les professionnels à mieux s'organiser. Elle pouvait se traduire, dans certaines professions financières, par l'adoption de codes de conduite reconnus et homologués par l'AMF, qui serait ensuite en mesure de s'en prévaloir pour sanctionner les violations de tels codes.
Abordant le deuxième enjeu, de nature plus domestique et relatif aux pouvoirs disciplinaire et de sanction de l'AMF, M. Michel Prada s'est prononcé pour un relèvement du plafond des sanctions forfaitaires, actuellement fixé à 1,5 million d'euros, s'agissant des manquements pour lesquels le règlement général ne faisait pas référence à un profit. Il a considéré que le régime français des sanctions boursières était encore insuffisamment sévère au regard des dispositifs britannique et américain, dont les ordres de grandeur étaient sensiblement différents, puisqu'ils atteignaient plusieurs dizaines de millions d'euros, et que l'AMF aurait pu se montrer plus stricte dans certaines affaires si elle en avait eu la possibilité juridique. Il a également renouvelé le souhait que soit instituée une procédure de transaction permettant d'alléger la charge de la commission des sanctions.