Puis la commission a examiné le rapport pour avis de M. Francis Grignon sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord sur l'application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens.
Après avoir rappelé l'enjeu fondamental que représentait la protection de la propriété industrielle dans une économie fondée sur la connaissance, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, s'est attaché à présenter les multiples dimensions de la problématique des brevets. Il a ainsi souligné que les brevets étaient un bon indicateur du dynamisme des entreprises françaises en matière de recherche et développement. Il a ensuite mis en évidence que le brevet était un double vecteur d'innovation, en raison du paradoxe lié à la protection de la propriété industrielle, qui consiste, d'un côté, à protéger l'innovation en offrant à l'inventeur le bénéfice temporaire d'une situation de monopole dans l'exploitation de son invention, et de l'autre, à assurer une diffusion de l'innovation dans l'ensemble de la société en exigeant la publication de l'invention.
a ensuite présenté successivement les quatre axes d'analyse qui ont structuré l'élaboration de son rapport.
Il a, tout d'abord, tenu à présenter ce que recouvrait la notion de brevet en précisant les différentes phases du processus conduisant à sa validation finale. Il a, à cet égard, expliqué qu'un brevet comprenait deux parties: les revendications, qui constituent la partie stratégique du brevet en ce qu'elles définissent le champ et le niveau de la protection demandée ; les descriptions, qui forment la partie technologique du brevet en ce qu'elles exposent de façon technique l'invention, au besoin avec des dessins et schémas.
Présentant ensuite les différentes phases qui conduisent à la validation du brevet, il a souligné que le dépôt par les entreprises françaises était dans leur très grande majorité effectué dans leur langue nationale. Puis il a indiqué que la demande faisait l'objet d'une publication, dix-huit mois après le premier dépôt, soulignant le caractère fondamental de cette publicité pour les autres entreprises. S'agissant de la phase d'instruction du brevet, il a rappelé que l'Office européen des brevets (OEB) procédait à un examen de la demande, tant du point de vue des revendications que de la description, avant de rendre un avis au demandeur sur la brevetabilité de son invention. Il a enfin indiqué qu'en l'état actuel du droit, le brevet devait être intégralement traduit dans la langue du pays où le déposant souhaitait bénéficier de la protection, pour pouvoir y être validé.
s'est, par ailleurs, attaché à décrire la situation des entreprises françaises en matière de propriété industrielle. Il a constaté que les entreprises françaises n'étaient pas performantes dans le dépôt de brevet par comparaison avec les autres économies développées et s'est inquiété de ce que ces entreprises ne déposaient pas plus de brevets aujourd'hui qu'il y a dix ans. Analysant les raisons de cette faible propension française à déposer des brevets, il a mis en avant quatre raisons principales : un défaut de « culture du brevet », les entreprises françaises n'étant pas encore assez sensibilisées aux enjeux de la propriété industrielle ; des dépenses de recherche et développement relativement faibles par rapport aux autres pays développés ; un déficit d'entreprises de taille suffisante, la propension à breveter étant très liée à la taille des entreprises alors que, dans le même temps, les obligations administratives tendent à favoriser les petites structures en France ; le coût du brevet en lui-même. Sur ce dernier point, il a présenté un tableau récapitulant ses différentes composantes. A cet égard, il a mis l'accent sur les coûts de traduction, qui représentent 30 à 40 % du coût total du brevet et qui apparaissent encore trop souvent dissuasifs pour les petites et moyennes entreprises, qui, en plus, n'en perçoivent pas l'utilité directe.
a ensuite mis en évidence les gains que les entreprises françaises pouvaient espérer tirer d'une ratification du Protocole de Londres. Dans cette perspective, il a souligné que ce dernier ne changeait rien au droit en vigueur jusqu'à la phase de délivrance du brevet, indiquant que les entreprises conservaient la possibilité de déposer leur demande dans l'une des trois langues officielles de l'OEB, donc notamment en français. Il a ainsi constaté que l'élément nouveau issu de l'Accord de Londres consistait en la suppression de l'obligation de traduction des descriptions du brevet au stade de la délivrance du brevet. Après avoir rappelé que la fin de cette obligation n'handicapait en rien la veille technologique des entreprises françaises, qui intervenait dès la publication du brevet et non au stade trop tardif de la délivrance, il a précisé qu'en cas de litige, les descriptions devraient de toute manière être traduites dans la langue du pays de l'instance.
Enfin, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a insisté sur les conséquences directes de l'adoption de l'Accord de Londres pour une entreprise française :
- une simplification de la procédure de dépôt de brevets grâce à la faculté ouverte de mener en français toute la procédure de demande jusqu'à la délivrance du brevet ;
- une diminution du coût du brevet, aujourd'hui estimé en moyenne à 29.800 euros : la suppression des traductions des descriptions permettrait à une entreprise d'économiser sur ce montant environ 10.000 euros, qu'elle pourrait réinvestir dans l'innovation, la recherche ou dans l'extension du champ géographique de la protection conférée par le brevet.
a, par ailleurs, tenu à évoquer le débat sur les enjeux linguistiques du Protocole de Londres. Il a rappelé que si, dans la Convention de Munich de 1973, au fondement du système européen des brevets, la fourniture de traductions intégrales dans la langue du pays où l'invention avait vocation à être protégée n'était qu'une simple faculté, les exigences persistantes de la France et d'autres Etats avaient conduit à faire de cette option une règle générale, alors même que durant les dix ou quinze premières années, l'Allemagne et le Royaume-Uni n'avaient pas demandé la traduction des descriptions. Il a reconnu que cela avait finalement conduit à la nécessité de conclure l'Accord de Londres. Puis il a tenu à rappeler que le français n'était absolument pas sacrifié, mais au contraire sanctuarisé comme langue officielle de l'OEB et que, seules, les descriptions ne feraient plus à l'avenir l'objet d'une traduction intégrale.
En définitive, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a reconnu que la ratification du Protocole de Londres constituait une opportunité pour les entreprises françaises qui bénéficieraient, en matière de brevets, d'une procédure plus simple et d'un coût diminué et qu'elle aurait assurément un effet d'entraînement sur le recours à la protection de la propriété industrielle ainsi que sur les négociations visant à améliorer encore le brevet européen, grâce à l'unification du contentieux, ou à créer un brevet communautaire unique valide sur tout le territoire de l'Union européenne.