Rude sujet... J'ai le sentiment que la loi Leonetti ne traite pas tous les cas de fin de vie et laisse une marge d'appréciation personnelle au médecin quant à sa façon, non pas d'apporter des soins, mais de prendre soin de ses patients en phase terminale. La loi actuelle permet d'abréger cette phase. Mais certains médecins, qui ont une interprétation stricte du principe « tu ne tueras pas », refusent d'appliquer la loi et la clause de conscience va contre l'intérêt des patients qu'on laisse souffrir jusqu'au bout.
Le texte qui nous est proposé, à mon sens, n'a aucun rapport avec les soins palliatifs parce qu'il concerne des gens qui les ont refusés et ne veulent plus vivre. On se situe en dehors du domaine de la loi Leonetti. On ne peut s'arroger le droit de considérer que ces personnes ont l'obligation de vivre et leur faire violence au nom de l'ordre public. Il fut un temps où le suicide était pénalement condamné. Il ne l'est plus, mais il y a des gens qui n'ont plus la capacité physique de passer à l'acte. Il est difficile d'avoir conscience de tout cela lorsqu'on n'a pas personnellement vu des malades se battre pour vivre pendant des années, puis reconnaître qu'ils en sont arrivés à un stade où ils veulent en finir, qui renoncent.
Ces trois textes posent des questions qui méritent d'être posées. Parallèlement, il faut prendre des sanctions exemplaires contre les médecins qui, dans les maisons de retraite ou à l'hôpital, se permettent de hâter la mort de gens qui ne l'ont jamais souhaitée. Nous devons être davantage vigilants pour détecter et punir les abus. La clause de conscience doit être respectée : le médecin peut ne pas partager le « jugement » - excellent terme - sur la vie de ceux qui font cette requête. Je me suis demandé s'il fallait adopter un dispositif juridique a priori comme celui qui nous est ici proposé - qui peut exposer à des abus et qu'il faut encadrer - ou bien un dispositif a posteriori d'abandon des poursuites pénales, qui aurait le mérite d'inciter à réfléchir celui qui envisage d'apporter son assistance à un malade. Je ne souhaite pas en tout cas qu'on emploie dans ce texte le mot de « dignité » parce qu'aucun état de santé n'est indigne. En revanche, j'approuve la rédaction : « quand la personne la juge insupportable ». Je souhaite un débat au Parlement. Si celui-ci le refusait, il faillirait à sa mission. Je souhaite aussi qu'il débatte des abus actuels, pour y mettre fin. La volonté de chacun doit être respectée.