Intervention de Patrick Devedjian

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 3 juin 2009 : 1ère réunion
Conséquences de la crise économique et financière en matière de sécurité et de défense — Audition de M. Patrick deVedjian ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance

Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance :

a tout d'abord rappelé les mesures du plan de relance relatives à la défense :

- une augmentation très significative de l'effort de recherche de 110 millions d'euros, au-delà du flux annuel de 700 millions par an, qui financera des études dans des secteurs clés des technologies de défense et de l'exportation ; une soixantaine de programmes d'études amont sont concernés, essentiellement dans les domaines de l'électronique embarquée pour l'aéronautique, de l'électronique de défense et des systèmes navals et terrestres de défense ;

- une accélération des opérations d'équipement des forces, à hauteur de 1,231 milliard d'euros. Cette enveloppe est consacrée à des programmes attendus par les forces et prévus dans le référentiel, mais qui ont aussi un impact sur l'industrie française et notamment sur des secteurs fragiles ou particulièrement exposés à la crise, comme la construction navale, l'industrie automobile ou la filière munitionnaire. L'efficacité et la réactivité ont conduit à privilégier des supports contractuels existants comme pour les VBCI (véhicules blindés de combat d'infanterie) ou les PVP (petits véhicules protégés), le Rafale ou les hélicoptères ;

- un effort sur le maintien en condition opérationnelle, à hauteur de 194 millions d'euros, au travers d'une cinquantaine d'opérations d'acquisition de pièces de rechange ou de sous-ensembles, qui permettra d'améliorer la disponibilité de matériels opérationnels terrestres, aériens et navals ;

- enfin, un programme exceptionnel de remise à niveau du patrimoine immobilier, d'un montant de 220 millions d'euros, qui servira à financer dès 2009 la remise aux normes des infrastructures et installations des sites de la défense. Le surcroît d'activité économique qui sera généré par ces nombreux travaux sera particulièrement utile aux PME du BTP et aux artisans sur l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, le ministère de la défense a été autorisé à consommer en 2009 500 millions d'euros de crédits reportés pour apurer une partie de ses retards de paiement, notamment vis-à-vis des PME, qu'elles soient fournisseurs directs ou sous-traitants de donneurs d'ordre.

En outre, les fournisseurs du ministère de la défense vont être les principaux bénéficiaires, à hauteur de 250 à 300 millions d'euros, du relèvement du taux d'avance de 5 % à 20 % sur les marchés publics, mesure pour laquelle une enveloppe de 1 milliard d'euros a été prévue pour 2009 et qui a fait l'objet d'un premier décret de transfert.

Au total, le volet « défense » du plan de relance s'élèvera à 1 755 millions d'euros et représentera 45 % du programme exceptionnel d'investissement public.

a souligné que le programme d'investissement de la défense permettait de concentrer l'effort sur des investissements essentiellement nationaux en faisant appel à des emplois de haute technologie ou très spécialisés, non délocalisables. Il s'agit du principal secteur d'activité, avec l'automobile, pour lequel le plan de relance a un impact immédiat quasi mesurable sur l'industrie. S'adressant à l'ensemble de la chaîne de sous-traitance, il sauvegardera et générera des emplois sur le territoire national. Les fournisseurs ayant des activités à caractère dual pourront compenser en partie le ralentissement de leur activité fragilisée dans le secteur civil. Cet effet contracyclique recherché par le plan de relance est très important.

a observé que, grâce au plan de relance, l'effort d'équipement militaire passerait de 15,4 milliards d'euros, en 2008, à 18 milliards d'euros courant 2009, soit un accroissement de 17 %, cette augmentation atteignant 20 % en prenant en compte la consommation de 500 millions d'euros de crédits de report.

Le Plan de relance vient ainsi renforcer l'effort financier très conséquent que consacre le projet de loi de programmation militaire (LPM) 2009-2014 en faveur des dépenses d'équipement, dont l'enveloppe est en augmentation de 8 % en euros constants par rapport à celle prévue par la LPM 2003-2008, elle-même en augmentation de 4 % par rapport à la précédente LPM 1997-2002.

L'effort d'équipement sera accéléré sur les annuités 2009 et 2010, en anticipant des opérations initialement prévues sur la deuxième moitié de la période d'application de la loi de programmation militaire, voire au-delà de 2014, comme la réalisation d'un troisième bâtiment de projection et de commandement (BPC).

Le ministre a précisé que l'ensemble du dispositif nécessaire à l'exécution du plan de relance était aujourd'hui en place, et que la mise à disposition des crédits avait donné lieu, le 19 février 2009, à un transfert de 1,62 milliard d'euros en autorisations d'engagement et de 440 millions d'euros en crédits de paiement vers les programmes « environnement et prospective de la politique de défense », « équipement des forces », « soutien de la politique de la défense » et « préparation et emploi des forces » du ministère de la défense. Il a indiqué que, afin de s'assurer du bon déroulement des programmes et d'opérer, si nécessaire, des substitutions d'opérations en cas de défaillance ou de retard dans le démarrage de tel ou tel projet, un dispositif permettant de disposer pour chaque projet, programme et région, de l'état d'avancement en temps réel avait été mis en place. Des échéanciers ont été établis, assortis de dispositifs d'alerte. Des substitutions ont déjà été opérées par rapport à la programmation initiale. En outre, un site Internet permet au public de disposer des informations relatives à l'exécution du plan. Au-delà d'un simple vecteur de communication, c'est un facteur de transparence d'exécution du plan.

a ajouté que, en ce qui concerne la défense, un milliard d'euros avait été engagé à la fin avril 2009 et 47 millions d'euros avaient été payés. Les principales opérations lancées concernent la réalisation du troisième bâtiment de projection et de commandement, l'acquisition de cinq hélicoptères Caracal et de quinze véhicules blindés ARAVIS ainsi que des contrats directs avec des PME.

Le ministre a ensuite évoqué le contexte international et effectué une analyse comparative des plans de relance. Il a observé que le choix effectué par la France de soutenir par des commandes publiques les industries de la défense faisait figure d'exception à l'échelle internationale, même si des mesures spécifiques existent parfois en dehors du périmètre des plans de relance.

Il a rappelé que si la crise avait trouvé son origine dans l'éclatement de la bulle immobilière américaine, elle s'était rapidement étendue à l'ensemble des pays du globe et à tous les secteurs d'activité. Selon le FMI, l'économie mondiale devrait connaître un recul de 1,3 % en 2009 tandis que l'OCDE estime que les volumes d'échanges mondiaux devraient baisser de 13 % par rapport à 2008. Dans ce contexte, les évolutions des PIB de nos principaux partenaires commerciaux au premier trimestre de l'année 2009 montrent une meilleure résistance de la France, les derniers résultats relatifs à la consommation des ménages témoignant de la solidité de nos fondamentaux ainsi que de l'efficacité des mesures prises par le Gouvernement. Le contexte reste néanmoins très défavorable puisque, pour l'année 2009, les estimations pour la France envisagent un recul du PIB de 3 %, une reprise graduelle étant attendue en 2010.

Le ministre a indiqué que l'ensemble des mesures de relance prises à l'échelle européenne était évalué à 400 milliards d'euros par la Commission européenne, en incluant les stabilisateurs automatiques, les Etats-Unis ayant adopté un plan de relance de 787 milliards de dollars et le Japon une série de mesures pour un total de 210 milliards d'euros. Il a rappelé que le plan de relance européen adopté par le Conseil européen des 12 et 13 décembre 2008, sous présidence française, avait préconisé des « investissements intelligents » permettant de créer de l'activité à court terme tout en améliorant la compétitivité future et que le plan français respectait parfaitement cette ligne. De son côté, le plan américain faisait également de l'investissement le fer de lance de la lutte contre la destruction des emplois.

Le ministre a indiqué que l'économie française bénéficiait des plans de relance de nos partenaires commerciaux. Ainsi, la prime à la casse allemande a engendré une forte accélération des ventes sur le marché automobile, particulièrement profitable au segment des petits modèles, sur lesquels les constructeurs français sont bien placés. En adoptant un raisonnement macro-économique, on peut chiffrer l'impact théorique sur la croissance française des plans de relance des principaux pays avancés à 0,7 point du PIB en 2009. L'impact des plans de relance sera concentré sur l'année 2009 pour le Royaume-Uni, la France, le Japon et l'Espagne, alors que pour les Etats-Unis et l'Allemagne il sera plus fort en 2010. S'agissant de la mise en oeuvre des ces plans, on peut distinguer les mesures à effet immédiat sur les prix (baisse de TVA au Royaume Uni, prime à la casse en Allemagne) afin de soutenir la consommation qui sont déjà entrées en vigueur, les mesures de soutien direct au pouvoir d'achat des ménages, qui ne sont généralement pas encore toutes effectives et pourraient être finalement étalées dans le temps, et les mesures de relance par l'investissement public dont la mise en place est plus lente et qui commencent juste à être opérationnelles.

Le ministre a souligné que la France avait choisi d'associer les mesures d'investissement à l'attribution de moyens importants destinés aux ménages les plus modestes et aux personnes touchées par la crise.

En conclusion, M. Patrick Devedjian a évoqué les opportunités ouvertes par la crise à plus long terme, le constat quotidien des difficultés des entreprises et les pertes d'emplois ne devant pas masquer les réformes et les changements en cours. Il a notamment cité la mobilisation internationale et l'effort de solidarité envers les populations les plus fragiles, à travers le triplement des ressources du FMI (qui passent de 250 à 750 milliards de dollars) décidé par le G 20. La crise a également concrétisé la montée en puissance des pays émergents au sein des instances internationales, comme l'atteste la place plus importante prise par le G20 sous la pression du groupe de pays formé par le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine. En parallèle, l'Union européenne a su démontrer sa capacité de réaction, en prenant de nombreuses initiatives sur la scène internationale tandis que la zone euro témoignait de sa capacité à amortir les chocs. La crise a également souligné l'importance des mécanismes et outils de régulation et conduira à un renforcement de ces derniers pour aboutir à un marché plus sain et mieux contrôlé. Enfin, la baisse mesurée des prix des matières premières, la limitation de l'inflation à des niveaux plus raisonnables, le réajustement des parités euro/dollar sont autant de facteurs dont nos entreprises sauront tirer parti.

En ce qui concerne la France, il a précisé que beaucoup de chantiers avaient déjà commencé et que les collectivités locales avaient adhéré massivement à la mesure du remboursement du FCTVA. En additionnant les crédits d'investissement de l'Etat et les mesures fiscales propres à améliorer la trésorerie des entreprises, plus de 9,8 milliards d'euros ont été injectés dans l'économie depuis le début de l'année. Il a ajouté qu'il s'attacherait à ce que le rythme d'exécution du plan de relance soit le plus élevé possible et à ce que les mesures arrêtées, qui mobilisent des moyens massifs, concernent tous nos concitoyens où qu'ils se trouvent sur le territoire national.

Puis un débat s'est ouvert au sein de la commission.

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