en remplacement de M. Patrice Gélard, rapporteur. - Après avoir excusé l'absence du rapporteur, rappelons que le projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, dont notre commission est saisie en deuxième lecture, a été déposé il y a plus d'un an et demi sur le bureau de l'Assemblée nationale, le 3 juin 2009. Entre sa première lecture au Sénat, le 22 décembre 2009, et son examen en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, le 13 octobre dernier, plus de neuf mois se sont écoulés. Je considère scandaleux d'avoir placé les avoués et les personnels de leurs études dans une situation aussi inconfortable. L'État, s'il décide de supprimer une profession juridique, doit le faire de manière respectueuse en prenant des mesures d'accompagnement et en maintenant le dialogue, dont je salue la reprise.
L'Assemblée nationale et le Sénat ayant respectivement adopté 10 et 12 articles conformes, 13 articles restent en discussion.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a confirmé la plupart des avancées que le Sénat a obtenues en première lecture. En premier lieu, la fixation, par le juge de l'expropriation, d'une indemnité au titre de l'ensemble -j'y insiste- des préjudices subis par les avoués près les cours d'appel. En deuxième lieu, le versement aux salariés des études d'avoués licenciés d'une indemnité calculée à hauteur d'un mois de salaire par année d'ancienneté. En dernier lieu, l'entrée en vigueur de la disparition de la profession d'avoué le 1er janvier 2012 afin de ménager une période transitoire d'environ un an. Parmi les autres points d'accord, citons l'intégration des avoués à la profession d'avocat et la spécialisation en procédure d'appel. Les députés ont approuvé que les anciens avoués devenus avocats puissent faire mention d'une spécialisation en procédure d'appel. Il doit en aller de même pour les collaborateurs d'avoués titulaires du certificat d'aptitude à la profession d'avoué. L'article n'étant plus en discussion, M. Béteille a déposé, au nom de la commission, un amendement à cette fin au projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementés.
J'en viens aux sujets restant en discussion, à commencer par le régime d'indemnisation des avoués. Si l'Assemblée nationale a conforté le dispositif, via la création d'une procédure d'offre préalable d'indemnisation présentée à chaque avoué par la commission nationale chargée d'examiner les demandes d'indemnisation et l'adaptation des délais dans lesquels l'avoué pourra demander à recevoir l'acompte prévu à l'article 17, elle a supprimé, à l'initiative du Gouvernement, les exonérations fiscales et sociales votées par le Sénat. Cette suppression aura un impact limité puisque les anciens avoués pourront bénéficier des exonérations de droit commun. Néanmoins, le Gouvernement, pour apaiser les dernières inquiétudes, devra confirmer en séance publique que les dispositions fiscales s'appliqueront dans un sens favorable aux avoués -et, entre autres, que la plus-value sera calculée sur la base de la valeur de l'office à la date d'acquisition des parts sociales- et que l'acompte, s'imputant sur la part de l'indemnisation correspondant à la perte du droit de présentation, relèvera du régime fiscal de la plus-value.
Deuxième sujet, les indemnités de licenciement des salariés des études d'avoués. Les salariés qui signeront une convention de reclassement bénéficieront d'indemnités majorées, a précisé l'Assemblée nationale. Toutefois, le Gouvernement doit préciser les conditions de recrutement dans les services judiciaires. De fait, à entendre les propos du Garde des sceaux lors de l'examen de la loi de finances pour 2010, tout était merveilleux : l'État allait reclasser 380 personnes dans les greffes des juridictions. La réalité, explique M. Détraigne dans son récent avis budgétaire, est que « quelques salariés seulement ont été reçus aux concours en 2010 ». En outre, la Chancellerie a précisé que ces recrutements seront étalés sur deux ans. Soyons vigilants : l'administration a une capacité de rejet des corps étrangers tout à fait extraordinaire ! J'en veux pour autre preuve la valorisation des acquis de l'expérience : on en parle beaucoup, mais elle est peu mise en oeuvre...
Troisième sujet, le double exercice. L'Assemblée nationale a réduit la période durant laquelle les avoués pourront exercer leur profession et celle d'avocat aux trois mois précédant le 1er janvier 2012, afin de limiter les distorsions de concurrence. La solution paraît équilibrée.
Enfin, la commission interrogera le Garde des sceaux sur la dématérialisation des procédures. De fait, l'informatisation, que les cours d'appel mettent en place progressivement, ne va-t-elle pas aboutir à une paralysie totale du dispositif de la procédure d'appel ? On peut le craindre, malgré le bel optimisme affiché par la Chancellerie.
Sous réserve que le Gouvernement prenne des engagements sur la fiscalisation des indemnités, la commission propose d'adopter le texte conforme.