Commission des affaires économiques

Réunion du 3 octobre 2007 : 2ème réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • PME
  • brevet
  • günter
  • günter verheugen

La réunion

Source

Debut de section - Permalien
Günter Verheugen

Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Günter Verheugen, vice-président de la Commission européenne, commissaire chargé de l'entreprise et de l'industrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Hubert Haenel

a rappelé que la commission des affaires économiques que préside M. Jean-Paul Emorine et la Délégation pour l'Union européenne étaient très attachées à un dialogue annuel avec le commissaire chargé de l'entreprise et de l'industrie.

Il a rappelé que le portefeuille détenu par M. Günter Verheugen au sein de la Commission européenne les intéressait au premier chef dans la mesure où il menait une action décisive tout à la fois dans le cadre de la stratégie de Lisbonne et dans celui de l'initiative « Mieux légiférer ». Il a souligné que l'action menée par M. Günter Verheugen le mettait au coeur des problèmes économiques actuels puisque il lui revenait de répondre à des questions aussi diverses que la position de l'Europe dans la concurrence mondiale, les possibilités qu'offraient les technologies visant à une croissance plus propre, la responsabilité sociale des entreprises, ou encore la politique industrielle comme contribution à la croissance et à l'emploi au sein de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Après avoir été également accueilli par M. Jean-Paul Emorine, M. Günter Verheugen a exprimé son plaisir à répondre à l'invitation commune de la commission des affaires économiques et de la délégation pour l'Union européenne pour présenter les premiers résultats de la stratégie de Lisbonne. Il a souligné que beaucoup de choses avaient changé en un an depuis leur dernière rencontre, notamment en France avec l'élection d'un nouveau Président de la République et la nomination d'un nouveau gouvernement.

Il s'est félicité de la date choisie pour cette audition, précisant que le matin même la Commission européenne avait adopté un document de principe, une sorte de document stratégique, qui faisait un premier bilan général du nouveau programme de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi en fixant notamment les priorités du prochain cycle politique pour 2009-2011. M. Günter Verheugen a indiqué que ce document servirait de base aux consultations des chefs d'État et de gouvernement qui auront lieu au cours du prochain Conseil européen des 17 et 18 octobre. La Commission européenne adopterait ensuite en décembre un ensemble de mesures. Soulignant que la phase de réflexion et de conception du nouveau cycle de la stratégie de Lisbonne n'était pas achevée, il a indiqué avoir l'intention de multiplier les échanges sur le sujet avec les parlements nationaux et les décideurs nationaux pour tenir compte de leurs remarques.

Debut de section - Permalien
Günter Verheugen

a précisé que son intervention serait axée autour de trois points. Tout d'abord, les progrès réalisés en Europe et en France en matière de croissance et d'emploi. Ensuite, les défis que doivent maîtriser la France et l'Europe. Enfin, les priorités du prochain cycle de la stratégie de Lisbonne.

S'agissant des résultats économiques de l'Europe, M. Günter Verheugen a rappelé que celle-ci vacillait entre l'euphorie et la crise. Soulignant que, si au début de l'année, on pouvait espérer une croissance stable et durable, les taux de croissance étant très élevés, le chômage reculant et des gains de productivité élevés étant enregistrés, il a constaté que l'économie européenne restait dépendante des évolutions dans le reste du monde et, notamment pour les marchés financiers, des États-Unis. Il a regretté que la crise des marchés financiers soit le résultat des pratiques menées par des banquiers cupides qui avaient vendu des produits douteux présentant de grands dangers pour l'économie mondiale. Il a déploré que l'incidence de ces dysfonctionnements du système financier allait maintenant se répercuter sur les économies, les perspectives de croissance pour 2007 - et surtout pour 2008 - devant être revues à la baisse.

a indiqué que, pour autant, la situation en Europe s'était nettement améliorée par rapport au passé, la croissance et l'emploi étant plus élevés, la productivité s'étant accrue, mais que l'objectif devait toujours être celui de parvenir à faire de l'Europe l'économie la plus performante au monde. Il a précisé que la recherche de la performance ne devait cependant pas être une fin en soi, le modèle social européen devant être préservé dans la mondialisation. Il a insisté sur la nécessité de créer des emplois de plus grande qualité, ces emplois devant être pérennisés.

Il s'est interrogé sur les raisons de cette amélioration de la situation économique en Europe, précisant que les économistes avançaient des causes cycliques ou conjoncturelles. Il a ajouté que la demande en provenance des marchés asiatiques en plein essor était très forte, mais que la croissance du marché intérieur avait aussi été soutenue par la demande des nouveaux États membres d'Europe centrale. La France profitant ainsi largement de ce dernier élargissement, il a estimé que ce constat devait être porté à la connaissance de l'opinion publique française, très sceptique face aux nouveaux États membres.

a souligné la forte stabilité macroéconomique de l'Europe - stabilité qu'elle n'avait jamais connue auparavant - grâce à la décision de l'Allemagne et de la France de faire l'euro. Il a affirmé que l'euro avait été très bénéfique pour l'économie européenne, même si tous les consommateurs ne partageaient pas nécessairement cet avis, insistant sur le fait que, grâce à la stabilité budgétaire, la monnaie européenne était protégée des attaques externes. Il a concédé que l'euro était une monnaie forte, même trop forte pour certains. L'Europe n'ayant pas de gouvernement économique, il a estimé que la stratégie de Lisbonne était d'autant plus nécessaire au maintien de cette stabilité. Il a regretté que l'Europe n'ait pas une politique économique commune alors qu'on aurait pu l'imaginer il y a trente-cinq ans lorsqu'on parlait de la communauté économique européenne. La seule solution pour remédier à cette situation était de coordonner le plus efficacement possible les politiques nationales.

Estimant que la stratégie de Lisbonne était un concept politique qui remplaçait le concept français de gouvernement économique, M. Günter Verheugen a indiqué que les lignes directrices intégrées étaient les instruments disponibles qui permettaient de coordonner les politiques économiques nationales, aussi bien au plan macroéconomique ou microéconomique qu'en termes d'emplois. Il a précisé que ces orientations servaient d'abord à la mise au point des plans nationaux de réforme (PNR), de plus en plus sérieux, après trois années de pratique, ajoutant qu'elles servaient aussi à définir le contenu du plan communautaire de réforme qui encadre toute l'action européenne. Précisant que le système de contrôle était basé sur le partenariat entre les États et la Commission européenne, il a indiqué que le rôle de la Commission n'était pas de fixer aux États la marche à suivre, mais plutôt d'aider les États à mettre en oeuvre les réformes qui leur étaient nécessaires.

a constaté que ces orientations étaient maintenant acceptées dans les États membres, comme le montrait l'importance des thèmes de la formation initiale ou continue, de la recherche et du développement, de l'innovation, des mesures en faveur des petites et moyennes entreprises (PME), de la protection de la propriété intellectuelle, de la politique de l'énergie ou de la lutte contre le changement climatique. Sans vouloir faire de l'autosatisfaction, il s'est félicité que le retard de compétitivité vis-à-vis des États-Unis se réduise grâce à toute une série de mesures, comme celles prises par exemple en France en vue de permettre un meilleur accès des PME aux marchés publics ou la création de pôles de compétitivité, qui avaient contribué à faire baisser le chômage d'un point en France en un an.

n'a pas pour autant éludé les mauvaises nouvelles, soulignant que le retard de productivité par rapport aux États-Unis restait très important avec une différence de 35 %. Il a observé que cela s'expliquait par une autre conception de la vie en Europe, les Européens n'étant pas prêts à sacrifier leurs vacances comme les Américains. Plus préoccupant, les Européens étaient loin de dépenser, comme les américains, trois points de leur produit intérieur brut (PIB) pour la recherche et le développement. Il a regretté que l'Union européenne n'ait toujours pas de brevet communautaire, outil incontournable pour renforcer la productivité de l'économie européenne. Enfin, il a indiqué que, s'agissant de la France, trois objectifs lui paraissaient importants, à savoir la soutenabilité des finances publiques, le renforcement de la compétitivité, notamment des services publics, et la modernisation du marché de l'emploi.

a estimé que des efforts devront être fournis dans quatre domaines dans les trois années à venir. Il a tout d'abord cité l'innovation, la mondialisation de la concurrence obligeant les européens à fournir des efforts particuliers dans ce domaine. L'Europe ne voulait et ne pourrait pas protéger ses entreprises de cette concurrence. Pour rester compétitifs dans le cadre de la concurrence internationale, il convenait non pas d'offrir des prix ou des salaires plus bas, mais des produits de meilleure qualité, une telle exigence ne pouvant être atteinte sans rester à la pointe du progrès technique et technologique, ce qui supposait d'atteindre par ailleurs une plus grande efficacité énergétique.

Il a ensuite abordé la situation des PME placées, ces dernières années, au centre de la politique européenne, question qui tient particulièrement à coeur à la France et à son Président de la République. Il a rappelé que les plus grandes réserves de croissance en Europe se trouvaient dans ses 24 millions de PME qui comptaient chacune moins de 250 employés, employaient les deux tiers de tous les salariés européens et constituaient 99 % des entreprises européennes. Plus de la moitié des PME employant moins de dix personnes, il a souligné que l'emploi moyen en Europe dépendait donc d'une PME traditionnelle et familiale, dont l'objectif principal est la garantie de ses revenus alors que, aux États-Unis, l'objectif principal des entreprises est la croissance.

Il a indiqué que la Commission européenne avait décidé aujourd'hui de mettre plus particulièrement l'accent sur les PME dans son document stratégique à la suite d'une demande du Président français. Pour la première fois, la Commission avait annoncé qu'elle était prête à discuter d'une directive pour les PME en Europe. Il a salué cette initiative, qui devrait faire l'objet de propositions d'ici la fin de l'année. Il a précisé que les PME européennes détenaient 43 % des marchés publics, bien plus que les PME américaines. Il a estimé que la démarche américaine correspondante semblait trop orientée et trop limitée. Il a ajouté que les règles destinées à faciliter le développement des PME -comme les moyens de financement- ne devraient pas être fixées au niveau européen, mais au niveau national.

a ensuite indiqué souscrire totalement aux préoccupations françaises relatives aux aspects externes de la politique économique européenne, l'intérêt de l'Europe devant prévaloir avant tout. Il s'est déclaré favorable aux marchés ouverts et à un commerce international libre, sous certaines conditions, notamment celle tendant à lier l'ouverture des marchés à l'exigence d'une concurrence équitable. Il a rappelé les deux conceptions régnant actuellement à cet égard. La première préconise l'obtention des plus bas prix possibles à la consommation, quelle que soit l'origine ou la qualité des produits, afin de favoriser l'épargne en Europe et le réinvestissement des revenus disponibles dans d'autres secteurs de l'économie. Les faits montrent que cette doctrine économique simpliste ne fonctionne pas. La seconde est favorable au maintien d'une base industrielle en Europe pour garder des emplois stables et une vie sociale apaisée. Il convient ainsi de s'interroger sur les effets de la mondialisation sur l'industrialisation et sur l'emploi en Europe.

a estimé que les conflits entre les pays européens tenaient en fait à la différence entre ceux qui n'ont plus de bases industrielles saines et ceux qui disposent encore d'une industrie, comme la France et l'Allemagne, ajoutant que les conflits entre ces deux groupes de pays ne pouvaient être surmontés qu'à partir du moment où les pays s'entendaient sur l'intérêt européen. Prenant en exemple le cas de l'industrie chimique, qui ne présente pas d'intérêt majeur pour les pays non industriels, il a insisté sur le fait qu'elle devait néanmoins être considérée par ceux-ci comme une industrie européenne, de même que l'industrie automobile ou aéronautique, quels que soient les sites d'implantation. Il a souligné la nécessité de protéger ces industries face à des pays qui ne pratiquent pas des règles commerciales équitables, car défendre ses intérêts et ses droits ne pouvait être taxé de protectionnisme. Il a jugé nécessaire d'arrêter une définition commune de l'intérêt économique.

a indiqué que dans une récente affaire de dumping commercial portant sur l'importation de lampes à économie d'énergie fabriquées en Chine par des entreprises européennes, il n'avait pas voulu céder, au sein de la Commission, à la pression exercée pour refuser le bénéfice de la protection communautaire au seul fabriquant européen qui n'avait pas suivi ses concurrents en Chine car cela aurait eu pour effet de le pénaliser. Dans cet exemple, la vie et le destin de milliers de personnes qui perdaient leur emploi étaient en cause. Il a demandé à la France de faire entendre sa voix dans cette discussion et a souhaité pouvoir compter sur son appui. M. Günter Verheugen a ajouté que la politique commerciale n'était pas un instrument de politique étrangère ou de politique de développement. La réciprocité totale doit être la règle dans les relations commerciales internationales, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. Il a estimé impératif d'exiger de nos concurrents, s'ils ont accès au marché européen, des avantages réciproques, justifiant cette exigence par la défense légitime des droits des entreprises européennes et réfutant le terme de protectionnisme.

Dans ce contexte, la défense de la propriété intellectuelle est insuffisamment assurée face à la piraterie et à la contrefaçon et il convient de veiller à ce que les biens des entreprises européennes ne soient pas usurpés dans le cadre de la recherche et de l'innovation. Il faut résister à ceux qui mettent les entrepreneurs européens sous pression pour bénéficier de leur savoir-faire ou exigent le transfert de technologies comme préalable à l'ouverture de sites industriels sur leur territoire. Cette pression est très dangereuse pour les entreprises européennes.

Enfin, M. Günter Verheugen a indiqué qu'un dernier aspect de la stratégie de Lisbonne tenait à l'énergie et à la lutte contre le changement climatique. Il a souligné que pendant longtemps compétitivité, énergie et environnement avaient été séparés alors que ces trois aspects étaient imbriqués. Il s'est félicité que la Commission européenne ait fait des propositions récentes en matière d'énergie, notamment au regard du découplage des activités de production et de transport sur les marchés de l'électricité et du gaz. Il a jugé ces mesures nécessaires pour permettre à l'industrie européenne de disposer de prix de l'énergie plus avantageux et de rester ainsi en Europe, ajoutant que les préoccupations de la Commission relatives à l'efficacité énergétique correspondaient à celles de la future présidence française dont il a précisé attendre beaucoup.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

A M. Jean-Paul Emorine qui lui demandait s'il pensait que l'euro fort jouait en faveur de la croissance et de l'emploi ou avait un effet négatif sur l'économie, M. Günter Verheugen a répondu que l'euro avait créé une forte culture de la stabilité en Europe. Rappelant qu'il avait indiqué, avec une certaine prudence, que l'euro était fort et que certains pensaient même qu'il était trop fort, il a observé que la Commission avait pour règle de ne pas faire de commentaire sur ce sujet. Il a souligné qu'il ne fallait pas seulement prendre en compte le dollar, mais s'intéresser aussi au yen et à la monnaie chinoise. Il a ajouté que les exportations européennes restaient malgré tout à un haut niveau, ce qui prouvait que l'industrie européenne était très compétitive.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

a regretté que l'Europe n'ait pas de recherche commune, que l'effort de recherche consenti soit très inférieur à celui des Etats-Unis, qu'il n'y ait pas encore de brevet communautaire, pas de politique sociale commune, pas plus que de politique économique commune ou de politique étrangère commune. Il a rappelé que la productivité américaine était très supérieure à la productivité européenne et a indiqué qu'il voyait mal l'Europe réduire les vacances des Européens. Il a ensuite demandé à M. Günter Verheugen si, face à l'absence de réciprocité en matière commerciale, il estimait opportun de mettre en avant la préférence communautaire. Observant que la subsistance de tant de disparités en Europe était imputable au fait que chaque État membre pensait pouvoir agir seul, il a souligné qu'il existait des domaines où les États ne pouvaient pas agir seuls, comme celui de l'énergie ou celui des dépenses militaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

a regretté l'absence d'une politique européenne de l'énergie, ajoutant qu'il n'était pas convaincu par les propositions de la Commission. Il a rappelé que l'ouverture à la concurrence du marché de l'énergie pour les entreprises avait conduit à une augmentation des prix de 20 à 30 %, obligeant le législateur français à envisager la mise en place d'une possibilité de retour aux tarifs régulés. Il a ajouté que l'augmentation des prix de l'énergie induisait aussi une perte de compétitivité des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Rappelant que la corruption faussait la concurrence, spécialement dans les relations commerciales internationales, M. Robert Badinter a demandé ce que l'Europe faisait pour lutter contre la corruption pratiquée par, ou contre, les entreprises européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

a rappelé que, s'agissant des PME, il existait aux États-Unis une agence spéciale, la « Small Business Administration », qui veillait en permanence à ce que la législation ne les pénalise pas. Il a précisé cependant que ce système lui semblait difficilement transposable en Europe en raison des très nombreuses dispositions prises dans chaque pays. Revenant sur les propos de M. Günter Verheugen laissant supposer que, dans la mesure où les PME en Europe détenaient 43 % des marchés publics, il n'y avait pas lieu d'intervenir en leur faveur, M. Francis Grignon a souligné que ces parts ne portaient pas sur les marchés les plus compétitifs liés aux nouvelles technologies ou aux armements. Il a estimé très souhaitable de leur réserver certains de ces marchés pour les mettre à l'abri des grands groupes et pour leur permettre de progresser dans des domaines très spécialisés.

En réponse aux intervenants, M. Günter Verheugen a indiqué que la différence de productivité entre l'Europe et les États-Unis ne résultait pas seulement de ce que les Américains prenaient moins de vacances que les Européens. La productivité par heure de travail est de fait sensiblement identique en Europe et aux États-Unis. En termes de coûts de production, la différence de 35 % tient à la fois aux meilleures conditions de financement des entreprises aux États-Unis et à une plus grande ouverture du marché. Le marché américain compte 300 millions de consommateurs contre 500 en Europe et n'est pas soumis à des restrictions aussi nombreuses qu'en Europe. Constatant que le marché intérieur européen n'était pas une réussite aussi importante qu'on le disait, il a estimé que cela ne tenait pas seulement aux problèmes linguistiques, mais aussi au fait que les législations nationales constituaient des entraves au bon fonctionnement du marché intérieur. Il a ajouté que les vacances en Europe représentaient une grande avancée sociale qu'il fallait maintenir.

Debut de section - Permalien
Günter Verheugen

Par ailleurs, M. Günter Verheugen a reconnu que l'Europe souffrait de l'absence d'une politique étrangère commune. Il a estimé qu'il n'était pas impossible d'envisager une meilleure efficacité des dépenses militaires nationales, notamment avec l'Agence européenne de l'armement, bien que les questions de défense ne relèvent pas des compétences communautaires. Il a indiqué que, d'ici la fin de l'année, la Commission allait d'ailleurs faire des propositions en matière d'approvisionnement des armées en faisant mieux jouer la concurrence afin d'obtenir de meilleurs prix. Il a souhaité que soit crée un marché intérieur de l'armement, notamment par la suppression des licences d'exportation et d'importation entre États membres et a estimé que des programmes communs d'armement devraient également permettre à l'industrie européenne d'être plus compétitive. Il a souligné que, comme les industries spatiales ou aéronautiques, l'industrie de la défense jouait un rôle clé dans l'indépendance de l'Europe, des armées indépendantes devant disposer d'armements indépendants.

Rappelant ensuite que la politique de l'énergie n'était plus une compétence communautaire dans le nouveau traité modifié, contrairement aux dispositions contenues dans le projet de traité constitutionnel, il a estimé qu'il convenait de procéder, comme pour la politique économique, par compensation intelligente. Il a indiqué que l'instrument du marché intérieur permettait déjà d'agir dans le domaine de l'électricité et du gaz et que, sans qu'il soit fait recours à une quelconque forme de libéralisation, ce marché intérieur de l'électricité et du gaz devait permettre d'assurer une meilleure interconnexion des réseaux sans que les sociétés propriétaires puissent l'entraver, comme c'est le cas actuellement. Il a précisé que ce dispositif ne concernait pas la France où deux ministères différents assuraient cette séparation des activités de production des activités de transport.

a souligné que l'Europe avait besoin d'une politique énergétique pour préserver l'indépendance de ses approvisionnements d'autant que, d'ici 2020, les besoins en énergie de l'Europe ne devaient pas aller en diminuant. C'est la raison pour laquelle la Commission européenne avait fixé à 20 % la part des énergies renouvelables qui devront être produites en Europe. Il a estimé qu'il convenait de définir une coopération politique et une stratégie avec les pays fournisseurs d'énergie permettant de garantir la sécurité des approvisionnements de l'Europe et qu'il faudrait en outre, dans quelques années, discuter aussi de l'approvisionnement de l'Europe en matières premières.

propos de la corruption, M. Günter Verheugen a estimé qu'il ne suffisait pas de montrer du doigt certains pays, mais qu'il fallait aussi se demander qui les corrompait. Soulignant que les entreprises européennes ne devaient pas céder à la tentation de la corruption, il a précisé qu'un tel objectif ne pouvait s'obtenir par la loi et qu'il s'agissait plutôt de changer les mentalités dans les entreprises attirées par l'appât du gain.

Revenant sur les PME, M. Günter Verheugen a estimé que les PME européennes bénéficiaient déjà de dispositions plus favorables que celles édictées par la Small Business Administration. Il a cité la Charte des PME, ajoutant que le service spécialisé de la Commission à Bruxelles veillait notamment aux incidences de la législation européenne sur les PME. Précisant que les PME subissaient surtout de plus lourdes charges administratives que les grandes entreprises, il a indiqué que ses services avaient décidé d'agir pour les faire baisser de 25 %. Il a observé néanmoins que la part des formalités européennes dans ces charges administratives n'était que de 35 %, 15 % relevant de la transposition des directives européennes et 50 % étant des formalités nationales. Il en a conclu qu'il convenait d'agir au niveau national bien plus qu'au niveau communautaire. S'agissant des marchés publics, il a estimé plus efficace d'aider les PME dans leurs démarches plutôt que de leur réserver des quotas. Il a ajouté que, dans le cadre de la présidence française, la Commission allait en outre définir un programme ambitieux d'amélioration de la concurrence en faveur des PME.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

a pris acte de l'attachement de M. Günter Verheugen aux avancées sociales en Europe ainsi que de son souhait de ne pas sacrifier le modèle social européen sur l'autel de la compétitivité. Il a rappelé que l'essentiel du commerce extérieur s'effectuait entre pays européens dans le cadre d'un commerce interrégional européen fort. Le social et le fiscal ne relevant pas directement des compétences communautaires, il s'est demandé si la Commission ne pouvait pas éviter de porter atteinte aux moyens des services publics, qui faisait l'originalité du modèle social européen par rapport au système américain. Dans la mesure où il a été possible de faire converger les déficits, les taux d'inflation, le niveau des dettes publiques pour faire l'euro, il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles il ne serait pas possible de faire converger le social et le fiscal, dans le but d'éviter un nivellement par le bas du système social en Europe.

Debut de section - Permalien
Günter Verheugen

a rappelé qu'au début des années 90 le Président de la Bundesbank avait estimé au Bundestag que la création d'une monnaie unique sans création d'une politique fiscale et budgétaire commune serait une véritable aventure et il a indiqué partager cette opinion. Il a estimé que grâce au pacte de stabilité, la monnaie commune fonctionnait, mais que le problème posé par l'absence d'une politique fiscale commune subsistait. Soulignant que l'harmonisation de la fiscalité était inimaginable actuellement, du moins dans l'Europe à vingt-sept, il a néanmoins indiqué que la Commission était favorable à une harmonisation des bases de calcul de la fiscalité des entreprises. Il s'est demandé, dans la mesure où certains pays seraient probablement hostiles même à cette forme d'harmonisation fiscale, s'il ne faudrait pas recourir à une coopération renforcée dans ce domaine, par exemple entre les membres de la zone euro.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

Puis la commission a examiné le rapport pour avis de M. Francis Grignon sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord sur l'application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens.

Après avoir rappelé l'enjeu fondamental que représentait la protection de la propriété industrielle dans une économie fondée sur la connaissance, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, s'est attaché à présenter les multiples dimensions de la problématique des brevets. Il a ainsi souligné que les brevets étaient un bon indicateur du dynamisme des entreprises françaises en matière de recherche et développement. Il a ensuite mis en évidence que le brevet était un double vecteur d'innovation, en raison du paradoxe lié à la protection de la propriété industrielle, qui consiste, d'un côté, à protéger l'innovation en offrant à l'inventeur le bénéfice temporaire d'une situation de monopole dans l'exploitation de son invention, et de l'autre, à assurer une diffusion de l'innovation dans l'ensemble de la société en exigeant la publication de l'invention.

a ensuite présenté successivement les quatre axes d'analyse qui ont structuré l'élaboration de son rapport.

Il a, tout d'abord, tenu à présenter ce que recouvrait la notion de brevet en précisant les différentes phases du processus conduisant à sa validation finale. Il a, à cet égard, expliqué qu'un brevet comprenait deux parties: les revendications, qui constituent la partie stratégique du brevet en ce qu'elles définissent le champ et le niveau de la protection demandée ; les descriptions, qui forment la partie technologique du brevet en ce qu'elles exposent de façon technique l'invention, au besoin avec des dessins et schémas.

Présentant ensuite les différentes phases qui conduisent à la validation du brevet, il a souligné que le dépôt par les entreprises françaises était dans leur très grande majorité effectué dans leur langue nationale. Puis il a indiqué que la demande faisait l'objet d'une publication, dix-huit mois après le premier dépôt, soulignant le caractère fondamental de cette publicité pour les autres entreprises. S'agissant de la phase d'instruction du brevet, il a rappelé que l'Office européen des brevets (OEB) procédait à un examen de la demande, tant du point de vue des revendications que de la description, avant de rendre un avis au demandeur sur la brevetabilité de son invention. Il a enfin indiqué qu'en l'état actuel du droit, le brevet devait être intégralement traduit dans la langue du pays où le déposant souhaitait bénéficier de la protection, pour pouvoir y être validé.

s'est, par ailleurs, attaché à décrire la situation des entreprises françaises en matière de propriété industrielle. Il a constaté que les entreprises françaises n'étaient pas performantes dans le dépôt de brevet par comparaison avec les autres économies développées et s'est inquiété de ce que ces entreprises ne déposaient pas plus de brevets aujourd'hui qu'il y a dix ans. Analysant les raisons de cette faible propension française à déposer des brevets, il a mis en avant quatre raisons principales : un défaut de « culture du brevet », les entreprises françaises n'étant pas encore assez sensibilisées aux enjeux de la propriété industrielle ; des dépenses de recherche et développement relativement faibles par rapport aux autres pays développés ; un déficit d'entreprises de taille suffisante, la propension à breveter étant très liée à la taille des entreprises alors que, dans le même temps, les obligations administratives tendent à favoriser les petites structures en France ; le coût du brevet en lui-même. Sur ce dernier point, il a présenté un tableau récapitulant ses différentes composantes. A cet égard, il a mis l'accent sur les coûts de traduction, qui représentent 30 à 40 % du coût total du brevet et qui apparaissent encore trop souvent dissuasifs pour les petites et moyennes entreprises, qui, en plus, n'en perçoivent pas l'utilité directe.

a ensuite mis en évidence les gains que les entreprises françaises pouvaient espérer tirer d'une ratification du Protocole de Londres. Dans cette perspective, il a souligné que ce dernier ne changeait rien au droit en vigueur jusqu'à la phase de délivrance du brevet, indiquant que les entreprises conservaient la possibilité de déposer leur demande dans l'une des trois langues officielles de l'OEB, donc notamment en français. Il a ainsi constaté que l'élément nouveau issu de l'Accord de Londres consistait en la suppression de l'obligation de traduction des descriptions du brevet au stade de la délivrance du brevet. Après avoir rappelé que la fin de cette obligation n'handicapait en rien la veille technologique des entreprises françaises, qui intervenait dès la publication du brevet et non au stade trop tardif de la délivrance, il a précisé qu'en cas de litige, les descriptions devraient de toute manière être traduites dans la langue du pays de l'instance.

Enfin, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a insisté sur les conséquences directes de l'adoption de l'Accord de Londres pour une entreprise française :

- une simplification de la procédure de dépôt de brevets grâce à la faculté ouverte de mener en français toute la procédure de demande jusqu'à la délivrance du brevet ;

- une diminution du coût du brevet, aujourd'hui estimé en moyenne à 29.800 euros : la suppression des traductions des descriptions permettrait à une entreprise d'économiser sur ce montant environ 10.000 euros, qu'elle pourrait réinvestir dans l'innovation, la recherche ou dans l'extension du champ géographique de la protection conférée par le brevet.

a, par ailleurs, tenu à évoquer le débat sur les enjeux linguistiques du Protocole de Londres. Il a rappelé que si, dans la Convention de Munich de 1973, au fondement du système européen des brevets, la fourniture de traductions intégrales dans la langue du pays où l'invention avait vocation à être protégée n'était qu'une simple faculté, les exigences persistantes de la France et d'autres Etats avaient conduit à faire de cette option une règle générale, alors même que durant les dix ou quinze premières années, l'Allemagne et le Royaume-Uni n'avaient pas demandé la traduction des descriptions. Il a reconnu que cela avait finalement conduit à la nécessité de conclure l'Accord de Londres. Puis il a tenu à rappeler que le français n'était absolument pas sacrifié, mais au contraire sanctuarisé comme langue officielle de l'OEB et que, seules, les descriptions ne feraient plus à l'avenir l'objet d'une traduction intégrale.

En définitive, M. Francis Grignon, rapporteur pour avis, a reconnu que la ratification du Protocole de Londres constituait une opportunité pour les entreprises françaises qui bénéficieraient, en matière de brevets, d'une procédure plus simple et d'un coût diminué et qu'elle aurait assurément un effet d'entraînement sur le recours à la protection de la propriété industrielle ainsi que sur les négociations visant à améliorer encore le brevet européen, grâce à l'unification du contentieux, ou à créer un brevet communautaire unique valide sur tout le territoire de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

a déclaré qu'il partageait tout à fait l'analyse du rapporteur, selon laquelle une ratification du protocole de Londres serait propice à l'innovation et à la croissance économique, surtout pour les PME. Il a insisté sur la trop petite taille des entreprises françaises, élément majeur d'explication de l'insuffisante propension à breveter dans notre pays. Evoquant les hésitations de certains parlementaires socialistes au nom de la francophonie, il a déclaré comprendre les inquiétudes des traducteurs, tout en relevant que de nombreuses entreprises travaillaient déjà dans cette langue véhiculaire qu'est l'anglais.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

a souhaité connaître la proportion de brevets qui faisaient ensuite l'objet de litiges, à l'occasion desquels la traduction intégrale du brevet était indispensable.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

lui a indiqué que cette part était infime, de l'ordre de 2 pour mille, puisque, sur 180.000 brevets européens délivrés, on comptait seulement 350 cas annuels de contentieux de validité.

La commission a alors adopté, à l'unanimité, le rapport de M. Francis Grignon donnant un avis favorable au projet de loi autorisant la ratification de l'accord sur l'application de l'article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens.