Intervention de Pierre Graff

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 21 juillet 2009 : 1ère réunion
Audition de M. Pierre Graff président directeur général d'aéroports de paris

Pierre Graff, président-directeur général d'ADP :

En réponse, M. Pierre Graff, président-directeur général d'ADP, a tout d'abord observé que, partageant le diagnostic d'insuffisance de l'ancienne signalétique, ADP venait de mener à bien une opération de changement complet des 10 000 panneaux des aérogares de Roissy et Orly, le plan de signalétique adopté étant calqué sur celui de l'aéroport d'Amsterdam, classé au premier rang international dans ce domaine. Les panneaux nouveaux sont en français et en anglais et l'amélioration des résultats de satisfaction enregistrés lors des sondages trimestriels effectués par ADP sur 8 000 clients résulte probablement en partie des efforts en matière de signalétique. L'optimisation de la signalétique reste cependant impuissante à régler le problème du gigantisme du site de l'aéroport de Roissy, qui génère des cheminements longs et complexes pour les passagers. Afin de limiter ces cheminements, il est envisagé de regrouper toutes les correspondances d'Air France sur les terminaux 2E et 2F. Après les efforts en matière de signalétique dans les aérogares, ADP modifiera, une fois la crise économique passée, la signalétique routière. Enfin, bien que les personnels d'accueil des salons soient très compétents, l'accueil « haut de gamme » n'est pas à la hauteur des standards internationaux les plus élevés car les locaux ne sont pas satisfaisants : il faudrait investir 8 millions d'euros pour créer un nouveau salon d'honneur. Cependant, ne générant aucune ressource supplémentaire pour ADP, ce projet ne peut pas être envisagé dans l'immédiat.

a ensuite rappelé que tous les problèmes de qualité de service ne relevaient pas de la responsabilité d'ADP : si l'entreprise est responsable de la fourniture des moyens matériels (locaux, passerelles d'accès aux avions en état de marche, carrousels à bagages...), il appartient aux compagnies aériennes, directement ou par leurs sous-traitants, d'assurer certains services aux voyageurs (mise en oeuvre des passerelles, convoyage par autocar, déchargement des bagages...). Or, ces activités sont parfois mal assurées, voire mal organisées. En ce qui concerne les bagages, ADP s'efforce de mener des actions complémentaires pour améliorer le confort des passagers avec un meilleur aménagement des salles d'attente des bagages ou encore l'installation de panneaux indicateurs de temps d'attente. Par ailleurs, ADP veille à limiter les temps d'acheminement des bagages en mettant les gros porteurs au contact et non au large des aérogares : ainsi, le taux de contact à l'aéroport de Roissy s'établit désormais, avec l'achèvement des travaux du Terminal 1, à 85 %. Cependant, tous les avions ne peuvent pas être au contact des portes d'embarquement et de débarquement, sauf à réduire substantiellement le trafic, ce qui n'est pas envisageable, ou à étendre considérablement les bâtiments, option qui, au-delà des coûts d'investissement impossibles à supporter dans la période actuelle, ne constituerait pas nécessairement une bonne solution pour les voyageurs qui, comme à l'aéroport de Francfort, seraient contraints de beaucoup marcher dans les aérogares avant de parvenir aux portes d'embarquement. En ce qui concerne le transfert en bus des voyageurs entre la salle d'embarquement et l'avion, ADP n'intervient pas non plus, l'acheminement relevant des compagnies aériennes, qui sous-traitent en général ce service. Certains aéroports, en particulier celui de Singapour, imposent aux compagnies un contrat de qualité de service comportant des sanctions financières en cas de non-respect de ses dispositions, mais un tel modèle est difficilement exportable en Europe. En tout état de cause, pour apprécier ces problématiques et permettre à ADP de dialoguer avec les prestataires afin d'améliorer la situation, cent « voyageurs mystères » testent chaque semaine la qualité de l'accueil dans les aérogares.

En matière de qualité du service de sûreté et d'accueil des passagers aux points de contrôle, M. Pierre Graff a souligné que les compagnies sous-traitantes d'ADP rencontraient, compte tenu des contraintes de ce métier, des difficultés à recruter du personnel qualifié, le délai d'obtention d'un badge d'accès pouvant en outre atteindre trois mois. La sécurité est financée par une taxe sur les billets d'avion, d'un montant de 9,5 euros par passager légèrement inférieur à la moyenne européenne, prélevée par l'Etat et reversée à ADP en moyenne un an plus tard. ADP doit donc effectuer un arbitrage entre la qualité de service attendue et le coût de ce service financé par la taxe. Par ailleurs, les normes pour les contrôles de sécurité aux portiques sont fixées par les préfets sur la base d'une instruction générale de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), plus sévère que celles des autres pays européens, et peuvent varier selon les départements en fonction de l'appréciation de la menace, qui ne relève pas d'ADP. Les passagers ne comprennent pas ces variations dans la sévérité du contrôle, notamment le renforcement de la réglementation relative aux liquides. Quant à l'activité de la PAF, des progrès ont été réalisés mais il demeure regrettable que les tours de service des 1 700 fonctionnaires en activité dans les aéroports d'ADP ne soient pas totalement calés sur les flux aériens.

S'agissant des commerces, M. Pierre Graff a estimé que d'importants progrès avaient été accomplis même si d'autres restaient à faire, notamment à Orly qui conserve quelques bars et restaurants ne correspondant plus aux standards attendus par la clientèle. Deux joint-ventures ont été créées avec Hachette Groupe et Nuance Group afin d'améliorer l'offre commerciale dans les aérogares. La boutique de parfums du satellite 3 à Roissy est d'ores et déjà la plus grande d'Ile-de-France. Progressivement, les anciens concessionnaires sont remplacés par des nouveaux, qui améliorent le service aux clients. En conséquence, le chiffre d'affaires des boutiques dans les aéroports parisiens a augmenté de 24 % en trois ans, ce qui tend à démontrer l'intérêt renouvelé de la clientèle pour ces commerces.

a ensuite indiqué que les redevances, qui représentent tout au plus 4 % des charges d'exploitation des compagnies aériennes, ne constituent pas un facteur principal de choix d'implantation de leurs vols, les compagnies s'installant prioritairement dans les zones importantes de chalandise. Il a précisé qu'il existait une « redevance passager » finançant les terminaux, dont les tarifs parisiens sont inférieurs à ceux des principaux concurrents européens d'ADP, et une « redevance atterrissage » finançant les pistes, dont le tarif d'ADP est plus élevé que ceux de ses principaux concurrents, ce qui justifie une politique tarifaire orientée à la baisse pour les gros porteurs ou avec des tarifs réduits de 40 % pour les vols en correspondance, afin de maintenir l'attractivité de la place. Par ailleurs, si Paris doit demeurer dans la norme européenne en matière de redevance, ses principaux concurrents, les aéroports de Londres et Francfort, vont être forcés d'augmenter leurs tarifs dans les années qui viennent pour financer les investissements lourds qu'ils ont programmés.

S'agissant des intempéries, M. Pierre Graff a précisé que si les aéroports parisiens avaient été fermés durant la tempête du mois de février 2009, ils n'étaient jamais fermés à cause de la neige, à l'inverse des aéroports nord-américains qui le sont durant le passage du front neigeux. Le problème posé par la neige résulte moins du déblayage des pistes, qui ne prend que trois quarts d'heure à Roissy, que de la nécessité de dégivrer les avions : lorsque les portiques de dégivrage sont saturés, comme au mois d'avril 2009, les retards s'accumulent et les passagers, une fois la capacité hôtelière épuisée, s'entassent dans les aérogares, donnant une très mauvaise image de Roissy. Il serait préférable d'annuler des vols, voire, en s'appuyant sur des données météorologiques fiables, d'annuler préventivement un certain pourcentage des vols pour préserver la capacité à embarquer correctement les autres.

a ensuite confirmé que certains agents voyaient leur badge d'accès retiré par les préfets, ceci se traduisant souvent par la perte d'emploi des intéressés. Il a cependant souligné qu'ADP avait une politique active en direction des riverains des aéroports parisiens souhaitant y travailler, par la participation à des GIP-emploi, en organisant des forums formation en partenariat avec le Pôle emploi, ou encore en favorisant des pépinières d'entreprise. Il a toutefois précisé que, même pour les emplois les moins qualifiés, la nécessité de parler anglais constituait une contrainte à l'embauche. Il a indiqué également qu'ADP fournissait des terrains à des offices HLM, participait à des actions en matière de transports des salariés sur site, avec le dispositif Allobus ou l'association Papa Charlie, ou encore menait des actions sociales et caritatives avec la fondation ADP. Il a cependant estimé qu'avec 4 000 salariés à Roissy et 2 000 à Orly, l'entreprise ADP n'était pas le seul gros employeur de la zone aéroportuaire et ne pouvait porter seul ces actions.

Puis, après avoir précisé que le projet « Coeur d'Orly » aurait probablement une année de retard par rapport aux prévisions en raison de la crise, M. Pierre Graff a estimé que la perspective d'un troisième aéroport parisien ou d'une exploitation renforcée de Vatry n'était plus valable à court terme : il est en effet très difficile de trouver un site adéquat pour un nouvel aéroport, nécessitant à la fois une proximité avec Paris et le gel d'un cône de 60 km de long sur 20 km de large pour limiter les nuisances sonores aériennes. De plus, les aéroports parisiens actuels étant suffisants jusqu'en 2020, voire 2025, la question de capacités aéroportuaires supplémentaires ne serait susceptible d'être posée qu'à cet horizon, dans un contexte nouveau notamment en matière de capacités d'emport des avions de nouvelle génération.

a ensuite précisé qu'ADP continuait son développement à l'international avec deux filiales. La première, centrée sur l'ingénierie de construction, aéroportuaire ou non, emploie 500 personnes et gagne des parts de marché. Cinquième entreprise mondiale du secteur, elle est bien positionnée au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie, ayant notamment remporté le concours pour l'édification de la nouvelle ambassade de France à Tokyo. La seconde filiale, centrée sur la gestion aéroportuaire, gère plusieurs aéroports dans différents pays du monde, mais assez peu en Europe où la gestion des aéroports est assez peu déléguée. Cette activité, qui associe l'investissement capitalistique et la gestion, est encore modeste mais l'alliance avec Schipol permettra de lui donner une plus grande dimension. La philosophie d'ADP dans ce domaine est de saisir les occasions susceptibles de se présenter et de nouer, dans le cadre d'un consortium, des alliances locales dans lesquelles la diplomatie peut compter tout autant que la compétitivité-prix de l'offre. Toutefois, la concurrence est rude sur ce segment, notamment avec les entreprises de bâtiment et les grands groupes internationaux.

Enfin, M. Pierre Graff a estimé que le projet du Grand Paris présentait le double avantage d'identifier les trois sites de Roissy, d'Orly et du Bourget comme sites d'avenir, sources d'activités et d'emplois, et non pas seulement comme sources de nuisances, et de les relier entre eux dans un réseau de transports en commun. Par ailleurs, le projet CDG-Express, dans lequel ADP n'est pas acteur, répond à un besoin de la clientèle d'affaires souhaitant accéder vite et dans de bonnes conditions de confort à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle.

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