Intervention de Hind Khoury

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 12 avril 2006 : 1ère réunion
Audition de Mme Hind Khoury déléguée générale de palestine en france

Hind Khoury, déléguée générale de Palestine en France :

s'est réjouie de pouvoir s'exprimer devant la commission, pour la première fois depuis sa nomination, sur la question de la Palestine. Rappelant que les accords d'Oslo dataient aujourd'hui de 12 ans, la Conférence de Madrid de 15 ans, la résolution 242 des Nations unies de 39 ans, et la résolution 181 de 59 ans, elle a souligné le contraste entre la lenteur caractérisant le règlement international de la question palestinienne et la rapidité avec laquelle, en moins d'un mois, et alors que le Président Abbas avait demandé un répit supplémentaire, la suspension de l'aide communautaire à l'Autorité palestinienne a été décidée. Elle a également rappelé que le Conseil législatif palestinien avait été élu à l'issue d'un processus démocratique et transparent, en dépit d'un contexte difficile marqué par l'absence de toutes perspectives de paix, une colonisation à grande vitesse, la construction du mur de séparation et de routes qui morcellent les territoires palestiniens, ainsi que par un étranglement économique dévastateur.

La déléguée générale de Palestine en France a indiqué que les trois conditions énoncées par la communauté internationale étaient totalement acceptées par l'OLP depuis 1988, le Hamas ayant, quant à lui, respecté une trêve de plus d'une année et donné, ces derniers jours, des signes très positifs au regard desdites conditions. Convenant qu'il appartenait à l'Union européenne, et à elle seule, de décider des conditions d'attribution de son aide, elle a observé que l'aide internationale ne serait plus nécessaire si les libertés élémentaires des Palestiniens étaient respectées. Elle a rappelé qu'en créant l'UNRWA, l'ONU n'avait pas alors cherché à faire respecter les résolutions 181 et 242 du Conseil de sécurité, mais qu'il s'agissait simplement de pourvoir aux besoins humanitaires d'une population confinée dans une condition de réfugiés permanents. Elle a considéré qu'en l'absence de processus de paix, l'aide internationale contribuait à perpétuer l'occupation indéfiniment, mais également que son retrait brutal mettait en danger les jeunes institutions démocratiques de l'Autorité palestinienne, en privant notamment de financement le fonctionnement des services de sécurité. Souhaitant qu'une visite du Président Abbas en Europe puisse rapidement se matérialiser, elle a souligné le risque d'un effondrement de l'Autorité palestinienne, alors même que la France et l'Europe l'ont fortement soutenue depuis 1993.

a évoqué la situation intenable de la population palestinienne, qui subit depuis des mois les bouclages de la bande de Gaza et des villes de Cisjordanie, la violence et les bombardements quotidiens de l'armée d'occupation. Elle a ainsi indiqué qu'à Gaza, quelque 300 obus étaient tirés, chaque jour, sur la population civile et les habitations, terrorisant, blessant ou tuant des enfants.

Elle a estimé qu'Israël était en passe d'annexer une grande partie de la Cisjordanie, ne laissant aux Palestiniens aucune perspective d'un Etat viable après l'annexion de Jérusalem et de la vallée du Jourdain, la construction du mur et de routes réservées aux colons. La politique unilatérale décrétée par Israël, a-t-elle indiqué, ne sert que le projet israélien, sans aucune considération pour la partie palestinienne, bien que le Président Abu Mazen ait la volonté et le mandat clair pour négocier immédiatement et définitivement avec Israël le statut final du futur Etat palestinien. Elle a rappelé la détermination des Palestiniens à voir aboutir la paix.

a estimé que la formation du nouveau gouvernement de M. Ehud Olmert ouvrait une petite fenêtre d'opportunité avec l'entrée des travaillistes et peut-être du Meretz, deux formations politiques ayant montré une certaine flexibilité vis-à-vis des Palestiniens dans le passé. Elle en a appelé aux membres du Sénat afin qu'ils entrent en contact avec les parlementaires israéliens de gauche, en vue de les encourager à revenir sur le chemin de la raison, c'est-à-dire à la négociation avec Abu Mazen. Elle a souligné que seul Israël, en raison du rapport de force disproportionné en sa faveur, avait la possibilité d'infléchir le destin du peuple palestinien, et qu'au regard du droit international et des valeurs humaines, il avait le devoir de laisser ce dernier s'organiser librement sur les 22 % de la Palestine historique que sont Gaza et la Cisjordanie (incluant Jérusalem Est), et dont la moitié est aujourd'hui menacée d'annexion. Elle a ajouté que si cette politique se poursuivait, les Palestiniens seraient confinés dans des bantoustans, propres à un régime d'apartheid et dépourvus de viabilité.

a rappelé que le principe d'une paix juste en échange de la terre était à la base du processus d'Oslo, mais que les Israéliens avaient malheureusement choisi d'occuper la terre des Palestiniens sans proposer la paix. Elle a estimé que toute alternative au compromis historique serait catastrophique et qu'il fallait chercher à engager le Hamas positivement au lieu de l'exclure. Une telle exclusion, a-t-elle poursuivi, provoquerait la radicalisation du mouvement, mais aussi de toute la société palestinienne, qui se sentirait rapidement, elle aussi, stigmatisée. Elle a cité l'exemple de la Turquie, qui montre à quel point le destin des mouvements politiques religieux n'est pas figé. Elle a enfin souligné que la politique du pire face aux Palestiniens aurait des conséquences dramatiques, non seulement pour ces derniers, mais bien au-delà, pour la région et, par conséquent, pour la paix et la stabilité dans le monde.

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