Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 16 mai 2006 à 21h30
Réforme des successions et des libéralités — Article 1er

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, président de la commission des lois :

Il y a des pessimistes et des optimistes. Je me range plutôt dans la catégorie des optimistes.

J'évoquerai un cas particulier. Je vous rappelle - mais vous le savez, monsieur le garde des sceaux, puisque vous avez évoqué les tutelles - que des parents peuvent très bien établir un testament-partage et ne donner mandat que pour une part, par exemple pour un incapable majeur.

Il est rassurant pour des parents de savoir que, grâce à une personne de confiance, leur enfant, incapable majeur, quelquefois mineur, pourra disposer de revenus garantis et que quelqu'un s'occupera vraiment de ses affaires. On voit tous les jours des parents inquiets de l'avenir de leurs enfants, notamment lorsque ceux-ci sont handicapés. Pour cette seule raison, le mandat à effet posthume présente un intérêt.

L'intérêt économique du mandat à effet posthume a également été évoqué. De nombreuses lois ont été votées, depuis longtemps, monsieur le garde des sceaux, afin de permettre aux entreprises familiales de perdurer au-delà de leur responsable. Il arrive en effet parfois qu'il n'y ait pas d'enfants ou pas d'héritiers qui soient en mesure ou qui aient envie de poursuivre l'activité de l'entreprise.

Ce que certains oublient de dire, c'est que le mandat peut être limité à certains héritiers. Avec les dispositions relatives au partage, on n'est pas obligé de confier au mandataire la totalité des biens de tous les héritiers. Ceux-ci ne sont donc pas privés des droits auxquels ils peuvent prétendre. C'est là une vision très réductrice de ce que peut être le mandat.

Aux termes de la version initiale du projet de loi, la durée du mandat pouvait être indéterminée, notamment en raison de l'incapacité d'un héritier. Cela pouvait se concevoir dans ce cas-là, même s'il est évidemment préférable de limiter cette durée et de permettre de la proroger si le besoin s'en fait sentir et si cela est justifié par un intérêt sérieux et légitime. Quand il n'y a plus d'intérêt sérieux et légitime, ou quand il n'y en a jamais eu d'ailleurs, en cas d'abus de la part du défunt - quand il ne s'agit que d'ennuyer sa famille -, peut-être le juge pourrait-il se prononcer.

Telles sont les raisons pour lesquelles, après y avoir beaucoup réfléchi, la commission des lois, notamment son rapporteur, a abouti à une durée de cinq ans pouvant être prorogée. Cette solution constitue, me semble-t-il, un équilibre.

Je pense que cette innovation qu'est le mandat à effet posthume manquait à notre dispositif juridique. §

N'en déplaise à M. Dreyfus-Schmidt, je crois sincèrement que le mandat à effet posthume mérite de prospérer, car il constitue un apport intéressant à notre législation. C'est pourquoi la commission s'opposera à tous les amendements visant à le supprimer ou à en limiter par trop la portée.

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