Intervention de Simon Sutour

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 28 novembre 2006 : 1ère réunion
Pjlf pour 2007 — Missions « justice » « conseil et contrôle de l'etat » et « pouvoirs publics » - crédits de la justice administrative - examen du rapport pour avis

Photo de Simon SutourSimon Sutour, rapporteur pour avis :

Après avoir rappelé le regret exprimé par le garde des sceaux devant la commission le 21 novembre dernier quant au choix du gouvernement d'inscrire les crédits de la justice administrative sous une mission distincte (Conseil et contrôle de l'Etat) de la mission « Justice », M. Simon Sutour, rapporteur pour avis des crédits du programme « Conseil d'Etat et autres juridictions administratives », rattaché à la mission « Conseil et contrôle de l'Etat », a évoqué l'absence de consensus des syndicats de magistrats administratifs sur cette question, l'Union syndicale des magistrats administratifs (USMA) estimant inopportun de réserver aux juridictions administratives un sort différent des juridictions judiciaires, le syndicat de la juridiction administrative (SJA) étant satisfait de l'architecture budgétaire retenue depuis 2006.

Il a évoqué la progression (+ 5,3 %) des crédits alloués pour 2007 à la justice administrative (253 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 251 millions d'euros de crédits de paiement), constatant la priorité budgétaire accordée à ce poste de dépenses, dans un contexte de modique augmentation du budget de l'Etat (0,8 %).

a indiqué que le statut dérogatoire de la mission « Conseil et contrôle de l'Etat » en matière d'exécution budgétaire avait permis aux juridictions administratives de ne pas être affectées par les gels de crédits et les mises en réserve, à une exception près, ces dernières ayant participé aux efforts de solidarité, à l'instar des autres programmes, pour financer les mesures urgentes pour lutter contre l'épidémie de chikungunya.

Il a noté l'amélioration des délais de jugement dans toutes les juridictions administratives en dépit de la hausse continue de la pression des affaires nouvelles, constatant toutefois un ralentissement de l'augmentation des contentieux depuis le premier semestre 2006. Il a relevé la très forte progression du volume d'affaires portées devant les cours administratives d'appel (+ 41 % entre 2004 et 2005), signalant la croissance exponentielle de certains contentieux devant les tribunaux administratifs tel le permis de conduire à points (+ 80 %).

Le rapporteur pour avis a regretté le non-respect de la programmation quinquennale en matière de créations d'emplois, relevant que le projet de budget pour 2007 ne finançait que 12 % des créations prévues en 2002. Il s'est félicité de la mise à disposition de moyens humains supplémentaires (4,5 équivalents temps plein travaillé (ETPT)) pour absorber les charges nouvelles liées à la présidence des instances disciplinaires de certaines professions de santé, soulignant néanmoins l'insuffisance des renforts prévus. Il a jugé nécessaire de doubler le nombre de postes supplémentaires inscrits dans le projet de budget à cet égard.

a craint qu'en dépit du réajustement de l'enveloppe allouée aux frais de justice à hauteur de 1,2 million d'euros prévu par le projet de loi de finances pour 2007, cette dotation -d'un montant de 8,8 millions d'euros- ne soit insuffisante, compte tenu du niveau réel de dépenses constaté en 2005. Il a jugé fondé le doute exprimé par le rapporteur spécial de la commission des finances des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'Etat », M. Jean-Claude Frécon, sur la sincérité budgétaire de l'évaluation prévue en loi de finances initiale, après avoir souligné que la suppression du caractère évaluatif de ces crédits imposait pourtant d'estimer les besoins au plus près de la consommation.

Abordant les pistes de réforme envisagées par le gouvernement pour alléger la procédure administrative contentieuse et, ainsi, raccourcir les délais de jugement, M. Simon Sutour, rapporteur pour avis, a évoqué le recours croissant au juge unique. Depuis 1995, plusieurs matières (situation individuelle des fonctionnaires, pensions, aide personnalisée au logement, redevance audiovisuelle, actions indemnitaires dont le montant est inférieur à 8.000 euros) peuvent être confiées à un juge statuant seul, en audience publique après audition du commissaire du gouvernement, a-t-il rappelé. Il a signalé qu'un premier élargissement du recours au juge unique était intervenu depuis le décret du 28 juillet 2005, afin d'ouvrir la possibilité pour le juge de statuer seul, par voie d'ordonnance, sur les affaires ne présentant pas de difficultés sérieuses. Il a précisé le champ des affaires concernées par cette réforme (les requêtes relevant d'une série formées devant toutes les juridictions et les litiges les plus simples soumis à la procédure d'admission des pourvois en cassation devant le Conseil d'Etat).

Il a recensé 18.000 affaires jugées à juge unique en 2005, soit près de 11 % des litiges réglés au cours de l'année par les tribunaux administratifs, précisant les domaines plus particulièrement concernés (contentieux de la fonction publique, des impôts locaux et des pensions).

a souligné qu'un nouveau projet d'extension des matières ressortissant à la compétence du juge unique était envisagé qui inquiétait vivement les magistrats administratifs, traditionnellement attachés à la collégialité de la formation de jugement. Après avoir considéré que le renoncement à la collégialité constituait une solution par défaut, M. Simon Sutour, rapporteur pour avis, a souhaité une limitation du recours au juge unique aux affaires les moins complexes et dépourvues d'enjeu à l'égard des droits et libertés fondamentaux. Il a indiqué que le secrétaire général du Conseil d'Etat, M. Patrick Frydman, lui avait donné l'assurance que l'extension envisagée ne viserait qu'un contentieux très ciblé et répétitif, dans des domaines où la jurisprudence était stabilisée et bien établie, comme par exemple le permis à points.

Une autre piste de réforme annoncée lui a semblé préoccupante, à savoir l'instauration d'un pouvoir de filtrage au profit du président d'une formation de jugement du tribunal administratif ou d'une cour administrative d'appel en vue de lui permettre de rejeter par ordonnance les requêtes manifestement insusceptibles de prospérer.

a par ailleurs souhaité que la procédure contentieuse en matière de refus de titre de séjour garantisse aux justiciables la possibilité de présenter tous leurs arguments, appelant l'attention sur la nécessité de prévoir un délai suffisamment long en matière de présentation du mémoire complémentaire annoncé par le requérant.

Satisfait du taux de réalisation de la programmation quinquennale en matière d'investissement (82 %), le rapporteur pour avis s'est félicité de la réalisation de nombreuses opérations immobilières, en particulier, de la concrétisation de deux chantiers ambitieux : la création d'une cour administrative d'appel à Versailles qui fonctionne depuis le 1er septembre 2004 et la création d'un trente-huitième tribunal administratif, à Nîmes, qui fonctionne depuis le 1er novembre dernier et dont le coût s'élève à 6,9 millions d'euros. Il a regretté que le financement de cette opération n'inclue pas le ravalement des façades de ce tribunal, soulignant la nécessité d'effectuer ces travaux concomitamment à la livraison de l'extension du tribunal. M. Simon Sutour, rapporteur pour avis, a fait part du report en 2008 de la construction du tribunal administratif de Toulon initialement programmée pour 2007.

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