Intervention de Jean-Jacques Hyest

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 29 octobre 2008 : 1ère réunion
Statut et rémunération des dirigeants de société — Examen du rapport

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Enfin la commission a examiné le rapport de M. Jean-Jacques Hyest, président, sur la proposition de loi n° 54 (2008-2009), présentée par Mme Nicole Bricq et les membres du groupe socialiste, visant à réformer le statut des dirigeants de sociétés et à encadrer leur rémunération.

a rappelé que les derniers mois avaient été caractérisés, dans certaines grandes sociétés cotées, par des dérives graves en matière de rémunération des dirigeants d'entreprise dans un contexte marqué par la crise économique. Il a jugé que le comportement d'un nombre très limité de grands dirigeants jetait ainsi l'opprobre sur l'ensemble des sociétés, alors même que la plupart avaient un comportement dénué de reproche.

Il a indiqué que la proposition de loi déposée par Mme Nicole Bricq et les membres du groupe socialiste tendait, selon ses auteurs, à rééquilibrer les droits et obligations des dirigeants et mandataires sociaux et envisageait à cette fin plusieurs modifications de la législation sur les sociétés commerciales, de la législation fiscale et des règles relatives aux contributions sociales.

Il a souligné que ce texte, qui avait été déposé le 23 octobre 2008, ne visait pas seulement à encadrer davantage les conditions de rémunération des dirigeants, mais également à modifier plus largement les règles de gouvernance des sociétés anonymes, en réduisant notamment le cumul des mandats sociaux et accroissant la participation des salariés aux décisions du conseil d'administration.

a estimé que certaines dispositions du texte ne pouvaient, en tout état de cause, constituer une réponse ciblée à la situation actuelle.

Il en est ainsi, a-t-il souligné, des dispositions visant à soumettre la rémunération des dirigeants sociaux à l'avis conforme du comité d'entreprise, de l'obligation générale de faire siéger dans le conseil d'administration des représentants des salariés, de l'abaissement de cinq à trois du nombre de mandats sociaux que peut assumer une seule et même personne, ainsi que de l'interdiction du cumul d'un contrat de travail avec un mandat de direction au sein d'une filiale de la société.

a rappelé que, depuis 2001, plusieurs lois successives avaient été adoptées qui avaient permis de réformer profondément la gouvernance des sociétés françaises. Il a estimé que les modifications proposées pourraient avoir un effet d'éviction des grands groupes de sociétés du territoire national, ce qui n'était pas souhaitable.

Il a souligné que les entreprises avaient édicté le 6 octobre 2008 de nouvelles règles de conduite en matière de gouvernement d'entreprise et de rémunérations des dirigeants sociaux, qui devraient être de nature à mettre fin aux dérives constatées. Il a précisé que si ces recommandations n'avaient pas un caractère juridiquement contraignant, la loi du 3 juillet 2008 portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire obligeait les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé à expliquer dans leurs documents sociaux si elles appliquaient effectivement ces recommandations et, dans le cas contraire, à justifier des raisons pour lesquelles celles-ci n'étaient pas appliquées.

Il a rappelé que l'Autorité des marchés financiers présentait par ailleurs chaque année un rapport dans lequel elle analysait les pratiques des sociétés faisant appel public à l'épargne en matière de gouvernement d'entreprise, de contrôle interne et de rémunération des dirigeants.

Il a en conséquence jugé souhaitable, comme l'avait estimé le président de la République, de laisser aux sociétés concernées le temps de prendre en compte ces nouvelles règles de conduite. Dès lors, la démarche du groupe socialiste d'inscription de cette proposition à l'ordre du jour lui est apparue prématurée.

Il a ajouté que la question de la rémunération des dirigeants sociaux faisait parallèlement l'objet d'initiatives diverses dans trois autres textes législatifs dont il convenait d'attendre l'issue avant d'examiner la pertinence de légiférer sur ce même thème :

- le projet de loi de finances pour 2009 comporterait désormais une disposition limitant la déductibilité fiscale des indemnités de départ versées aux dirigeants sociaux, selon un dispositif identique à celui proposé par l'article 15 de la proposition de loi ;

- le projet de loi en faveur des revenus du travail conditionnerait l'octroi de stock-options au profit des dirigeants à l'existence d'un accord d'intéressement, de participation dérogatoire ou de participation volontaire applicable à l'ensemble des salariés ;

- plusieurs amendements ont été adoptés par les commissions des finances et des affaires culturelles de l'Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale ayant pour objet d'alourdir les contributions au financement de la sécurité sociale applicables aux indemnités de départ des dirigeants.

a estimé qu'il convenait d'abord, dans ce contexte, de procéder à une évaluation de l'application par les entreprises de ces règles de conduite nouvelles avant de s'interroger sur la pertinence de légiférer à nouveau en matière de gouvernement d'entreprise et de rémunérations des dirigeants sociaux.

Il a proposé que la commission demande le renvoi de la proposition de loi en commission afin d'en réexaminer la teneur au vu du bilan du comportement des entreprises, au cours du premier trimestre 2009.

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