Je me réjouis de cette occasion qui m'est donnée, au-delà de la présentation des crédits du programme « Fonction publique», qui n'épuise pas le sujet, de vous exposer les grandes orientations et les principaux chantiers du gouvernement pour 2011 en la matière.
Le programme continue d'assurer ses missions fondamentales, dans la ligne des engagements politiques que nous avons pris avec Eric Woerth lors de la présentation de l'agenda social aux organisations syndicales, en mars 2011.
Les crédits portent sur deux chapitres principaux : l'action sociale interministérielle, pour 60 %, et la formation initiale et continue des fonctionnaires.
L'action sociale interministérielle, avec 138,5 millions porte, d'une part, sur des prestations individuelles anciennes, comme les chèques vacances et de nouvelles, issues des négociations salariales, portant soit sur l'aide aux familles, avec le CESU pour garde d'enfant, soit sur l'aide au logement, avec les aides à l'installation ; d'autre part sur des prestations collectives, comme l'investissement dans les restaurants inter-administratifs, dans la logique habituelle de l'action sociale interministérielle.
En matière de formation, avec une dotation de 82 millions, l'action du ministère s'exerce tant sur la formation initiale qui vise à offrir un socle de connaissances communes aux futurs cadres, de catégorie « A+ », de l'État, formés à l'ENA et aux futurs cadres de catégorie A formés dans les IRA (instituts régionaux d'administration), que sur la formation continue, qui vise à développer la professionnalisation des agents.
La légère inflexion des dotations par rapport à l'année 2011 est à imputer, en premier lieu, à l'effort de 10 % sur les dépenses de fonctionnement et d'intervention demandé aux ministères par la loi de programmation des finances publiques - c'est ainsi que les crédits de la direction générale de l'administration et de la fonction publique diminuent, hors action sociale, de 12 %. En second lieu, les opérateurs sont appelés à contribuer à la rationalisation des effectifs de l'État - soit, pour le programme 148, une réduction, sur la période, de cinq emplois permanents pour les IRA et de douze pour l'ENA - car il ne serait pas normal, j'y ai toujours insisté comme parlementaire, qu'ils échappassent aux règles que s'est fixé l'État. Dans une logique vertueuse, enfin, nous avons autofinancé certaines charges nouvelles, comme la revalorisation de la rémunération des élèves de l'ENA, financée par la réduction de la scolarité de vingt-sept à vingt-quatre mois.
Le programme 148 contribue ainsi à l'effort budgétaire interministériel, tout en continuant d'assurer ses missions fondamentales conformément à l'Agenda social 2010.
Les grandes échéances des mois à venir se résument en quelques verbes d'action.
Mieux dialoguer, tout d'abord, en poursuivant la modernisation du dialogue social engagée avec les accords de Bercy, signés par six organisations représentatives sur huit. Le premier texte que j'ai défendu devant vous visait à mettre en place ce dispositif nouveau, qui doit s'étendre à toute la fonction publique. La plupart des grands textes ont, depuis, été précédés par des accords - je pense notamment, après Bercy, à la convention sur la santé et la sécurité au travail.
La transparence doit devenir la norme, y compris pour ce qui concerne les moyens accordés aux organisations syndicales. J'ai ouvert, il y a quelques semaines, ce grand chantier qui vise à identifier les meilleures voies de modernisation des garanties statutaires et indemnitaires des agents investis de mandats syndicaux et les moyens à leur attribuer pour remplir les missions confiées par leurs mandants. Nous souhaitons pouvoir engager la négociation en 2011.
Mieux recruter, ensuite. Nous entendons ainsi poursuivre la professionnalisation des concours, dont 310 sur 360 ont déjà été révisés, pour la fonction publique de l'État, tandis que la réflexion, que je souhaite encourager, est engagée pour les deux autres fonctions publiques. La reconnaissance des acquis de l'expérience doit, quant à elle, se généraliser, en 2011, à l'ensemble des ministères. Nous optimiserons, dans le cadre du deuxième volet de la RGPP, l'organisation des recrutements, via la mutualisation de l'organisation des concours, laquelle doit également faciliter l'orientation et la préparation des candidats et aider au développement de la mobilité.
Dans les DOM-TOM, nous permettons aux candidats de passer les concours sur place. J'ai pu constater, au cours d'un voyage à la Réunion, il y a quelques semaines, combien les habitants de l'outre-mer étaient sensibles à une disposition qui leur évite d'être défavorisés par l'obligation de se rendre en métropole.
La formation initiale fera également l'objet d'une modernisation, selon les préconisations du rapport Le Bris : individualisation et professionnalisation des formations, réduction des durées de formation - car il n'est pas normal d'avoir, au terme d'années d'études et de formation, à accomplir de surcroît toute une série de stages préalables à l'emploi. L'action sera poursuivie dans ces trois domaines tandis que s'engagera, parallèlement, un travail de rapprochement des écoles de service public.
En matière de formation continue, une initiative de mutualisation des formations communes à plusieurs ministères sera engagée, destinée à en finir avec les redondances, tandis que la qualité des formations sera améliorée, grâce à la labellisation.
L'ENA a fait l'objet d'un projet de réforme qui a trouvé sa traduction législative dans la proposition Warsmann, bientôt soumise à votre examen. L'objectif est de supprimer le classement de sortie actuel pour le remplacer par un dispositif d'appariement entre choix des élèves et choix de l'administration : il n'était pas normal que l'État soit le seul employeur qui n'ait pas son mot à dire dans le recrutement de ses cadres supérieurs. Dorénavant, les élèves indiqueront leur choix préférentiel et l'administration, à l'issue d'un entretien destiné à mesurer l'adéquation du profil du candidat à ses priorités, choisira. Beaucoup d'anciens élèves se sont inquiétés de la neutralité de la fonction publique, qui doit rester prépondérante. C'est pourquoi nous avons prévu qu'une commission, présidée par M. Jouyet, aura charge de prévenir tout risque de népotisme.
La fonction publique de demain doit mieux refléter la composition de la population française. C'est pourquoi notre troisième priorité va à approfondir nos actions d'ouverture à la diversité sous toutes ses formes, et à améliorer l'égalité professionnelle.
C'est ainsi que nous poursuivrons l'effort engagé avec les classes préparatoires intégrées, qui marchent bien puisqu'un tiers des élèves ont intégré les IRA - le succès est moins probant à l'ENA, avec peut-être un reçu sur quinze, mais la gageure était plus grande encore.
La fonction publique se doit également d'être exemplaire en matière d'insertion professionnelle des travailleurs handicapés. Des actions ont déjà été engagées grâce au Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la Fonction publique, mais nous devons aller plus loin encore, en explorant deux pistes : lancer, par circulaire, une campagne de sensibilisation au handicap et mettre en place une journée du handicap dans la fonction publique, grand rendez-vous qui pourrait prendre place début 2011.
Nous entendons également avancer sur la place des femmes dans la fonction publique. Mme Françoise Guégot, qui s'est vu confier une mission, devra identifier les obstacles qui demeurent et ouvrir des voies pour y remédier.
D'autres pistes méritent également d'être explorées, pour améliorer la capacité des femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale, grâce, par exemple, au télétravail, ainsi que pour leur faciliter l'accès aux postes de responsabilité : 10 à 20 % des postes mis à désignation en conseil des ministres pourraient ainsi être ouverts aux femmes.
Quatrième priorité : mieux gérer. La politique de fusion des corps sera poursuivie. Nous engageons également une réflexion sur la mise en place de corps interministériels, notamment pour la filière administrative. Nous nous sommes fixé pour objectif de supprimer 150 corps supplémentaires sur cinq ans. Nous serons ainsi passés de 680 corps en 2005 à 230 en 2015, ce qui facilitera la mobilité, à laquelle je suis très attaché.
Le grand chantier des non-titulaires reste ouvert. Malgré seize plans de titularisation en cinquante ans, les trois fonctions publiques comptent toujours 850.000 agents. Parce qu'il est pour nous essentiel de combattre la précarité, nous entendons travailler à clarifier les cas de recours au contrat, en recherchant des règles incontournables. Il nous faut également offrir des possibilités de passage du CDD au CDI. Le fait est que la loi de 2005, qui interdit de renouveler un CDD plus de six ans, a pu être contournée, grâce à certaines astuces, comme celle qui consiste à interrompre un CDD quelques semaines avant l'échéance des six ans.