Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Michel Prada, président de l'Autorité des marchés financiers (AMF).
En introduction, M. Jean Arthuis, président, a souligné l'importance de cette audition, qui permettait à M. Michel Prada de présenter le bilan de trois années de régulation boursière, ainsi que son analyse des enjeux de moyen terme auxquels l'Autorité était confrontée. Il a évoqué, à cet égard, la fusion entre le New-York Stock Exchange (NYSE) et Euronext, la coopération entre autorités européennes et les nombreuses innovations juridiques apportées ces dernières années, en particulier sous l'influence du droit communautaire.
Il a rappelé que l'AMF avait déployé une intense activité sur de nombreux fronts, tels que la refonte de son règlement général, l'information des épargnants, la lente mise en place du régime du démarchage bancaire et financier, les nouvelles procédures de prévention du délit d'initié, des consultations de la place financière et la constitution de groupes de travail sur l'analyse financière, l'évaluation indépendante ou l'amélioration de l'exercice du droit de vote des actionnaires.
Il a néanmoins relevé que l'AMF, comme la Commission des opérations de bourse (COB) en son temps, faisait également l'objet de critiques parfois véhémentes. Certains lui reprochaient ainsi une trop grande proximité des émetteurs, de contribuer à l'attrition de la cote, ou la lenteur et le manque de transparence de ses procédures d'enquête sur certaines affaires médiatisées.
Il a enfin considéré que la variété et la complexité de ces questions boursières témoignaient bien de la nécessité de disposer d'une autorité forte, réactive, réunissant les meilleures compétences et investie d'une nouvelle culture.
a souhaité présenter à la commission l'état de la régulation boursière française selon trois aspects successifs : la situation actuelle de la place financière, l'activité récente de l'Autorité et les principaux enjeux français et internationaux à moyen et long termes.
Il a constaté, en premier lieu, que la place boursière avait bénéficié en 2006 d'un environnement international porteur, avec une croissance soutenue des principales économies comme des grands indices boursiers, tels que le CAC 40, qui avait crû de 17 %, et le Morgan Stanley Capital International (MSCI) Monde, qui avait connu une augmentation de 18,8 %. Il a relevé que le point haut de la « bulle » de 2000 - soit près de 7.000 points pour le CAC 40 - n'avait pas été de nouveau atteint, et que les ratios de cours rapportés aux bénéfices étaient encore modérés et en France, plus faibles que dans la plupart des autres marchés développés.
Il a également indiqué que la bourse avait absorbé sans heurts le choc temporaire du printemps 2006, dû aux incertitudes sur la situation économique aux Etats-Unis. Sur le marché français, la volatilité des cours s'était révélée assez faible, et la capitalisation boursière globale avait fortement augmenté pour atteindre, à fin 2006, 1.842 milliards d'euros, après environ 1.500 milliards d'euros à fin 2005, ce qui représentait, par rapport au PIB, un ordre de grandeur désormais plus proche de celui habituellement constaté sur les places américaine et britannique.
Il s'est déclaré préoccupé, en revanche, par la relative érosion du nombre de sociétés cotées, malgré une nette reprise des introductions en bourse lors du second semestre de 2006. Au rang des aspects positifs, il a également relevé l'essor du marché organisé Alternext pour les petites et moyennes entreprises, le doublement du volume d'émissions d'actions, et les montants records en matière de fusions et acquisitions. Il a indiqué que l'AMF portait désormais une attention particulière à la forte croissance du capital-investissement, bien que ce secteur ne constitue pas son « coeur de cible », en raison des nombreux mouvements d'aller et de retour opérés entre ces fonds et la bourse.
s'est félicité de la très bonne santé de la gestion française pour compte de tiers, qui constituait une industrie financière très performante et se situait, avec près de 2.500 milliards d'euros sous gestion, au premier rang européen pour la gestion réellement domestique. La gestion domiciliée au Luxembourg, quoique représentant des encours proches, est, en effet, plutôt considérée comme une plate-forme d'exportation pour des gestionnaires européens, et notamment français. Il a ajouté que le contexte boursier était également marqué par la restructuration des entreprises de marché, en particulier le rapprochement entre le NYSE et Euronext, et par les débats sur l'avenir de l'industrie « post-marché », c'est-à-dire les infrastructures de règlement-livraison des titres et de compensation.
Il a jugé que les fondamentaux macro-économiques faisaient preuve d'une certaine robustesse, mais que des discussions au sein du Financial Stability Forum (FSF) témoignaient de préoccupations sur plusieurs facteurs de risque, tels que la forte croissance des liquidités disponibles, permise par le creusement des déséquilibres des balances des paiements, et la diminution corrélative de l'aversion au risque. Il a ainsi relevé que les écarts de taux de rémunération - les « spreads » - avaient beaucoup diminué entre les différentes catégories de risque, et a illustré ce constat par le fait que les taux de rendement des placements dans les pays de l'OCDE et dans les grands pays émergents se révélaient assez proches.
a ensuite abordé la gestion interne de l'Autorité. Il a considéré que la fusion entre la COB et le Conseil des marchés financiers (CMF) était à présent bien établie et que l'intégration des équipes comme des systèmes d'information était achevée, ce qui avait permis de réaliser certaines synergies de coûts. Il a indiqué que les effectifs de l'AMF s'élevaient à environ 360 personnes, une dizaine de postes ayant été créés en 2006, et se caractérisaient par une rotation élevée, ce qui n'était pas sans créer quelques difficultés de gestion. Il a rendu hommage à la grande compétence de ses collaborateurs et à leur encadrement par M. Gérard Rameix, secrétaire général.
Il a précisé qu'un système rigoureux de contrôle de gestion avait été mis au point, incluant des indicateurs et un « reporting » régulier, et qu'un comité d'audit, qui se réunissait selon un rythme trimestriel, avait été constitué au sein du collège de l'AMF. Il a ajouté que le budget de l'Autorité avait légèrement progressé, pour atteindre 65 millions d'euros en 2006, ce qui le situait à un niveau très nettement inférieur à celui de la Financial Services Authority britannique, d'environ 450 millions d'euros, autorité il est vrai totalement intégrée, à la différence de l'AMF, puisqu'elle est également responsable de la supervision des secteurs bancaire et de l'assurance, mais non de l'instruction des offres publiques d'acquisition. Il a estimé que l'AMF figurait parmi les régulateurs boursiers les moins coûteux au sein de l'Union européenne.
S'agissant des grands domaines d'activité de l'AMF, au-delà de la gestion des « affaires courantes » que constituait, par exemple, l'attribution des visas, il a insisté sur l'important travail de transposition des directives du Plan communautaire d'action pour les services financiers, qui avait largement mobilisé l'Autorité depuis 2004. Il a ainsi mentionné la transposition des directives « Prospectus » - qui était entrée en vigueur en 2005 - « Transparence », et celle relative aux offres publiques d'acquisition, qui comportait ces deux grandes innovations que sont l'expertise indépendante obligatoire, en cas de conflit d'intérêts au sein de la société acheteuse, et le dispositif de traitement des rumeurs de marché, qui avait notamment trouvé à s'appliquer dans le cas des opérations récentes.
Il a également fait référence à la transposition de la directive concernant les marchés d'instruments financiers. En dépit d'une réaction tardive, la Place avait fini par en comprendre l'importance majeure et était à présent totalement mobilisée par cet enjeu.
a déclaré que les émetteurs français s'étaient dans l'ensemble bien adaptés au nouveau cadre des normes comptables internationales IFRS et que l'AMF avait fourni beaucoup d'efforts pour accompagner leur mise en oeuvre. Il a signalé l'entrée de M. Philippe Danjou, ancien directeur du service des affaires comptables de l'AMF, au sein de l'International Accounting Standard Board (IASB), organe de conception de ces normes. Il a précisé, en outre, que l'AMF avait mis en place un référentiel pour le contrôle interne dans les sociétés cotées, requis par la loi de sécurité financière du 1er août 2003, après s'être attachée à dépasser le débat initial sur le caractère descriptif ou évaluatif du rapport du président du conseil d'administration sur ce contrôle. Un groupe de place avait, en outre, élaboré un guide sur ce référentiel.
Il a relevé que la commission des sanctions de l'AMF s'était montrée très active en 2006, avec une trentaine de décisions ayant conduit à 45 sanctions individuelles. Il s'est félicité de ce que le président de cette commission soit désormais M. Daniel Labetoulle, ancien Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, dont chacun connaissait les éminentes qualités.
Il a indiqué que l'autorité boursière avait créé un Institut pour l'éducation financière du public, pour lequel un certain nombre de difficultés relatives au financement devaient encore être réglées, et que l'AMF avait accentué sa présence, au niveau international, dans des enceintes telles que l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), dont il était le président du comité technique, le Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CERVM / CESR) et le Financial Stability Forum (FSF).
En troisième partie de son exposé, M. Michel Prada a développé les trois principales et futures orientations de la régulation boursière française et européenne.
Le premier enjeu, de nature transversale, a trait à la remise en question de la stratégie de régulation de l'AMF, après trois années d'intenses réformes et de remise à jour continue du règlement général de l'Autorité. Il a admis que cet « activisme » réglementaire avait suscité des réactions au sein de la communauté financière, qui redoutait un excès de règles. Il a exposé la nouvelle démarche de « meilleure régulation » qui, loin d'être un « exercice de style », suscitait une réflexion impliquant tous les services sur un possible réexamen de la réglementation, son ratio coût / efficacité, le rapport entre l'enjeu et le risque, et sur une éventuelle extension du champ de l'auto-régulation. Cette stratégie constituait, selon lui, le défi majeur de l'année 2007, et ne se pouvait se concevoir isolément, mais au regard des pratiques étrangères.
Il a considéré qu'il était difficile d'établir un juste équilibre dans les arbitrages entre l'autorégulation des acteurs et un encadrement précis par l'AMF, entre la compétitivité de la Place et la protection des épargnants, compte tenu du principe communautaire de libre-établissement et de la faculté de fournir aisément des prestations transfrontalières. Il apparaissait donc nécessaire, à ses yeux, de porter au niveau international la concertation sur ces arbitrages, afin d'éviter que la protection des investisseurs ne se réduise sur le long terme. Il a ajouté qu'il n'était pas un farouche partisan de l'auto-régulation des professionnels, qui fonctionnait mal lorsque les professions étaient placées en conflit d'intérêts. L'autorégulation, selon lui, comportait néanmoins des mérites et incitait les professionnels à mieux s'organiser. Elle pouvait se traduire, dans certaines professions financières, par l'adoption de codes de conduite reconnus et homologués par l'AMF, qui serait ensuite en mesure de s'en prévaloir pour sanctionner les violations de tels codes.
Abordant le deuxième enjeu, de nature plus domestique et relatif aux pouvoirs disciplinaire et de sanction de l'AMF, M. Michel Prada s'est prononcé pour un relèvement du plafond des sanctions forfaitaires, actuellement fixé à 1,5 million d'euros, s'agissant des manquements pour lesquels le règlement général ne faisait pas référence à un profit. Il a considéré que le régime français des sanctions boursières était encore insuffisamment sévère au regard des dispositifs britannique et américain, dont les ordres de grandeur étaient sensiblement différents, puisqu'ils atteignaient plusieurs dizaines de millions d'euros, et que l'AMF aurait pu se montrer plus stricte dans certaines affaires si elle en avait eu la possibilité juridique. Il a également renouvelé le souhait que soit instituée une procédure de transaction permettant d'alléger la charge de la commission des sanctions.
Puis, en réponse à M. Jean Arthuis, président, qui s'interrogeait sur le plafond pertinent de sanction, il a déclaré que l'AMF avait déjà formulé des propositions, portant en particulier sur une référence à la capitalisation boursière de la société à l'origine du manquement. Il a également plaidé en faveur de la faculté pour l'AMF d'interjeter appel dans certains cas, ce qui permettrait un rééquilibrage à l'égard des justiciables, dont le droit à un appel non assorti d'un risque d'aggravation de leur peine constituait une sorte d' « option gratuite ».
Il a insisté, en outre, sur l'important travail à mener en faveur de l'éducation financière des épargnants. Il a relevé que les moyens financiers externes dont disposait le nouvel institut ad hoc, soit environ 250.000 euros, dont 150.000 euros apportés par l'AMF, permettaient d'assurer sa gestion courante, mais sans poursuivre les mêmes ambitions que le régulateur britannique, qui avait récemment annoncé un programme de formation doté de 20 millions de livres sterling. Il a donc émis le souhait que cet institut puisse accroître son budget, et proposé l'affectation de ressources supplémentaires issues du produit des sanctions individuelles, pour un montant susceptible d'atteindre 2 à 3 millions d'euros.
Terminant l'analyse des sujets « domestiques », il a mentionné les travaux en cours, dans le cadre d'un « Plan de continuité d'activité » de l'AMF, pour disposer de procédures et de moyens permettant de traiter les situations de crise.
En troisième lieu, M. Michel Prada a exposé les nouvelles perspectives internationales et européennes. L'enjeu le plus important réside en la transposition, au sein du règlement général de l'AMF, de la directive du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers, qui faisait encore l'objet de consultations auprès des professionnels.
a relevé que le report au 1er novembre 2007 du délai d'habilitation à transposer par ordonnance cette directive, qui avait été adopté la veille au Sénat, était trop tardif. Il importait que le Gouvernement, comme l'AMF, puissent achever cette transposition d'ici à la fin du premier semestre 2007, afin de laisser aux professionnels le temps d'adapter leur organisation et leurs méthodes commerciales.
a indiqué que le régulateur et le Gouvernement travaillaient en parallèle, en association avec les professions financières, et que la doctrine de transposition consistait à suivre le plus fidèlement possible le texte de la directive et à n'introduire de dispositions spécifiquement françaises que dans la mesure du strict nécessaire et des éventuelles options nationales ouvertes par la directive.
Il a néanmoins estimé que cette nouvelle législation était susceptible de créer d'importantes difficultés pour le régulateur boursier, en particulier au regard des abus de marché, si les intermédiaires financiers venaient à exploiter les nouvelles facultés concurrentielles et à recourir largement à des plates-formes de négociation autres que les marchés réglementés. Cet enjeu majeur posait la question d'une mise en réseau, à l'échelle européenne, des informations dont disposaient les régulateurs nationaux, ce qui se révélait délicat à mettre en place, tant au plan financier que technique.
Puis, en réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, qui s'interrogeait sur la raison pour laquelle l'AMF n'avait pas fait davantage pression sur le Gouvernement français afin d'infléchir les orientations de cette législation, il a assuré que le régulateur avait, dès l'origine, émis d'importantes réserves, mais que le processus d'adoption de la directive avait été influencé par la logique de concurrence entre infrastructures de marché. Il a néanmoins considéré qu'une telle logique, dont les pays anglo-saxons étaient familiers, comportait certains avantages. Il a précisé que les négociateurs de la directive s'étaient attachés à organiser la concurrence en garantissant une plus grande transparence pré et post-négociation.
Le deuxième enjeu communautaire était la révision des directives afférentes au « passeport » des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), qui avait donné lieu, en novembre 2006, à la publication, par la Commission européenne, d'un Livre blanc, au contenu duquel l'AMF s'était montrée particulièrement attentive. Il importait, à ses yeux, de préserver la pertinence du modèle français de gestion collective et de donner un écho européen à certaines propositions du rapport remis par M. Jacques Delmas-Marsalet sur la distribution et la commercialisation des produits financiers.
a ensuite exposé le troisième enjeu international, relatif à l'évolution et à la concentration des infrastructures de marché. Il a confirmé que les cinq régulateurs européens concernés par le rapprochement entre le NYSE et Euronext avaient obtenu des garanties destinées à préserver l'autonomie de la régulation européenne, et signé le 25 janvier 2007 un accord de coopération avec la Securities and Exchange Commission (SEC). Il a ajouté qu'une emprise extra-territoriale de la régulation américaine était aujourd'hui peu probable et ne répondait pas réellement à l'intérêt de la partie américaine, qui cherchait plutôt à atténuer les conséquences restrictives de la loi Sarbanes-Oxley, en faisant de Paris la base du développement international du groupe NYSE-Euronext.
S'agissant de l'opportunité d'une telle fusion transatlantique, il a constaté que cette opération avait été approuvée à une large majorité par les actionnaires du NYSE et d'Euronext et répondait à une logique de marché. Elle permettrait à Euronext de mieux résister à la constitution, dans le nouveau cadre offert par la directive sur les marchés d'instruments financiers, de plates-formes multilatérales alternatives, telles que le récent projet Turquoise annoncé par sept des plus grandes banques d'investissement internationales.
a ensuite estimé que le rapprochement du NYSE et d'Euronext conduirait, sans doute, le management du nouveau groupe à dégager toutes les synergies techniques possibles, notamment dans le domaine informatique, où le NYSE était susceptible d'adopter le système d'Euronext.
Il a rappelé que si cette opération visait à attirer sur la place de Paris des émetteurs internationaux actuellement tournés vers la place financière de Londres, l'harmonisation des règles qu'elle pouvait impliquer ne concernerait pas directement les règles fondamentales telles que les normes comptables. Il a souligné qu'en cas de changement motivé, par exemple, par des évolutions économiques, ou de convergence des normes comptables américaines (US-GAAP) et internationales (IFRS), l'accord des Etats membres de l'Union européenne serait nécessaire.
Puis, en réponse à M. Jean Arthuis, président, qui souhaitait savoir qui fixait le cours des transactions en bourse, M. Michel Prada, président de l'AMF, a expliqué qu'en application de la directive sur les marchés d'instruments financiers, le prix de transaction serait fixé par le marché selon le principe de la meilleure exécution (« best execution »), système complexe intégrant plusieurs variables telles que le prix, le temps de négociation et la qualité du service rendu par les intermédiaires. Il a estimé que la transparence, avec notamment la publication des prix avant et après négociation, ainsi qu'un système de « reporting » consolidé, permettrait un ajustement des prix selon le marché.
a observé que plusieurs cours différents pourraient, dès lors, être fixés au même moment pour une même valeur, en raison de la pluralité des plates-formes de négociation, mais que ceci serait atténué par la mise en place du carnet d'ordres central.
Puis, en réponse à M. Jean Arthuis, président, qui avait indiqué qu'Euronext avait distribué un milliard d'euros de dividendes à ses actionnaires, M. Michel Prada, président de l'AMF, a précisé que le régulateur n'avait pas d'autorité sur ce sujet, et que, seule, la concurrence pouvait conduire à un ajustement à la baisse des prix, comme l'avait montré l'exemple de la concurrence entre le London Stock Exchange (LSE) et Euronext sur la place d'Amsterdam, concurrence qui s'était finalement achevée au bénéfice de ce dernier.
a souligné que la concentration, illustrée par l'opération entre le NYSE et Euronext, n'était pas nécessairement favorable à la concurrence. M. Michel Prada a répondu que si la concentration extrême des marchés réglementés pouvait être critiquée, la concurrence entre plates-formes boursières et autres systèmes de transaction était une bonne chose et qu'elle restait vive.
En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, qui s'interrogeait sur la pertinence et le caractère tardif, selon lui, de la position française concernant la directive relative aux marchés d'instruments financiers, il a estimé qu'il était illusoire de penser que la place de Paris aurait pu demeurer isolée dans un modèle spécifique. Il a indiqué que le LSE réalisait, par exemple, les trois cinquièmes du volume de ses transactions en dehors de son carnet d'ordres central, système dénommé « SETS ».
S'agissant des activités « post marché », et plus particulièrement des systèmes de règlement-livraison, M. Michel Prada a souligné des problèmes de concurrence entre les grands opérateurs. Il a précisé que la Banque centrale européenne travaillait sur la création d'un système appelé « Target II Securities », tendant à abriter en son sein une chambre de compensation européenne unique, ce qui posait la question de savoir si l'Union européenne devait être dotée de plusieurs systèmes oeuvrant de façon concurrente, ou d'un seul système considéré comme un réseau d'intérêt général.
a rappelé que la France était favorable à la mise en place d'un système unique, orientation qui rencontrait l'opposition de la Commission européenne. M. Michel Prada a estimé que la position française allait à l'encontre de la logique traditionnelle de la Commission européenne, qui ne concevait sa mission que dans un environnement concurrentiel. Il a ainsi expliqué que, face aux difficultés des activités de règlement-livraison, la réaction de la Commission était d'organiser la concurrence et la transparence.
a regretté que la perspective d'un Espace unique de paiements en euros (« Single Euro Payments Area ») recueille peu d'intérêt de la part des acteurs politiques. Il a ensuite souhaité savoir quelle serait la pertinence d'un monopole boursier unique à l'échelle européenne.
a observé que le processus français, qui avait vu ces dernières années la suppression des huit bourses régionales au profit de la place parisienne, aurait pu théoriquement être transposé au niveau européen. Toutefois, il a remarqué qu'un tel projet susciterait aujourd'hui de nombreuses réticences de la part des professionnels, et, s'agissant des activités de « post-marché », des chambres de compensation Euroclear ou Clearstream.
S'agissant des fonds spéculatifs ou « hedge funds », M. Michel Prada a observé qu'il était délicat de porter un jugement unique sur un ensemble aussi hétérogène. Il a précisé qu'en France, ces fonds avaient été appréhendés en fonction des catégories d'investisseurs auxquels ils étaient destinés, et qu'une réglementation avait été mise en place pour ceux faisant appel public à l'épargne, comportant des règles de transparence, d'administration et de diversification des actifs. Il a indiqué que cet encadrement avait garanti un certain succès, puisque ce type de gestion représentait actuellement 30 milliards d'euros, dont plus de 12 milliards d'euros pour les fonds à règles d'investissement allégées (fonds « Aria ») et à effet de levier, qui constituaient les « hedge funds » français.
Il a estimé qu'un encadrement des fonds spéculatifs était également concevable au niveau international, en particulier sous l'égide de l'OICV, qui avait amorcé une réflexion sur les standards de valorisation des positions détenues par ces fonds, compte tenu du manque de transparence souvent constaté quant à la valorisation de leurs portefeuilles. De même, il était, selon lui, envisageable de requérir des banques prêteuses un contrôle strict de leurs contreparties « hedge funds » et des effets de levier associés à leur intervention comme prêteur.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui s'interrogeait sur l'influence de ces fonds sur la gestion des sociétés dont ils étaient actionnaires, M. Michel Prada a répondu que « l'activisme actionnarial » ne concernait pas seulement la gestion alternative, mais encore de nombreuses catégories d'investisseurs. Il a souligné qu'il convenait de s'interroger sur la légitimité des moyens employés, notamment sur la procédure du prêt-emprunt de titres, afin de savoir dans quelle mesure ces dispositifs étaient détournés, notamment dans un but de déstabilisation des entreprises.
a observé que la proposition de directive sur les droits des actionnaires pourrait éventuellement fournir un appui juridique à l'encadrement de ces pratiques.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui s'interrogeait sur l'effet de levier des « hedge funds », M. Michel Prada a estimé qu'il était effectivement nécessaire de le contrôler. Il a toutefois souligné que, d'une part, l'effet de levier était actuellement beaucoup moins important qu'il n'y avait quelques années, de l'ordre de 4 à 5, contre 20 à 50 à la fin des années 90, et d'autre part, que les sinistres étaient désormais rares et rapidement absorbés par le marché, comme en témoignait la récente chute du fonds Amaranth Advisors. Il a rappelé qu'il existait environ 8.000 fonds gérant près de 1.400 milliards d'euros, soit guère plus que 5 % du montant annuel global des capitaux échangés de par le monde.
a ensuite abordé la révision de la procédure européenne de décision dite « Lamfalussy », en s'interrogeant sur la place du Comité européen des régulateurs de valeurs mobilières (CESR), qui détenait actuellement un statut presque exclusivement consultatif. Il a indiqué être favorable à un renforcement des pouvoirs de ce comité et de sa légitimité, afin notamment que les standards qu'il adopte soient mieux reconnus, en particulier au « niveau trois » de la procédure Lamfalussy, qui n'avait pas de réel fondement juridique. Il a considéré que cette implication du CESR au « niveau trois » pourrait consister en un mécanisme comparable à l'homologation, en droit français, du règlement général de l'autorité de marché par le ministre de l'économie et des finances.
a souhaité connaître l'influence des investisseurs et fonds de pension étrangers, notamment ceux présents au sein du capital des sociétés composant l'indice CAC 40. M. Michel Prada a estimé que cette présence n'était pas nécessairement néfaste, dans la mesure où elle pouvait servir à améliorer la performance de sociétés mal gérées. Il a regretté toutefois que la France n'ait pas pu mettre en place de réels fonds de pension.
a enfin constaté que l'épargne française était plus investie dans les déficits publics que dans les entreprises, ce qui rendait celles-ci vulnérables.